Certains ont manifesté à Paris et Sangatte. D'autres ont choisi la grève de la faim du côté de Lyon. Dossier « prioritaire » dans les couloirs de Matignon, l'intégration des immigrés de France est plus que d'actualité. Au moins entre 5.000 et 10.000 personnes ont manifesté samedi dans les rues de Paris, pour réclamer la régularisation de tous les étrangers vivant clandestinement en France depuis plusieurs années. Selon la Coordination nationale des sans-papiers, qui avait appelé à cette journée d'action nationale, des marches de moindre importance ont aussi eu lieu dans plusieurs villes de province, notamment à Marseille, Lyon, Nantes, Dijon, Bordeaux et Toulouse. Dans la capitale, plusieurs dizaines d'associations de défense des droits de l'Homme, mais aussi des syndicalistes et membres de partis politiques de gauche, ont marché au rythme de nombreux slogans, tels que « c'est pas les immigrés, c'est pas les sans-papiers, c'est la loi qu'il faut changer» ou encore «des papiers pour tous !». Parmi les manifestants, plusieurs communautés étrangères étaient représentées, dont un grand nombre de Chinois, de Sénégalais, mais aussi de Maliens et d'Algériens. Ce défilé entendait répondre à la récente présentation par le gouvernement Raffarin du «contrat d'intégration» pour les étrangers. Une mesure politique annoncée par le président Chirac lui-même le 14 octobre et qualifiée de «priorité» gouvernementale. Ce contrat, qui s'adresse aux nouveaux arrivants, « rappelle les droits et les devoirs des deux parties », expliquait jeudi dernier le ministre des Affaires sociales François Fillon. Il « garantira des prestations comme l'apprentissage du français ou la connaissance des droits et des obligations civiques» et fournira «un appui social et professionnel individualisé». Quelque «100.000 étrangers sont accueillis chaque année légalement dans notre pays» et «à peine 8.000 font l'objet d'un soutien linguistique, d'un soutien social ou d'un soutien professionnel» a observé M. Fillon. «Je pense qu'il ne faut pas se laisser piéger par cette opération séduction, répondait samedi le président du parti des Verts, Noël Mamère. «Je n'ai pas entendu le gouvernement dire un seul mot sur la régularisation des sans-papiers ou parler du vote des immigrés», a-t-il ajouté. Et le porte-parole de la Coordination nationale, Romain Binazon, de renchérir en déclarant qu'il s'agissait « d'une énième facette du personnage Chirac». «Ras-le-bol des discours. On veut du concret. Que le gouvernement commence par remettre les compteurs à zéro en régularisant tous ceux qui sont déjà ici. Après, on verra». Parmi ces immigrés non-régularisés, six demandeurs d'asile algériens ont pour leur part dû attendre leur 57ème jour de grève de la faim pour obtenir, samedi, un titre de séjour de six mois avec droit au travail. Hébergé avec ses camarades à l'église Saint-André de Lyon, Salim Dif, 28 ans, s'est effondré en larmes lorsqu'il a enfin reçu le document salvateur. Ces six demandeurs d'asile font partie du collectif des Sans-papiers de Lyon qui rassemble pas moins de 209 demandeurs d'asile. Du côté du Pas-de-Calais (Nord-ouest), dans le centre de la Croix rouge de Sangatte, environ 1.700 réfugiés attendent eux aussi de connaître leur sort. Ils sont en très forte majorité Irakiens, Iraniens, Somaliens mais aussi Afghans – dont les premiers retours au pays ont été organisés la semaine dernière. Annoncée il y a quelques mois, la fermeture de ce centre - qui accueille des clandestins principalement à destination du Royaume-Uni – est prévue pour avril 2003. Une mesure qui est loin de satisfaire l'opinion publique française et qui a provoqué plusieurs marches de protestation dans la région, dont une samedi. Reste à la France un autre défi : l'intégration de ses quelque 500.000 clandestins.