Les cinq mois qui nous séparent des élections communales ne permettent pas l'introduction de grands changements au niveau des lois électorales. Le découpage connaîtra peu de modifications, les listes électorales seront simplement rafraîchies et le mode de vote sera mixé. C'est presque le statu quo. Le gouvernement ne veut pas, apparemment, courir plusieurs lièvres à la fois. Face aux grands chantiers, qui ont une priorité absolue, la chose électorale ne subira pas des changements notables. Seules les grandes villes seront touchées par quelques innovations. Cependant, la majorité gouvernementale semble décidée à prendre les responsabilités que lui confèrent les résultats du suffrage universel. Autrement dit, c'est l'abandon de la politique de consensus autour des lois électorales. Les avis de l'opposition ne seraient pas pris en ligne de compte et la logique votative des textes tranchera. Et même au sein de la majorité gouvernementale, des sons de cloche divergeant avec le projet se font entendre. La visibilité semble aussi faire défaut et l'on s'achemine à faire plaisir à tout le monde, ici ou là. Le découpage électoral ne serait pas touché, même si l'USFP et le Parti de l'Istiqlal appellent à la fusion de communes «pauvres» avec des communes. En d'autres termes, c'est le nombre des unités communales qui est jugé élevé et que le projet a maintenu à 1547 communes (249 urbaines et 1298 rurales). D'ailleurs au niveau des zones rurales, le choix s'est porté sur le scrutin uninominal à un tour, tandis que, pour les grandes villes, c'est le scrutin de liste à la proportionnelle qui est privilégié. La ville est, de surcroît, sujette à une modification majeure. Les anciennes communautés urbaines vont disparaître pour céder la place à au moins 14 conseil de ville (on parle de plus de 16). Il s'agit de Casablanca, Rabat, Salé, Marrakech, Fès, Meknès, Oujda, Kénitra, Agadir, Tanger, Tétouan, Témara, Safi et Taza. Le débat demeure sur la portée d'une telle décision qui noyerait les grandes métropoles avec des villes moyennes. D'aucuns préconisent une limitation de ce «privilège» à trois villes: Casablanca, Marrakech et Fès. Une meilleure visibilité pourra être obtenue en 2003, après l'organisation d'un recensement général, mais le temps ne prête pas à l'attente. Il faudra faire avec les données du recensement de 1994. Le conseil de la ville sera élu dans les centres urbains de plus de 750 000 habitants. Dans le même ordre d'idées, les communes comptant plus de 25 000 habitants seront soumises au mode de scrutin de liste, le reste des communes votera, comme au précédent scrutin communal, selon le mode uninominal à un tour. La refonte des listes électorales est un autre point d'achoppement. L'opposition estime qu'il faudra assainir ces listes et ne pas se contenter de porter sur les registres les personnes qui auront atteint 18 ans, en juin prochain. Elle pense qu'il faudra prendre 3 mois supplémentaires pour concrétiser cette nécessité. L'Exécutif, ou tout du moins sa grande ossature (USFP et PI), craignent une désertion de la part des électeurs et ne seraient pas en mesure de se mobiliser en faveur de l'ouverture générale des listes électorales, même si l'obligation d'inscription est un devoir civique. En tout cas, là aussi, il est question de transition et certains acquis des Législatives ne sont pas à généraliser au niveau des communales. Reste que la gestion des ressources humaines, des charges et des attributions devront attendre d'autres échéances pour trouver des solutions et une approche qui tiennent compte de la marche vers plus de progrès. Car mise à part la durée de l'exercice du président de commune (outre le fait qu'il doit être nécessairement titulaire du certificat d'études primaires), passé à 6 six, le débat de fond n'a pas porté sur l'essentiel. Les missions, les compétences et les attributions n'ont pas suivi la logique du changement. En définitive, les lois électorales ne bousculent pas les mœurs en cours jusqu'ici. Le monde rural et ses assises politiques traditionnelles ne changent pas. Les notabilités locales retrouvent leur mode de scrutin alors que les citadins continuent à conduire la locomotive du changement, lent mais sûr. C'est encore le Maroc à deux vitesses. Le PJD, très peu présent dans le monde rural, semble peu préoccupé par le mode de vote dans les villes. Proportionnelle ou uninominal à un tour (mais pas à deux tours !), c'est du pareil au même pour lui. L'un, comme l'autre, lui permettra une bonne représentativité dans les centres urbains et péri-urbains. Quant à la majorité gouvernementale, il faudra qu'elle bataille dur pour reprendre ses positions du passé, celles de l'époque où elle dénonçait à la falsification de la volonté des citoyens.