Une lettre publiée dans la presse médicale anglaise en 1985 avait rapporté que chez un groupe de 37 femmes asiatiques musulmanes jeûnant pendant le Ramadan, sept suivaient scrupuleusement les indications de leur médecin, 25 ne prenaient pas la totalité des médicaments qui leur sont prescrits et 5 prenaient la totalité des médicaments prescrits par jour en une seules prise. Pour analyser la situation, deux aspects sont à prendre en considération pour bien cerner la prescription pendant le Ramadan. Le premier est en rapport avec les aspects religieux. En effet, les médecins, les Ouléma et encore moins les malades ne peuvent s'accorder sur la compatibilité du jeûne des différentes voies d'administration. Le deuxième facteur, quant à lui, est relatif aux aspects médicaux et scientifiques. Dans ce sens, la question qui se pose est de savoir si la prise des médicaments le soir après la rupture de jeûne va générer des effets thérapeutiques et une tolérance, équivalents à la prise du jour. Quelle est la voie d'administration tolérée par la religion ? La réponse n'est pas évidente. En effet, plusieurs études épidémiologiques au Maroc ont abouti à des résultats divergents sur ce sujet. L'une d'entre elles, effectuées chez 89 médecins en 1989 a donné des résultats très représentatifs. En effet, le pourcentage du jugement de la compatibilité qui était différent selon la voie d'administration, était supérieur ou égal à 60 % pour les voies cutanées, les injections intramusculaires, les ovules gynécologiques, les gouttes auriculaires et les collyres. En revanche, il était inférieur ou égal à 40 % pour les injections intraveineuses, les pulvérisations nasales et les inhalations d'aérosol. Ce manque de convergence total révélé par ces chiffres s'explique par l'absence de référence et de consensus à l'époque de l'enquête (1989). Pour combler ce vide, la Fondation Hassan II pour la recherche scientifique et médicale sur le ramadan avait organisé en juin 1998, en collaboration avec les principales institutions islamiques, islamo-culturelles et islamo-médicales du monde musulman, une conférence de consensus sur la compatibilité des voies d'administration avec la rupture de jeûne de Ramadan. Ce consensus était sorti avec la recommandation indiquant que seule la voie d'administration orale est incompatible, alors que toutes les autres voies mentionnées ci-dessous sont compatibles avec la pratique du jeûne. Les voies locales (pommade, spray, bandes.), les voies oculaires et nasales, les voies rectales et vaginales, les voies sous-cutanées et intra-musculaires, les voies d'administration par aérosol, le problème de la voie intraveineuse ne se pose pas car elle est indiquée en cas de pathologies graves qui nécessitent une intervention urgente, c'est-à-dire des cas où la rupture du jeûne est permise et même nécessite. Source : Dossier Ramadan et santé, préparé par le Pr Abdelouahab Tazi