La fermeture du centre de réfugiés de Sangatte et la série d'expulsions de Roumains de plusieurs villes ont ressorti le douloureux dossier de l'immigration. Aux dépens de la traditionnelle trêve hivernale. Le 2 décembre dernier, le centre de la Croix-Rouge de Sangatte était officiellement avisé de sa prochaine fermeture le 31 décembre, soit trois mois plus tôt que prévu. Sujet de frictions entre Paris et Londres, l'avenir de cet établissement – créé en septembre 1999 pour accueillir des immigrés souhaitant rejoindre le Royaume-Uni – venait de faire l'objet d'un accord entre les deux gouvernements. Dans le cadre du plan élaboré par les ministres de l'intérieur, le Français Nicolas Sarkozy et le Britannique David Blunkett, la Grande-Bretagne s'était engagée à accueillir 1.000 Kurdes irakiens et 200 Afghans, soit environ 70 % des personnes alors hébergées à Sangatte. Depuis, les réfugiés en question ont rejoint les îles britanniques et ceux restants – badgés par les autorités - doivent être replacés dans d'autres centres d'accueil français avant la fin de l'année. Reste que cette fermeture n'a en rien résolu le problème. Des familles entières, pour la plupart originaires du Moyen-Orient, continuent d'affluer sur les côtes nord de la France pour se rendre en Angleterre. Privés d'accueil, alors que l'hiver et le froid se sont installés en Europe, ils errent désormais dans les rues des villes du littoral en attendant la traversée. Mercredi, une centaine d'entre eux ont encore été évacués dans la nuit par la police de Calais, alors qu'ils dormaient sur les trottoirs des rues. «J'ai décidé, pour des raisons humanitaires et dans le cadre de l'assistance à personne en danger, après en avoir parlé au maire et à des responsables associatifs, de faire intervenir les forces de l'ordre pour les évacuer de la place et les sortir du froid», a alors expliqué le préfet du Pas-de-Calais, Cyrille Schott. Ces personnes ont été dirigées vers des centres d'accueil de demandeurs d'asile et des structures d'hébergement d'urgence dans des départements extérieurs au Pas-de-Calais. En attendant de connaître leur sort. Aux réfugiés de Sangatte, se sont ajoutés ces dernières semaines les immigrés roumains entassés depuis des mois dans les bidonvilles de plusieurs grandes villes de l'hexagone. Lançant une deuxième vague d'expulsions, après celle la semaine dernière dans la banlieue parisienne, les autorités ont délogé mercredi plus d'une centaine de «Roms» de Vaulx-en-Velin, à la périphérie de Lyon. Pas moins de 27 familles, pour la plupart demandeuses d'asile territorial, y étaient installées depuis avril dernier. Quelque 80 autres demandeurs d'asile politique, originaires quant à eux d'ex-Yougoslavie, avaient déjà dû quitter le même bidonville lundi après que, le 28 novembre, le tribunal de grande instance de Lyon ait ordonné leur expulsion. Ces deux opérations avaient été précédées par celle du 3 décembre lorsque 163 Roumains, dont 71 en situation irrégulière, avaient été évacués de trois bidonvilles du Val-de-Marne. Lundi, malgré les critiques du ministre de l'intérieur Sarkozy, la justice a toutefois remis en liberté la majorité de ces réfugiés en attendant leur reconduite à la frontière. Plusieurs associations ont, quant à elles, dénoncé ces opérations menées parfois de façon brutale par d'importants dispositifs sécuritaires. Elles ont aussi estimé qu'elles contrevenaient à la traditionnelle «trêve hivernale» des expulsions. Le ministre de l'intérieur et homme fort du gouvernement français s'était quant à lui engagé le 3 octobre dernier à «traiter l'ensemble de la question» des camps de Roms dans le Val-de-Marne «d'ici la fin novembre». Au risque de ternir l'image d'un pays dont les instances parlementaires sont sur le point d'adopter une nouvelle loi aggravant les peines pour infractions à caractère raciste, antisémite et xénophobe.