Alors que le Premier ministre avait annoncé, en juin 2004, que le gouvernement avait élaboré un plan d'action pour lutter contre le commerce informel, le ministère du Commerce, lui, cherche toujours la solution adéquate à ce problème. Le gouvernement n'a pas encore trouvé la bonne formule pour résoudre le problème du commerce informel. Le ministère du Commerce, de l'Industrie et de la Mise à niveau de l'économie n'a pas encore de vision claire sur la politique à adopter en la matière et continue à organiser des réunions de concertations avec les associations professionnelles pour débattre sur la question. C'est le cas de "la journée d'information sur le commerce informel" qui a été organisée, le 4 février à Mohammedia, sur initiative de ce ministère. Intervenant à cette occasion, la directrice du commerce intérieur au sein de ce département, Mina Boucetta, a fait un exposé explicite sur la place que le commerce informel occupe au Maroc et les différentes expériences nationales et internationales en matière de lutte contre ce problème. Rappelant que le secteur du commerce informel participe pour 13 % dans le Produit Intérieur Brut (PIB), elle a insisté sur la nécessité de "trouver des solutions urgentes pour défendre l'économie nationale de la concurrence déloyale, lutter contre l'exploitation illégale de l'espace public et protéger le consommateur des risques découlant du commerce ambulant qui ne respecte ni la qualité ni la réglementation en vigueur". Ce qui met en péril le secteur commerce formel qui, selon la Mme Boucetta, emploie plus d'un million de personnes réparties sur plus de 770.000 points de vente, plus de 240 magasins franchisés et occupe 200 grandes et moyennes surfaces. Chiffres à l'appui, la responsable du commerce intérieur a expliqué que la multiplication de l'informel menace le développement du commerce au Maroc. Une étude, réalisée par la direction des statistiques sur la période 1999-2000, a révélé que le commerce informel est exercé par environ 917 mille personnes, ce qui représente 91,2 % de l'ensemble des postes d'emploi du secteur du commerce. Ces commerçants qui travaillent dans l'informel occupent plus de 650.900 points de vente et réalisent un chiffre d'affaires d'environ 128 milliards de DH. Ces chiffres révèlent que le secteur informel emploie autant de personnes que le commerce formel. S'agissant des solutions à ce problème, la rencontre de Mohammedia a mis en relief trois expériences différentes. Il s'agit du plan appliqué par la wilaya de Fès-Saïss pour la fixation des commerçants ambulants, l'expérience de la préfecture de Aïn Chock à Casablanca et la méthode adoptée par les autorités locales de Mohammedia, ainsi qu'une expérience française en la matière. Intervenant à cette occasion, la secrétaire générale de la Fédération nationale des syndicats des commerçants, des marchés de France, Charline Brassens, a passé en revue les différents aspects de la stratégie qui a été appliquée en France pour lutter contre le commerce informel. Elle a ainsi souligné que les commerçants non sédentaires en France sont des commerçants à part entière, qui ont les mêmes droits et devoirs, et les mêmes charges fiscales et sociales que leurs homologues sédentaires. Elle a ajouté qu'en France, il existe deux catégories de commerçants non sédentaires, ceux qui ont un domicile fixe et les marchands forains qui n'ont pas de domicile fixe. A titre d'exemple, elle a indiqué que 80 mille entreprises sont considérées comme non sédentaires et exercent dans les marchés des collectivités locales. Au terme de la réunion, plusieurs recommandations ont été retenues par les participants qui ont insisté sur l'interdiction aux marchands ambulants d'exercer leurs activités sur les lieux publics, le renforcement du rôle des Chambres du commerce, d'industrie et des services, l'encouragement de la lutte contre le secteur informel par le système des micro-crédits, et la sédentarisation des vendeurs non sédentaires. Des recommandations qui ne valent pas une journée de réflexion, de discours et de débats qui ont mobilisé des participants nationaux et internationaux. Car, en fait, il ne s'agit pas de véritables solutions proposant des alternatives, mais de simples appels au renforcement du contrôle et de la fermeté à l'égard des vendeurs ambulants qui occupent l'espace public. Par ailleurs, le problème qui se pose est de savoir si le gouvernement a un programme précis pour affronter ce problème. Un gouvernement est censé avoir sa propre vision et il est tenu de proposer des solutions à ce genre de problèmes tout en assumant ses responsabilités en ce qui concerne la réussite ou l'échec de sa politique. D'ailleurs, il y a lieu de signaler qu'il existe une certaine incohérence au sein de l'Exécutif sur le problème du commerce informel. Car, pourquoi le ministère du Commerce organise en février 2005 une journée de réflexion pour trouver une solution au problème de l'informel sachant que le Premier ministre, Driss Jettou, avait annoncé, en juin 2004, lors d'une rencontre avec les professionnels du secteur du commerce intérieur, que son gouvernement avait élaboré un plan d'action pour résoudre le problème de l'informel et en avait exposé les grandes lignes ? Or, sept mois après l'annonce du plan Jettou, le département chargé du Commerce est toujours à la recherche de la solution adéquate.