M'hamed Boucetta est l'un des membres fondateurs de la Koutla. Istiqlalien invétéré, il livre dans l'entretien qui suit son appréciation des tractations post-12 septembre et les manquements qui l'ont caractérisé. Pour lui, l'Istiqlal et l'USFP sont condamnés à s'entendre. ALM : Quelle est votre appréciation de ce qui s'est passé après les élections communales du 12 septembre ? Que pensez-vous des malentendus qui ont régné entre l'Istiqlal et l'USFP? M'hamed Boucetta : Je commencerai par relever deux actes manqués qui ont marqué le jeu d'alliances entre les différentes formations politiques appartenant à la Koutla, notamment l'Istiqlal et l'USFP. Le premier se rapporte à l'absence d'alliances pendant les élections. Ce n'est que bien après qu'elles ont eu lieu. Au sein de l'Istiqlal, nous avons toujours réclamé à ce que les partis de la Koutla forment des coalitions. Notre volonté est restée au stade du vœu pieux. Le deuxième grand absent pendant et après ces élections a été la démocratie interne qui devait régner au sein de chaque parti. La discipline partisane n'a pas été au rendez-vous. Les militants ont ignoré les consignes qui leur ont été transmises par leurs directions et n'en ont finalement fait qu'à leur tête. On a bien vu le résultat. Ce qui s'est passé à Rabat et Casablanca laisse penser que l'Istiqlal et l'USFP se situent dans des pôles différents, voire antinomiques. Au vu de ce constat, peut-on toujours parler d'un bloc, à savoir la Koutla, auquel les deux composantes appartiennent ? La mésentente qui a marqué les rapports entre l'Istiqlal et l'USFP nous ont valu les deux plus grandes villes du Royaume, à savoir Rabat, qui devait normalement revenir à l'Union socialiste des forces populaires et Casablanca, ville où c'est l'Istiqlal qui devait assurer la présidence de la commune. Telle est la logique que les choses devaient suivre. La réalité en a voulu autrement. L'erreur est partagée. La seule leçon à tirer de ces derniers événements est que l'alliance stratégique entre les deux partis doit continuer. C'est seulement en agissant main dans main, avec pour seul enjeu l'intérêt du pays, que nous pouvons avancer. Il faut mettre de côté, sinon oublier, les rancœurs et se pencher sur l'avenir du Maroc. En tant qu'homme politique invétéré, comment pensez-vous reconstituer un bloc laminé par de grandes divergences ? Il faut commencer par prendre les mesures qui s'imposent contre les indisciplinés. L'Istiqlal peut se targuer d'avoir été l'un des très rares partis à suspendre les indisciplinés et ce, tout au long de la campagne. Aussi, nous avons été les premiers à tendre la main aux autres formations politiques en vue de former des alliances préélectorales. Sans la Koutla, la rencontre du mouvement national avec feu S.M Hassan II n'aurait pas été envisageable. Encore moins, le gouvernement d'Alternance qui a eu le mérite de donner un nouveau souffle à la chose politique au Maroc. J'ai eu le privilège d'être un acteur de cette évolution. Ma vie durant, j'ai milité pour le rapprochement des deux formations, dont la scission a eu lieu l'année même où je suis né. Je persiste à croire que les antagonismes qui marquent les rapports entre l'USFP et l'Istiqlal ne sont, en somme, qu'une tempête passagère. Le calme reviendra inéluctablement. Les acquis démocratiques du Maroc doivent être consolidés, la coalition, entre les deux plus grands partis que compte le pays, doit être maintenue, préservée. Les deux partis sont condamnés à s'entendre.