Mohamed Ali El Fathi Benkirane est un citoyen marocain retraité qui comptait vendre une villa, fruit de très longues années de travail. Il s'est fait arnaquer par le notaire chargé de l'opération de vente. ALM : Vous dites que votre confiance a été trahie par un notaire. De quoi s‘agit-il au juste ? M.Benkirane : J'avais décidé de vendre ma demeure, une petite villa d'environ 250 mètres carrés, et en dessous de laquelle se trouve un restaurant appartenant à un locataire de nationalité libanaise. Une femme marocaine mariée à un Libanais s'est portée acheteuse. Entre temps, j'ai acheté un appartement dans lequel j'envisageais de vivre le restant de mes jours, mais qui nécessitait encore quelques travaux. J'ai donc convenu avec l'acquéreur de quitter la villa après trois mois. Mais en attendant, le Libanais époux de l'acheteuse a eu des différends avec son compatriote propriétaire du restaurant. Quelques jours plus tard, alors que je dormais, un incendie s'est déclaré dans le restaurant. J'étais réveillé par le brouhaha des pompiers et de la police qui se trouvaient sur place. Heureusement que quelques femmes de ménage avaient l'habitude de passer la nuit dans les locaux du restaurant, car l'incendie a été déclenché tout près de l'endroit où se trouvent les bouteilles de gaz. Elles ont alerté les pompiers à temps. Là, j'ai pris peur, et j'ai décidé d'aller louer un appartement en attendant que le mien soit prêt. J'ai décidé donc d'aller chez le notaire qui traite notre affaire, en l'occurrence Me Redouane Bennani, pour lui remettre les clés et recevoir mon argent puisque je n'avais touché qu'une partie du montant conclu de la vente. C'est à partir de ce moment que les choses allaient prendre une autre tournure. Que voulez-vous dire ? M. Bennani ne venait plus à son bureau, il n'y avait que la secrétaire et un notaire stagiaire, Me Brahim. Le notaire étant soi-disant malade, le rendez-vous fut reporté à plusieurs reprises, surtout que la femme du notaire nous disait par téléphone qu'il serait là le jour suivant et ainsi de suite jusqu'au moment où il s'apprêtait à disparaître. Là sa femme nous affirme que la prochaine serait la bonne et sans faute. Me Redoune Bennani serait là. Nous sommes partis effectivement, l'acheteuse et moi, sur ce principe. Mais sans résultat. Deux jours plus tard, je me suis renseigné auprès des services de police pour découvrir que notre notaire a quitté le territoire national vers la France le 12 mars, alors que le rendez-vous fixé par sa femme était le 10 mars. Je vous signale que c'est le mari de l'acheteuse, le Libanais, qui m'a suggéré que l'affaire soit traitée par Me Bennani. Autrement dit, ils se connaissaient. Et chaque fois que je voulais régler l'affaire en lui remettant les clès pour que je reçoive mon argent chez le notaire il inventait des prétextes pour repousser le rendez-vous. Jusqu'à ce que nous nous trouvions face à la problématique de « la maladie » avant la disparition de Me Bennani. Et comme par coïncidence, le Libanais, qui a des affaires en France, est parti également à Paris dans la même période que le notaire. Ce dernier a un frère, notaire lui aussi, Me Mohamed Bennani. Je suis parti le voir et lui demander des nouvelles de son frère. Il m'avait affirmé que ce dernier était malade et qu'il était parti se faire soigner à l'étranger. Il m'a également déclaré qu'il ne savait pas où se trouvait son frère, puisque c'était ce dernier qui le contactait depuis la France. Pendant ce temps-là, la femme du notaire « malade » avait mis en vente l'appartement familial !! Qu'avez-vous fait alors ? J'ai pris la direction de la Justice en déposant une plainte auprès du procureur du Roi qui s'est tout de suite saisi de l'affaire en désignant Me Abdellatif Bouslim en tant que liquidateur substituant Me Redouane Bennani. J'ai accompagné ce dernier au cabinet Bennani où il demandera à la secrétaire et au notaire stagiaire de lui présenter les relevés des comptes bancaires du cabinet. Tous les comptes se sont avérés débiteurs sauf un qui se trouvait créditeur de 200 000 dirhams. Il s'agit, d'après le stagiaire, de deux chèques fournis par le frère Bennani comme frais du dossier d'un autre client du notaire disparu. Sauf que les chèques sont signés par Me Redouane lui-même, et ils dataient du mois d'avril alors qu'il avait quitté le territoire depuis le 12 mars !! Je n'y comprenais plus rien, et j'ai fini par porter plainte pour l'annulation de l'acte de vente. Et après que s'est-il passé ? Tout ce que je peux ajouter c'est que le cabinet de Me Redouane Bennani est toujours ouvert au public, et que sa femme est tours en train de vendre l'appartement familial. Mais le procureur du Roi a lancé un avis de recherche au niveau national concernant le notaire disparu. A aucun moment, je n'ai imaginé qu'un notaire pourrait commettre de tels actes, même avec de très rares antécédents dans ce sens, en l'occurrence l'affaire Hilal.