Réduction du taux de couverture, des candidats présentés sous d'autres couleurs politiques et des consignes de vote données en faveur de l'Istiqlal sont des données à prendre en considération au moment d'analyser le faible score du PJD. Les résultats obtenus par le Parti de la Justice et du Développement dans les élections communales ne permettent pas de déterminer avec précision sa véritable place sur l'échiquier politique au niveau local. La place qu'il occupe sur la carte politique ayant résulté des communales n'exprime pas son implantation réelle au niveau des communes. Se baser sur ce score pour dire que la popularité de cette formation a régressé par rapport aux élections législatives du 27 septembre 2002 est une conclusion qui n'est que relativement exacte. Ainsi, sur un taux de couverture de 3.48 % sur les candidatures au niveau national avec 4268 candidats, le PJD a obtenu 4.48 % des voix (320.299 voix) et l'élection de 593 conseillers communaux. Ce qui représente 2.58 % des élus. À première vue, on serait enclin à dire que les islamistes ont reculé par rapport aux législatives où ils avaient obtenu la quatrième place après l'Union Socialiste des Forces Populaires (USFP), le parti de l'Istiqlal (PI) et le Rassemblement National des Indépendants (RNI). Mais, il faut prendre en considération certaines données qui rendent cette conclusion relativement fausse. D'abord, la stratégie du repli électoral pour laquelle la direction du parti a opté et qu'elle a affiché dès l'annonce de la date des élections lui a permis de créer un climat de confusion ne permettant pas de juger le parti à partir des résultats qu'il obtiendrait. Ainsi, le secrétariat général (instance collective formée par 17 membres et qui dirige le parti) avait décidé de réduire son taux de couverture des candidatures. Par exemple, on a remarqué que le parti ne s'est présenté que dans 50 % des circonscriptions de Casablanca, alors qu'il s'est totalement effacé de la compétition à Tanger. L'interprétation de cette autolimitation ne fait pas l'unanimité quant à ses raisons. Décision souveraine selon les dirigeants du parti, elle serait le résultat de négociations avec le ministère de l'Intérieur pour certains observateurs. Dans tous les cas, il s'agit d'une "ruse" politique qui leur permet de semer la confusion chez l'observateur quant à leur véritable poids en attendant que les temps changent. En effet, les attentats terroristes du 16 mai ont provoqué la croissance d'une réaction légitimement hostile de l'opinion publique à leur égard, ce qui les a poussés à se replier. Mais, ce soit disant repli reste très relatif si l'on prend en considération que leurs militants et sympathisants ne se sont pas abstenus de voter dans les communes où leur parti n'a pas présenté de candidats. Bien au contraire, la mobilisation des partisans de ce parti islamiste dans lesdites circonscriptions a été très importante. Des consignes ont été données aux militants du PJD pour mobiliser leur force électorale en faveur des candidats du parti de l'Istiqlal. C'est ce qui explique d'ailleurs le score record obtenu par ce dernier dans les circonscriptions où le PJD ne s'est pas présenté ou celles où le parti islamiste a réduit sa participation. Outre cette stratégie de soutien de l'Istiqlal, le PJD a aussi présenté des candidats sous-marins sous d'autres couleurs politiques et qui travailleront certainement au long terme pour la préparation des prochaines communales. Dans les deux cas, il y a lieu de signaler que le Mouvement Unicité et Réforme (MUR), qui constitue la véritable force du PJD, a très bien orchestré la mise en application de cette tactique. Car, s'il est difficile pour un parti de diffuser un message pour inciter ses militants à voter pour une autre formation, il est plus aisé pour le MUR qui est géographiquement mieux implanté et idéologiquement plus apte à diffuser un tel message qui prend chez lui une allure de fatwa. La seule exception à cette prépondérance du MUR reste celle de la section du PJD à Oujda. Dans la capitale de l'Oriental, une liste composée uniquement par des candidats émanant du Mouvement Vigilance et Vertu (MVV), la branche moderniste du parti, a pu s'imposer malgré le mot d'ordre que le MUR a diffusé en appelant à son boycott par les militants du parti. Enfin, obtenir 593 élus sur 4268 candidats grâce à des voix exprimées de 320.299 et inciter des milliers de ses militants à voter pour les candidats de l'Istiqlal sont des données qui attestent de la malhonnêteté de cette formation et de son incapacité à agir politiquement dans le cadre des règles de la transparence démocratique.