La découverte d'un arsenal d'armes dans la voiture d'un bagagiste, Abderezek Besseghir, en France, a jeté ce dernier dans les ténèbres d'une affaire de terrorisme où il n'a rien à voir, sauf qu'il est victime d'une machination. Samedi 28 décembre. La police de l'air et des frontières reçoit un renseignement faisant état qu'un passager a aperçu une arme dans une voiture, une Peugeot 205 noire, garée dans un parking, à quelques mètres des pistes du terminal 2 de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle. Le véhicule est mis en surveillance. Un homme s'en approche bientôt pour y prendre place. C'est, à l'évidence, le conducteur. Il est aussitôt arrêté. La fouille permet la saisie de cinq pains de 250 grammes de tolite, un puissant explosif brisant à usage militaire, deux détonateurs, un rouleau de mèche lente, un revolver colt calibre 11,43 et un pistolet-mitrailleur Scorpion 9 mm dissimulés sous la roue de secours. Interpellé vers 14 h 45, le conducteur de la Peugeot 205, Abderrazak Besseghir, un Algérien de 27 ans, employé depuis trois ans à la société Europe Handling est placé depuis en garde à vue dans les locaux de la section antiterroriste de la brigade criminelle. Il refuse de s'expliquer sur la présence de ce matériel dans son coffre. Selon lui, les armes et les explosifs auraient été placés là, à son insu, pour le piéger. Domicilié à Bondy (Seine-Saint-Denis), Abderezek est inconnu des services de renseignement. Il n'a été mis en cause qu'une fois par la police, en 1997, dans une affaire de dégradation de biens publics en Seine-Saint-Denis. Au cours de l'été dernier, pourtant, il s'est retrouvé au centre d'une dramatique affaire. Le 7 juillet, le pavillon de Bondy où il venait d'emménager avec son épouse, Louisa, 25 ans, et son petit garçon de 10 mois a brusquement pris feu. Grièvement brûlée, la jeune femme est décédée deux mois plus tard. Pendant deux jours, les enquêteurs ont suspecté Besseghir d'avoir déclenché l'incendie. Il a été placé en garde à vue, avant d'être mis hors de cause par la police judiciaire. Depuis, Besseghir, qui a obtenu la garde de leur petit garçon d'un an, serait harcelé par sa belle-famille, Bechiri, qui souhaite récupérer l'enfant. Le bagagiste affirme qu'elle se serait « vengée » en plaçant les armes et les explosifs dans sa voiture. Un scénario alambiqué que la brigade criminelle devra pourtant vérifier minutieusement avant d'explorer d'éventuelles connexions terroristes. A son appartement de Bondy rien n'a été saisi. Mais son père, ses deux frères et l'un de ses amis qui y étaient lors de la perquisition, dimanche 29 décembre, ont été maintenus en garde à vue pendant 4 jours. Cependant dès l'origine de l'affaire, les enquêteurs de la brigade criminelle s'étaient interrogés sur la crédibilité du témoin clé, Marcel Le Hir. Membre du 8e régiment parachutiste d'infanterie et de marine (RPIMa) de Castres (Tarn) entre 1980 et 1985, cet ancien militaire, qui s'était reconverti dans la sécurité privée, a été condamné pour plusieurs délits. Depuis l'interpellation d'Abderazak Besseghir, ses proches assurent que Marcel Le Hir est lié aux Bechiri. Le 6 janvier, ils ont remis aux policiers une cassette vidéo des fiançailles des Besseghir, montrant l'ancien militaire aux côtés de la belle-famille. Suite aux communications téléphoniques, les policiers sont parvenus en début de semaine à identifier un certain " Patrick", interlocuteur assidu de Marcel Le Hir pendant les trois semaines ayant précédé la dénonciation. Rapidement identifié et placé en garde à vue le 7 janvier avec l'ancien militaire, Patrick Pouchoulin a avoué avoir été chargé par la belle-famille de piéger le bagagiste avec Marcel Le Hir. Âgé de 47 ans, Patrick Pouchoulin - un " pied nickelé gravitant dans le milieu de la sécurité " selon l'expression d'un enquêteur -, a reconnu devant le juge Le Loire avoir été contacté par les Bechiri en tant qu'ami d'enfance de la mère de Louisa et de son oncle, Djilali Diffalah, en fuite en Algérie. Selon les déclarations de Patrick Pouchoulin devant le juge d'instruction, le 28 décembre au petit matin, les trois comparses ont suivi Abderazak Besseghir de son domicile de Bondy (Seine-Saint-Denis) jusqu'à l'aéroport de Roissy. Après avoir garé sa voiture sur le parking, le bagagiste s'est rendu sur son lieu de travail. L'affaire est donc éclaircie, les enquêteurs se sont convaincus qu'il s'agit d'un complot et les beaux-parents de Besseghir et le frère de sa belle-mère ont été placés en détention.