C'est un roman sur fond de nazisme et de ses spectres. Bien après la chute d'Adolph Hitler, Monika Held revient sur un des épisodes les plus forts de l'ère post-nazie, pour donner corps à son récit. Nous sommes donc presque vingt ans plus tard à Francfort, en 1964. C'est à ce moment précis, comme un tournant de son histoire, que Lena fait la rencontre de Heiner. Lena remplit le rôle d'interprète lors des grands procès des criminels nazis. Heiner, lui, fait partie des survivants d'Auschwitz qui sont aujourd'hui appelés à témoigner sur l'horreur du troisième Reich. Quand il est victime d'un malaise entre deux audiences, c'est Lena qui vient à son secours. Très vite, elle deviendra sa femme. C'est le grand amour de leur vie, sauf que le passé joue les trouble-fête. Il s'immisce dans leurs rapports, surgit quand tout va bien, vient assombrir la lumière de cet amour. Heiner est hanté par des cauchemars que Lena tente par tous les moyens de balayer et d'effacer de la mémoire de son homme, mais en vain. Le passé est lourd. Les souffrances sont toujours des plaies béantes. Des années passent, entre bonheur et douleur, jusqu'au jour où dans les années 1980, ils décident de faire un voyage en Pologne. Il faut donc aller à la source du mal pour l'exorciser. Ce retour «sur place», cette volonté d'entrer en résonance avec le passé doit leur servir désormais d'assise pour accepter leur bonheur présent et tourner la page du passé en aspirant un avenir meilleur, sans appréhension ni douleurs. Monika Held pose ici le problème de la survie en opposition à la vie. Est-il possible de jouir du bonheur quand on a frôlé la mort, enduré les pires sévices ? Comment passer du stade du survivant à celui du vivant, sans se trahir et trahir sa souffrance? Ce sont là quelques thèmes abordés par le récit de Monika Held puisé à même la vie d'un couple d'amis qui a vécu cette horreur et cette lutte contre le poids du passé. Mais c'est aussi un roman d'amour, gorgé de bons sentiments, sans rancœurs ni ressentiments. Une histoire de survie par la passion.