Des trois constructeurs automobile français, Citroën est celui qui a très tôt été centré sur l'innovation et la technologie. Une orientation avant-gardiste que l'on doit au génie de son père fondateur André Citroën. Fils d'un diamantaire hollandais (Lévie Citroën) et d'une polonaise (Macha Kleinan), ce brillant polytechnicien va avoir la bonne idée d'acheter (en Pologne) un brevet d'engrenages à chevrons. Une forme qu'il adoptera finalement pour le logo de sa marque. Dès le début du 20ème siècle Citroën produit des engrenages destinés aux industries automobile et navale. Une affaire qui marche jusqu'à l'éclatement du premier conflit mondial durant lequel la marque aux chevrons se retrouve à fabriquer des munitions pour participer à l'effort de guerre. Jamais un constructeur français n'avait produit autant de projectiles si rapidement. Et pour cause, Citroën avait repris à son compte les méthodes américaines de production de masse. En fait, lors d'un voyage aux Etats-Unis, effectué en 1912, André avait rencontré Henry Ford et visité ses usines en observant avec attention l'organisation des ateliers. Citroën est donc le premier européen à avoir introduit le montage à la chaîne et c'est ce qui va propulser sa firme en tant que constructeur automobile de premier ordre. Car, la guerre finie, son usine du Quai de Javel sera reconvertie à l'automobile. Au départ, Citroën assemble un modèle unique (le premier de son histoire) à savoir, la Type A. Celle-ci sera produite à 2.500 exemplaires en 1919, puis à une cadence à annuelle de 20.000 en 1920, soit le double de ce que produit son rival –pourtant bien plus ancien–, Renault. Les ventes de Citroën sont si croissantes qu'elle hisse la marque au second rang mondial. Mais André, toujours «attiré par tout ce que les autres ne font pas» se lance dans des choix techniques avant-gardistes, mais très onéreux. En 1934, les conséquences de la crise économique de 1929 sont toujours là et grèvent les finances de Citroën qui, en plein marasme, lance un nouveau défi: la Traction. Ses modèles ont certes une longueur d'avance, mais sa trésorerie est à plat et les banques ne suivent plus. C'est là qu'interviennent les frères Michelin qui prennent une participation dans Citroën puis en assurent carrément la gestion. André, qui a déjà réalisé la plupart de ses rêves de grand industriel, se résigne à sa nouvelle situation, d'autant plus qu'il est atteint d'un cancer. Le 3 juillet 1935, André décède. Mais il aurait été fier de voir comment Michelin a su préserver l'esprit avant-gardiste de sa société. Et surtout, il n'aura pas vécu le succès commercial de la Traction Avant, qui fait recouvre l'équilibre financier aux usines Citroën. En 1936, un projet de petite voiture populaire, en l'occurrence la 2 CV, est lancé. Son cahier des charges disait en substance : «quatre roues sous un parapluie, véhicule économique et sûr, capable de transporter quatre personnes et 50 kg de bagages dans un maximum de confort». Une décennie plus tard, la 2 CV sera finalisée et présentée en 1948, lors du Salon de Paris. Cette même exhibition sera aussi le lieu d'une autre grande révélation en 1955, celle de la DS. Fluide par ses lignes et très innovante dans sa structure (suspension hydropneumatiques, phares directionnels, boîte de vitesse avec embrayage automatique, direction assistée, capot en aluminium…), cette Citroën d'anthologie souligne définitivement l'audace technique de Citroën. Malgré quelques défauts de jeunesse, la DS, qui sera déclinée en plusieurs carrosseries et restylée au fil des générations, permettra à Citroën d'atteindre des sommets. Les années 60 sont celles où Michelin se désengage de la marque aux chevrons afin de se recentrer sur son activité de base. Citroën fusionne avec Panhard, puis redevient (en 1968) Citroën SA qui regroupe aussi les marques Panhard et Berliet. Citroën tentera alors de conserver toute son identité et perpétuer la philosophie de son fondateur. La suite, tout le monde la connaît : en 1976 Peugeot prend une importante participation dans le capital de la marque qui deviendra, dès 1998, une marque à part entière du groupe PSA Peugeot Citroën.