Deux anciens détenus marocains du polisario ont témoigné récemment devant "le Groupe de l'ONU sur les disparitions forcées ou involontaires" au sujet des exactions commises dans les camps de Tindouf situés dans le sud-ouest algérien. Le pays de Bouteflika est tenu pour coupable et responsable. Tous les anciens détenus dans les camps de Tindouf le savent. Il n'y a pas de polisario, mais l'Algérisario, selon le mot-valise composé par le capitaine Ali Najab qui a passé un quart de siècle dans les geôles du polisario. Cette vérité difficilement réfutable, n'en déplaise aux officiels algériens, est désormais reconnue par l'un des Groupes les plus fermés et parmi les plus influents de l'ONU. Lundi dernier, deux Marocains, anciens prisonniers à Tindouf, ont été auditionnés à Genève par le Groupe de l'ONU sur les disparitions forcées ou involontaires. Il s'agit d'El Houcine Baida, président de l'Association des parents des Sahraouis victimes de la répression du polisario à Tindouf (PASVERTI, basée à Laâyoune) et Ramdan Mesaoud Larbi, président de l'Association sahraouie pour la défense des droits de l'Homme (ASSADEH, basée à Barcelone en Espagne). Dans les fiches de personnes disparues remises au Groupe de travail onusien, les deux Marocains ont mentionné dans la colonne correspondant à l'organisation responsable de la disparition : «Sécurité militaire du polisario sous la supervision de l'Algérie». «C'est tout à fait normal», explique à ALM El Houcine Baida, président de PASVERTI. «Les disparus sont détenus sur le territoire algérien. Par conséquent, l'Algérie est responsable de ce qui se déroule à l'intérieur de ses frontières», ajoute M. Baida qui connaît bien son sujet. L'intéressé a passé 6 ans et 4 mois dans une cellule à Tindouf. De plus, le polisario n'est pas une entité reconnue comme un Etat par l'ONU. Et les responsables onusiens mènent leurs investigations auprès d'Etats souverains et non pas d'organismes. D'ailleurs, précise M. Baida, si une personne venait à mourir dans les camps de Tindouf, c'est l'Algérie qui délivre son certificat de décès. Et justement, c'est à l'Algérie que se sont d'abord adressés les deux présidents d'ONG qui ont été entendus à Genève. «Nous avons écrit à l'ambassadeur d'Algérie à Genève, à l'ambassadeur d'Algérie à New York, au président Bouteflika et au ministre algérien de la Justice pour faire la lumière sur le dossier des disparus dans les camps de Tindouf, mais ils nous ont tous opposé une fin de non-recevoir », affirme M. Baida. C'est alors que les deux hommes se sont tournés vers le Groupe onusien. La séance, qui a duré 1h 20 mn, était présidée par l'expert canadien Stephen J. Toope. Les deux anciens prisonniers du polisario lui ont fourni une série de documents et de fiches sur les disparus, dont une liste non exhaustive de 56 personnes. «Des documents très précis, avec photos, références des familles, dates», précise le président de PASVERTI. Des documents accablants et sans appel sur les exactions commises par le polisario sur le territoire algérien. Les experts onusiens ont expliqué aux deux Marocains que leur groupe était «officiellement saisi» du dossier de ces disparus. Cette décision implique non seulement la mention de ce dossier dans la prochaine publication du Groupe onusien, à la fin de l'année, mais également sa soumission aux travaux de la session de la Commission des droits de l'Homme à Genève. C'est une première ! Même le polisario, qui a passé 25 ans à jouer la carte de la victime, n'a jamais réussi à saisir le Groupe onusien. Aujourd'hui, il est manifeste qu'il existe bien plus d'exactions et de violations des droits de l'Homme du côté de Tindouf que sur le territoire marocain. Le polisario séquestre, torture, humilie sur le sol d'un pays signataire de la Convention de Genève sur les prisonniers de guerre. Mais qui s'en soucie à Alger ? Les officiels algériens sont maîtres dans l'art de faire des sorties impromptues pour crier sur les toits que le conflit du Sahara ne les concerne pas. La dernière sortie date du 17 août. L'agence algérienne de presse APS cite une «source autorisée» qui enfonce encore plus le clou. Évoquant le Sahara, la «source autorisée» rappelle que «l'Algérie considère qu'il s'agit d'une question de décolonisation à parachever et que toute solution passe inévitablement par l'exercice par le peuple sahraoui de son droit à l'autodétermination, à travers un référendum régulier et libre». Avec des arguments de ce genre, l'Algérie ne détournera pas indéfiniment des exactions commises par ceux qu'elle abrite sur son sol. Durant ses investigations sur les disparus de Tindouf, c'est à Alger que le Groupe onusien demandera des comptes.