Le gouvernement espagnol a décidé de suspendre l'application des accords de Schengen du 15 au 23 mai, date de la célébration du mariage du Prince héritier Félipe. Durant cette semaine, les Marocains sont persona non grata en Espagne pour raisons de sécurité. Mustapha El Mrabet, président de l'Association des travailleurs marocains en Espagne (ATIM), exhorte la communauté marocaine à ne pas répondre aux provocations des extrémistes espagnols qui ont haussé le ton et multiplié les gesticulations xénophobes. Le gouvernement espagnol a décidé, lundi, de suspendre l'application des accords de Schengen du 15 au 23 mai, date de la célébration du mariage du Prince héritier, Felipe de Bourbon avec Letizia Ortiz pour des raisons de sécurité. Durant les huit jours que dureront les festivités officielles, les Marocains seront interdits d'entrer ou de transiter par le territoire espagnol. Cette décision, la première dans l'Histoire des relations entre les deux pays, remet en scène l'une des préoccupations majeures de la société civile et politique marocaines quant aux répercussions des attentats de Madrid sur l'image du Maroc et sur la situation de ses ressortissants résidant en Europe. L'implication de citoyens marocains dans la planification et l'exécution des attentats sanglants du 11 mars qui ont quelque 200 morts et plus de 1500 blessés risque de provoquer une montée sensible de la xénophobie et de l'animosité à l'égard de la communauté marocaine résidant en Europe et plus spécialement en Espagne. Au lendemain de l'arrestation des trois premiers accusés d'origine marocaine, le gouvernement marocain avait exprimé par la voix de son porte-parole, la préoccupation des autorités marocaines quant à d'éventuelles représailles contre la communauté marocaine établie en Espagne après l'annonce de l'implication de ces ressortissants marocains. Dans une déclaration à la chaîne Radio France Internationale (RFI), le porte-parole du gouvernement avait souligné que "cette question doit être traitée dans son cadre à savoir celui de la lutte internationale contre le terrorisme et non dans une approche qui aurait des répercussions négatives sur nos compatriotes en Espagne". D'ailleurs, le même jour des révélations de l'implication des Marocains, un citoyen marocain était assassiné à l'arme blanche par des inconnus à Barcelone. Crime xénophobe ou coïncidence ? La réponse est toujours inconnue, mais il faut reconnaître que le timing est très significatif. D'ailleurs, la société civile espagnole a immédiatement réagi afin d'appeler à éviter une dérive raciste. L'ONG espagnole "SOS Racisme" avait alors appelé à éviter "la généralisation et la criminalisation de tous les Musulmans et Arabes vivant en Espagne après l'annonce de l'arrestation, dans le cadre de l'enquête sur les attentats de jeudi dernier à Madrid, de trois ressortissants marocains et deux Indiens". Dans un communiqué, cette association humanitaire de défense des droits dces immigrés avait mis en garde contre le "grave risque que se produisent des réactions racistes et xénophobes", après l'annonce de ces arrestations. Elle avait rappelé que les immigrés provenant de pays arabes "sont une partie constitutive de la société espagnole". Plus de trois cent mille Marocains résident en Espagne. Ils forment la communauté étrangère la plus nombreuse du voisin ibérique et sont considérés comme une communauté travailleuse et très disciplinée. Mais, les scènes de douleur provoquées par "les trains de la mort" provoquent déjà une réaction de colère contre les membres de la communauté marocaine dans certains milieux espagnols. Un sentiment partagé aussi par la Fédération des associations pour la protection des droits des émigrés "Andalucia Acoge" qui a lancé un appel au calme et demandé aux Espagnols de ne pas faire l'amalgame entre les terroristes et les émigrés d'origine maghrébine installés dans ce pays. Un communiqué de cette association a tenu à rappeler que "les émigrés ont été aussi victimes de ces attentats comme l'a été un grand nombre de Marocains dans l'explosion de la Casa de Espana lors des attentats de Casablanca". Ils ont aussi été unanimes à condamner ces actes terroristes aussi bien devant les médias que lors de différentes manifestations organisées après les attentats du 11 mars, ajoute le communiqué. Mustapha El Mrabet, président de l'Association des travailleurs marocains en Espagne (ATIM) qui a énergiquement condamné les attentats du 11 mars, a exhorté la communauté marocaine à ne pas répondre aux provocations des extrémistes espagnols qui ont haussé le ton et multiplié les gesticulations xénophobes. L'appel est très important vu l'ampleur que peut prendre une éventuelle confrontation. Il suffit à cet égard de rappeler les évènements terribles que le village andalou d'El Ejido avait connu, il y a quatre ans, lorsqu'une confrontation avait éclaté entre les Espagnols résidant dans ce village de la province d'Almeria et les travailleurs marocains en agriculture suite à l'assassinat d'un citoyen espagnol des mains d'un Marocain. Aujourd'hui, la communauté marocaine a peur de voir les ressortissants marocains résidant au quartier madrilène de Lavapiès devenir la cible d'attaques racistes. D'ailleurs, l'image de tous les Maghrébins résidant en ce quartier a été largement ternie par le fait que les six Marocains inculpés dans le cadre de l'enquête sur les attentats y résidaient. Enfin, les efforts de la société civile et politique des deux rives du détroit de Gibraltar sont sollicités pour faire face à une éventuelle escalade de la xénophobie et de la prolifération d'attitudes anti-marocaines. Heureusement, disent certains observateurs, que le futur gouvernement sera formé par le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) connu pour son engagement en faveur de l'intégration de la communauté marocaine immigrée dans la société espagnole.