Une réglementation obsolète et laxiste, un flou juridique préjudiciable, des filières de contrebande qui se permettent toutes les audaces, des détaillants qui vendent toutes sortes d'explosifs au vu et au su de tout le monde et au mépris de la santé et de la tranquillité des citoyens. Il est urgent de prendre ce problème au sérieux. L'après-midi du jeudi 7 mars, à la veille de la journée mondiale de la femme, une jeune élève a failli se faire exploser la carotide. Elle voulait juste se soulager. Une fois à l'intérieur des toilettes, un pétard tombé de nulle part atterrit derrière son cou se glissant dans ses vêtements avant d'exploser. Blessée autour de la nuque, la jeune fille était au bord de l'apoplexie sous l'effet de la peur. Cela s'est passé au lycée Jaber bnou Hayane à Casablanca. Un établissement de renommée historique, et qui figure parmi les plus grands lycées du royaume, avec près de 1700 élèves et environ onze branches scientifiques et techniques. Samedi 9 mars, dans le même établissement d'éducation, un répétiteur marchait dans la cour recevra un petit bâton de dynamite connu sous le nom de « grenada ». M.Abderrahim Miftah se verra presque perforer le tibia. La fonction pédagogique n'ayant pas de prime de risque, l'incident ne peut être considéré comme un accident de travail. Même à l'intérieur de la classe, il eut des jets de pétards dès que le prof tourne le dos aux élèves. Du coup, l'ensemble des enseignants est pris de panique. Ils n'osent plus s'aventurer à l'intérieur du lycée. Un professeur se dit indigné par cet esprit d'irresponsabilité chez les gens qui permettent le commerce de ces gadgets dangereux «Quand on voit que les services des douanes bloquent un lot de chaises roulantes, don en faveur des personnes handicapées… on se demande comment ces pétards en grande quantité trouvent leur chemin jusqu'à Derb Omar, le plus grand chantier commercial de Casablanca, pour être vendus en toute quiétude, même à des mineurs», déclare-t-il. Des incidents liés à l'utilisation des explosifs, il y en a chaque année, un peu partout au Maroc. La malle d'une voiture se dirigeant vers la ville de Settat a tout à coup explosé sur la route. Le conducteur a failli crever de peur. Il n'a pas prévu cette surprise quand il bourrait son coffre de pétards destinés à la vente. A Hay Mohammadi, un petit garçon a perdu son œil gauche en malmenant une «fusée». Il faut dire que la disponibilité de la matière, en grande quantité, à des prix abordables par rapport au pouvoir d'achat, encourage l'expansion du phénomène. Derb Omar, constitue le principal fournisseur, en gros comme en détail. La grande caisse (appelée surtout kakha) des pétards rouges contient 20 paquets de vingt pétards chacun. Elle coûte entre 75 et 95 dirhams. Autrement dit, c'est le prix de 2000 petites déflagrations. Devant la porte n°4 du port, au croisement du boulevard Moulay Slimane et des FAR, les prix sont nettement plus bas qu'à Derb Omar. Mais le plus prisé d'entre tous est ce petit bâton de dynamite qui est «grenada». Un paquet contenant dix grenades ne coûte que 9 dirhams ! Même pas un dirham la pièce. Or sa détonation est aussi puissante que celle d'une grenade réelle. Les vendeurs de ces explosifs disposent-ils d'une autorisation pour la commercialisation de ce genre de produits ? Des quartiers entiers ont perdu la notion du calme durant la nuit. Des parents d'élèves vivent au quotidien dans l'angoisse, inquiets du risque que courent leurs enfants. On est loin des inquiétudes passagères qui accompagnaient jadis la célébration du 10 Moharram ou Achoura. Les passants et surtout les passantes craignaient d'être arrosés d'eau, ou au pire des cas par des œufs… De là à marcher dans un terrain miné est une autre paire de manches.