Ce mercredi, une mobilisation citoyenne massive pour protester contre Le Pen est prévue à Paris quelques heures avant le traditionnel défilé FN en l'honneur de Jeanne d'Arc. Un face à face redouté et redoutable. La mobilisation citoyenne anti-Le Pen devrait prendre une ampleur extraordinaire ce mercredi, dix jours après les premières manifestations spontanées dans les différentes villes de France. Un « élan » citoyen salué mardi par le candidat Chirac qui a cependant mis en garde contre toute violence le 1er mai. « Je me réjouis de l'élan et du sursaut que l'on constate aujourd'hui en faveur des valeurs de la démocratie et de la République, et en particulier chez les jeunes », a déclaré le président sortant. « Les jeunes marquent une grande détermination et, au total, une grande responsabilité », a-t-il estimé, ajoutant que « rien ne serait pire, dans la situation actuelle, pour les idées que les manifestants veulent défendre, que des débordements qui conduiraient à la violence et qui conduiraient à des affrontements ». Au même moment, l'ancien second du FN, Bruno Mégret, tentait désespérément de faire peser ses 2,3 %, obtenus le 21 avril, dans la balance électorale de dimanche prochain. Faisant fi de son aversion déclarée pour M. Le Pen, il a même souhaité que son ancien mentor dépasse les 40 %, et appelé à voter pour lui. Ignorant cet opportunisme, le leader FN s'est pour sa part contenté de relativiser l'importance de la contestation dont il fait l'objet. « Je pense à la responsabilité écrasante et scandaleuse que prennent ceux qui ont lancé (les jeunes manifestants) somme toute comme des boucliers humains et qui pour leur première manifestation leur mette la haine au cœur et l'insulte à la bouche », a-t-il déploré ce mardi. «Ça n'est pas Le Pen qui a gouverné la France pendant dix ans», a-t-il observé, estimant n'être que le «thermomètre de la maladie politique de la France ». Ce 1er mai n'est d'ailleurs pas la première fête du travail placée sous le signe de la lutte contre le Front national. Lorsqu'en 1988, Jean-Marie Le Pen avait imaginé un défilé en l'honneur de Jeanne d'Arc, il avait réuni 25 à 30.000 personnes. Un succès qui avait poussé les manifestations syndicales d'alors à prendre une forte tournure anti-FN. Une initiative renouvelée le 1er mai 1992 sous une bannière plus large, celle de la lutte contre le racisme, l'exclusion et les inégalités. Trois ans plus tard, la fête du 1er mai tournait au drame et à la honte : en marge d'un défilé FN qui réunissait 15.000 personnes, un jeune homme marocain, Brahim Bouarram, était poussé dans la Seine par trois skinheads du cortège. Un meurtre qui a entraîné deux jours plus tard, entre 12 et 30.000 personnes indignées dans les rues de Paris. Cette année, le candidat d'extrême droite mise sur une mobilisation sans précédent de « 50.000 à 100.000 » sympathisants venus de toute la France. Une manifestation placée sous une étroite escorte policière de 3.500 hommes pour éviter tout débordement. Sans compter la présence des « forces très importantes » du DPS, le Département protection-sécurité du parti, et des sociétés privées recrutées par M. Le Pen - qui a déclaré craindre pour sa vie. Près de 200 cars ont par ailleurs été généreusement affrétés par le parti extrémiste dans tout l'hexagone pour conduire ses partisans dans la capitale. Reste à savoir si les traditionnels casseurs, provocateurs et skinheads seraient eux aussi conviés à la fête.