La journée d'étude, organisée le 21 avril par le ministère de l'Emploi, des Affaires sociales et de la Solidarité sous le thème “Quelle réglementation pour le recours au droit de grève“, provoque des réactions de rejet dans les syndicats. A l'origine de cela, un texte qui devrait réglementer les grèves. La réglementation du droit de grève ne passera pas sans cahots. Alors que le ministère de l'Emploi, des Affaires sociales et de la Solidarité entreprend des démarches, en vue de préparer un projet de loi sur le droit de grève, les syndicats pointent déjà du doigt un projet qui “goulotte“ leur droit. Les syndicalistes commencent par rappeler que la grève est un «droit constitutionnel suprême, consacré par les quatre Constitutions du Royaume». «La loi doit renforcer ce droit constitutionnel et non pas de ligoter», explique Miloud Moukhariq de l'Union marocaine du travail (UMT). La mouture du projet de loi du ministère de l'Emploi circule de façon confidentielle. Mais d'emblée, son contenu provoque des réactions de rejet. Abdelkader Zraih, membre du Bureau exécutif de la Confédération démocratique du travail (CDT), explique qu'un «projet de cette taille nécessite un colloque national – un vrai – rassemblant tous les acteurs de la société marocaine et les défenseurs des droits des travailleurs». Et puis, il ajoute qu'il existe d'autres priorités, avant de légiférer sur la réglementation de la grève. L'ordre dans lequel il les cite est significatif des années qu'il faut compter avant de se pencher sur la réglementation des grèves. Selon M. Zraih, il faut d'abord appliquer le code du travail, mener une campagne de formation à ce sujet, établir l'assurance-maladie obligatoire, résoudre le dossier des retraites, annuler l'article 228 du code pénal (relatif à l'incrimination de personnes qui portent atteinte au libre exercice du travail), avant de «réfléchir aux conditions nécessaires pour engager une réflexion sur la réglementation des grèves». M. Moukhariq ne dresse pas pour sa part les douze travaux d'Hercule devant ce projet, mais s'attaque frontalement à son contenu. En substance, ce projet de loi «établit une procédure longue et difficile entre le déclenchement d'un conflit et le moment d'exercer une grève». En clair, des médiateurs interviennent pour mettre le patronat au courant d'une grève. «On devrait prévenir le patron 3 mois à l'avance pour lui laisser le temps de prendre ses dispositions, avant d'exercer notre droit à la grève !». Miloud Moukhariq ajoute qu'un élément fondamental de toute grève, la surprise, est d'emblée supprimé de ce texte. «La grève est un moyen de pression pour obtenir des droits !», s'écrie-t-il, avant de conclure que les nouvelles procédures «visent à rendre le droit de grève sinon impossible, du moins très difficile». A rappeler que le ministre de l'Emploi, des Affaires sociales et de la Solidarité, Mustapha Mansouri, a indiqué, lors de cette journée d'étude, que le nombre des grèves enregistrées dans les différents secteurs d'activité au Maroc a baissé de 439 en 2000 à 149 en 2003. Il a ajouté que les conflits sociaux dégénérant en grèves ont des «effets négatifs sur la production, l'entreprise dans son ensemble et même sur le citoyen », rappelant qu'une situation sociale «saine» est nécessaire pour le progrès économique et la stabilité sociale. Il reste à s'entendre sur les conditions nécessaires à l'établissement de ce climat sain. Pour le moment, rien ne laisse penser que les syndicats laisseront faire un projet qui «goulotte» leur droit.