La réforme proposée a soulevé des débats passionnés avant même que son contenu ne soit publié, hypothéquant la pérennité de la Commission. Seules les directives de S.M. Le Roi ont permis l'aboutissement des travaux d'une Commission qui, jusqu'à la nomination d'un nouveau Président, était au bord de l'implosion. Les participantes au Congrès International des Femmes Marocaines pour l'égalité, ont appelé, dimanche à Casablanca, à la révision des conventions bilatérales et multilatérales signées entre le Maroc et les pays d'accueil et à l'abolition de toute disposition contraire aux engagements internationaux de ces pays. Organisé par le Centre d'Information et d'Observation des Femmes Marocaines relevant de la Ligue Démocratique pour les Droits de la Femme, ce congrès a été l'occasion pour les participantes d'appeler à l'adaptation de certains textes de loi et leur généralisation aux Marocains résidant à l'étranger. Ainsi, les participantes ont appelé à la généralisation de la loi du domicile en matière de statut personnel pour les Marocains et Marocaines résidant à l'étranger. Aussi, elles ont proposé la création d'un conseil de médiation dans chaque pays composé de représentants des pays d'accueil et du pays d'origine. Ces revendications des femmes marocaines résidant à l'étranger rejoignent ainsi le dossier revendicatif de la femme marocaine sur la réforme de la Moudawana (Code de statut personnel). À ce propos, tout semble indiquer que le nouveau texte de loi serait annoncé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, le vendredi 10 octobre, à l'occasion de l'ouverture de l'année législative que le Souverain préside chaque année le deuxième vendredi d'octobre. Rappelons que SM le Roi, Amir Al Mouminine, avait reçu, le 12 septembre, M'Hamed Boucetta, président de la Commission consultative chargée de la révision de la Moudawana. À cette occasion, Me Boucetta avait présenté au Souverain l'avant-projet du code de la famille, accompagné d'un rapport exhaustif sur le bilan des travaux que la Commission venait d'achever dans les délais que SM le Roi lui avait fixés dans le discours royal adressé à la nation le 20 août dernier. À cette occasion, Sa Majesté Mohammed VI avait réaffirmé qu'il donnera sa haute appréciation sur le projet de code de famille, partant du souci du Souverain de voir la Moudawana consacrer les hautes orientations royales dans la dynamisation nécessaire de l'Ijtihad en vue de réaliser l'égalité, l'équité et la solidarité entre les membres de la famille, en adéquation et en harmonie avec les finalités de l'Islam, religion de tolérance et avec la ferme volonté royale de promouvoir les droits du citoyen marocain et de préserver sa dignité. Soumis à l'appréciation royale, l'avant-projet des réformes de la Moudawana est composé, selon des sources informées, de propositions ayant bénéficié de l'unanimité des membres de la commission consultative, d'une part, et d'une présentation des différentes positions concernant les sujets où il a été difficile de trouver un consensus. S'agissant des propositions ayant fait l'unanimité, on citera à titre d'exemple l'âge minimum pour le mariage qui a été fixé à dix-huit ans pour les deux sexes alors qu'il est de quinze pour les femmes et dix-huit ans pour les hommes dans le texte actuel. Aussi, la commission aurait trouvé un terrain d'entente en ce qui concerne la procédure de divorce qui devrait être soumise à une procédure judiciaire et l'abolition de la répudiation unilatérale en absence de l'épouse. La question du patrimoine conjugal aurait aussi été tranchée. Ainsi, la commission aurait proposé que le juge chargé des affaires familiales ait la prérogative de décider, au cours de la procédure de divorce, sur la répartition de la fortune cumulée par le ménage pendant la période qu'aura duré le mariage. Parmi les points innovateurs, on citera aussi l'âge de la garde des enfants qui serait hissé à quinze au lieu de douze dans l'actuelle Moudawana. Arrivés à l'âge de quinze ans, les enfants auraient le droit de choisir entre l'un des deux parents. S'agissant de la polygamie, l'option de l'abolition n'aurait pas été retenue. Toutefois, le rapport de la commission aurait conditionné le fait d'épouser une deuxième femme, outre l'acceptation par la première, par une autorisation du juge qui devra s'assurer, entre autres, de la capacité financière du mari à subvenir aux besoins des deux foyers matrimoniaux. Par ailleurs, plusieurs dispositions, qui ont fait l'objet de débats houleux entre les membres de la commission au point de bloquer ses travaux pendant plusieurs semaines, ont été soumises à l'arbitrage royal. Parmi ces dernières, on citera le sujet de l'égalité de l'héritage entre les deux sexes ainsi que d'autres dispositions concernant les droits de succession des enfants de sexe féminin, ainsi que du droit à la nationalité marocaine pour les enfants de mère marocaine et de père étranger. Rappelons que l'actuelle Moudawana précise que les héritiers se sexe féminin reçoivent la moitié de la part qui revient à ceux de sexe masculin. S'agissant de la nationalité, la loi actuellement en vigueur stipule que les enfants de mère marocaine et de père étranger n'ont pas le droit juri sanguinis à la nationalité marocaine. Parmi les points de discorde entre les membres de la commission, il y a aussi le sujet de la tutelle sur la femme au moment de la conclusion de l'acte de mariage et dont les femmes revendiquent l'abolition. En somme, il faut reconnaître que le rapport sur les travaux de la commission ne constitue qu'une synthèse des différentes propositions d'amendement de la Moudawana proposées par les membres à Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Et c'est le Souverain qui, en sa qualité d'Amir Al Mouminine, exercera sa prérogative de la Fatwa (jurisprudence en matière de la Chariâ) pour trancher sur tous les points de discorde.