Ils se comptent probablement par milliers ou dizaine de milliers. Ils font le plus gros du travail au cours d'une campagne électorale mais sont souvent payés à la journée. Ces journaliers sont les assistants électoraux. Leur cas intéresse aujourd'hui le CNDH (Conseil national des droits de l'Homme). Le Conseil qui vient de livrer son rapport préliminaire sur le scrutin du 4 septembre propose une forme de travail contractuel pour ce genre de métiers électoraux. L'institution dirigée par le tandem Driss Yazami et Mohamed Sebbar préconise pour les futures échéances électorales la conclusion de CDD (contrat à durée déterminée). Les responsables du CNDH veulent ainsi «soumettre, par la loi, les assistants électoraux au régime des contrats à durée déterminée». Plus qu'une simple recommandation isolée, le Conseil semble ériger le contrôle et la transparence des financements des campagnes électorales comme l'une des priorités dans le futur. Les responsables parlent même d'une économie en bonne et due forme durant les élections et ne comptent pas s'arrêter aux simples CDD. Le tandem Yazami- Sebbar appelle à «poursuivre le processus de régulation de l'économie électorale». Compte bancaire Le Conseil veut obliger par la loi le mandataire de liste, dans les communes soumises au scrutin de liste et dans les autres collectivités territoriales, à «ouvrir un compte bancaire unique pour les dépenses afférentes à la campagne électorale et de désigner un mandataire financier chargé de la gestion financière de la campagne électorale». Une mesure qui devrait faciliter par la suite le contrôle par les autorités compétentes des dépenses au cours de la campagne électorale. Il faut dire cependant que le contrôle de l'Etat a déjà été renforcé, notamment par le biais de la Cour des comptes. En plus des finances, le CNDH s'est également intéressé à la communication électorale. Sur ce plan, le Conseil «note le recours massif aux nouvelles technologies de l'information et de la communication, y compris les réseaux sociaux. Ce recours marque un tournant décisif dans la communication électorale au Maroc». Si le Web et les réseaux sociaux occupent désormais une place prépondérante dans les campagnes menées par les partis politiques ainsi que leurs candidats, le Conseil veut mettre de l'ordre dans le recours à ces nouveaux canaux de communication. Les responsables estiment que «ces nouvelles formes de communication électorale méritent une réflexion éthique et juridique sur leur utilisation». Il est, par ailleurs, question de mieux protéger les données personnelles dans le cadre des opérations électorales. Le CNDH a appelé ainsi à «la mise en œuvre des orientations contenues dans la délibération N° 108-2015 du 14/07/2015 de la Commission nationale de la protection des données à caractère personnel relative au traitement de données à caractère personnel mis en œuvre par les partis politiques, leurs unions ou leurs alliances, les organisations professionnelles et syndicales, les élus ou candidats à des fonctions électives à des fins de communication politique». MRE, la procuration ne séduit pas Il semble que le vote par procuration en faveur des MRE ne séduit pas. Selon le rapport préliminaire du CNDH (Conseil national des droits de l'Homme) sur l'observation des élections, le recours à cette possibilité reste encore très faible. «Les statistiques préliminaires d'utilisation de la procuration pour le vote des Marocains résidant à l'étranger confirment la tendance observée lors des dernières élections législatives. L'utilisation de ce moyen de vote n'a été constatée que 17 fois, lors de l'analyse préliminaire de 1.405 questionnaires relatifs au scrutin», affirment les responsables du CNDH. Ce dernier recommande à l'Exécutif de mettre en place des alternatives en faveur des Marocains établis à l'étranger pour profiter de leur droit au vote garanti par la Constitution du pays. Plus concrètement, le Conseil préconise de prévoir la possibilité du vote électronique ainsi que le vote par correspondance pour cette catégorie de la population marocaine. Des mômes exploités ? L'utilisation des enfants dans les campagnes électorales est l'un des faits marquants de ces élections, selon le CNDH. Ce dernier affirme que l'utilisation des enfants a été constatée fréquemment par les observateurs. «Il ressort également de l'analyse des réponses relatives aux modes d'utilisation de ces enfants, qu'ils occupent une place particulière dans la «division du travail» de la campagne électorale. Les enfants distribuent les tracts, aident à l'affichage, participent aux comités d'organisation et au déroulement des meetings et des défilés électoraux», explique la même source. Les observateurs ont également constaté que les enfants sont fortement impliqués dans l'arrachage des affiches alors que certains parmi eux sont impliqués dans les cas de violence verbale. «Le CNDH rappelle à cet égard ses recommandations antérieures demandant l'interdiction de toutes formes d'utilisation des enfants dans les campagnes électorales et l'institution de cet acte comme infraction autonome», conclut le Conseil. Accessibilité Le CNDH considère que l'accès des personnes en situation de handicap est devenu un problème structurel soulevé par les rapports d'observation successifs du CCDH et du CNDH. L'analyse préliminaire des questionnaires du scrutin a permis de constater que 53% des bureaux observés ne sont pas équipés d'une rampe d'accès pour les personnes en situation de handicap. De nombreux bureaux observés se situent au premier étage. «Tout en réitérant ses recommandations antérieures, le CNDH estime que cette problématique doit être considérée dès à présent en vue de sa solution par les pouvoirs publics en vue des échéances électorales futures», affirment les responsables. Il est, en outre, question d'assurer par les médias audiovisuels publics la traduction de toutes les prestations audiovisuelles électorales dans le langage des signes et prévoir un dispositif de lecture des bulletins pour les personnes mal ou non voyantes. Appropriation citoyenne Au cours de ses opérations d'observation, le CNDH a relevé «trois types particuliers d'initiatives qui annoncent les prémices d'une appropriation citoyenne des enjeux électoraux sous l'angle de l'approche basée sur les droits de l'Homme». Il s'agit premièrement des initiatives de plusieurs associations œuvrant dans le domaine du développement démocratique en vue de promouvoir la participation citoyenne au scrutin et la contractualisation des engagements programmatiques pris par les candidats lors de la campagne électorale. Ensuite, il y a des initiatives prises par les associations œuvrant dans le domaine de la protection et de la promotion des droits des personnes en milieu carcéral, en vue d'une meilleure prise en compte des droits de ces personnes dans les programmes des candidats et dans l'agenda futur des politiques publiques territoriales. Enfin, un fort plaidoyer a été constaté de la part des associations œuvrant dans le domaine des droits des personnes en situation de handicap en vue de prendre en compte la question de l'accessibilité universelle dans l'exercice des droits électoraux des personnes en situation de handicap. La violence verbale inquiète
Si la violence physique a nettement reculé dans les campagnes électorales, une autre forme de violence inquiète les responsables du CNDH. Il s'agit notamment de la violence verbale qui prend de l'ampleur selon le rapport préliminaire du Conseil. La situation est d'autant plus préoccupante pour les responsables que des dirigeants de partis politiques seraient également impliqués dans ce genre de situation. «Pour les élections communales, sur les 194 cas de violence rapportés par les observateurs, 30% uniquement relèvent de la violence physique. Le taux est de 29,5% pour les élections régionales», note le CNDH. «Les statistiques précitées montrent néanmoins une prévalence inquiétante de la violence verbale sous ses différentes formes (propos diffamatoires et calomnieux, propos discriminatoires en raison du sexe, de la couleur, ou en raison de l'origine sociale et régionale ou des croyances)», ajoute la même source. Le Conseil se dit inquiet de l'implication de quelques leaders de partis dans cette escalade préoccupante de violence verbale, notamment lors de meetings.