Aussi bien du côté de Noubir Amaoui que des syndicats contestataires, la coexistence est désormais impossible. Dimanche dernier, un appel a été lancé en vue de la création d'une nouvelle centrale syndicale. «La Terre de Dieu est vaste». C'est en ces termes que Mohamed Noubir Amaoui a répliqué, samedi dernier, à certains membres du Conseil national de la Confédération démocratique du travail ( CDT) qui critiquaient la gestion de son bureau exécutif. En extrapolant cette formule du contexte politique dans lequel elle a été annoncée à l'espace syndical, le secrétaire général de la CDT insinue à ses détracteurs que désormais la centrale syndicale est régie à l'instar des partis politiques. En 1983, Abderrahim Bouabid avait repris cette phrase à l'encontre du groupe de Abderrahman Benameur et Ahmed Benjelloun, qui allaient constituer, plus tard le PADS (Parti d'avant-garde démocratique et socialiste), pour leur dire qu'ils peuvent quitter le navire de l'USFP s'ils le désirent . En 2000, Abderrahman Youssoufi a utilisé les mêmes mots à l'encontre de Mohamed Sassi, ancien dirigeant de la Jeunesse ittihadia, lui indiquant la porte de sortie. Bien entendu, dans les deux cas, la scission était incontournable et Noubir Amaoui ne déroge maintenant guère à cette règle. Au moment où le mot est lâché, tout était pratiquement fait ou presque pour annoncer l'avènement d'une nouvelle ère syndicale. A l'instar de Sisyphe, certains membres fondateurs de la CDT sont condamnés dans les semaines à venir à constituer un nouveau syndicat. Dimanche 15 décembre 2002, à Casablanca, à l'issue d'une réunion du Conseil de coordination national représentant plusieurs syndicats nationaux, dont notamment le Syndicat démocratique des phosphates, les syndicats nationaux de l'Enseignement, de la Santé et de l'Agriculture, les participants ont rendu public un communiqué à travers lequel ils appellent à la création d'une alternative syndicale. La nouvelle structure devra incarner, selon eux, les valeurs du syndicalisme militant tel qu'il a été en vigueur lors des jours de gloire de la CDT. Soit un syndicat démocratique, de masse, indépendant, mais progressiste et unitaire. En d'autres termes, il s'agit d'un retour aux sources et aux origines : le nouveau syndicat compte entretenir de bons rapports avec les partis de la gauche et garantir la gestion démocratique en son sein ; et ce tout en étant ouvert à l'ensemble des travailleurs, aux autres centrales syndicales et aux différentes sensibilités progressistes. Selon des sources fiables, les protagonistes politiques, notamment certains membres dirigeants de l'USFP, de la nouvelle centrale syndicale ont tenu , dernièrement, des rencontres avec des dirigeants de la Gauche socialiste unifiée lesquels leur ont reproché de ne pas les avoir consultés au début du déclenchement de ce mouvement. Les syndicalistes de la GSU avaient tenu un séminaire interne sur la question syndicale, à l'issue de laquelle ils ont décidé, provisoirement, de préserver leur présence là où ils se trouvent ; c'est-à-dire au sein de l'UMT, de la CDT et de la nouvelle centrale syndicale. Entre temps, l'équipe de Noubir Amaoui continue d'«épurer» ses rangs, comme c'est le cas pour El Hoceima où le Bureau local fut dissous, parce qu'un des dirigeants de la gauche avait participé à la réunion des «scissionnistes syndicaux», qui a eu lieu, le 24 novembre dernier à Casablanca.