Le ministère de l'intérieur décrète la mobilisation générale. Sur Hautes instructions royales et face à la montée du sentiment d'insécurité dans les villes du pays, le ministre de l'intérieur, Mohamed Hassad, et son ministre délégué et ancien directeur général de la Sûreté nationale, Charki Draiss, mobilisent leurs troupes. Les deux responsables vont sillonner toutes les régions du Royaume pour la mise en place d'une nouvelle stratégie sécuritaire. Deux premières réunions ont déjà eu lieu notamment à Casablanca. Hassad n'y est pas allé par quatre chemins. «Toutes les mesures de sécurité seront prises afin de renforcer la confiance en les services de sécurité et consolider davantage le sentiment de sécurité chez les citoyens», a-t-il affirmé. Le ministre de l'intérieur a dévoilé les premières mesures qui seront prises pour redonner confiance dans les services de sécurité. Le renforcement de cette confiance, a déclaré le ministre, passe nécessairement par une approche de «proximité avec les citoyens au niveau des quartiers et des villages». Hassad a annoncé, dans ce sens, un déploiement immédiat d'actions d'intervention dans tous les points noirs en termes de sécurité, en promettant des résultats concrets sur le terrain pour très bientôt. Pour ce faire, le département de l'intérieur veut mettre le paquet sur le plan des moyens, notamment humains. Le département de tutelle annonce «une augmentation sensible des effectifs des membres des services de sécurité» chaque année toujours dans un but affiché de consolidation du sentiment de sécurité chez les citoyens, tant au niveau des grandes villes qu'au niveau des villages.
La touche Hassad Mais la nouvelle stratégie ne se limitera pas uniquement à étoffer les effectifs mais elle sera basée sur une nouvelle méthodologie avec une touche Hassad qui a appelé les services de sécurité à prendre les mesures préventives dans le but de freiner la formation des bandes criminelles. Fréquemment utilisées par les services de sécurité dans la lutte contre des réseaux djihadistes, les actions préventives seront ainsi utilisées pour lutter contre les réseaux mafieux et criminels. Une autre nouveauté qui porte la signature du ministre de l'intérieur concerne la création de comités locaux. Autrement, les mesures de sécurité seront adaptées aux besoins de chaque région. Ainsi, les comités locaux vont définir les mesures concrètes nécessaires pour garantir davantage de sécurité. Plus concrètement, chaque comité local se chargera d'examiner «avec précision la situation exacte de la sécurité et prendre les mesures immédiates, en concertation avec toutes les parties concernées». Les réunions qui ont déjà eu lieu et celles qui sont programmées par le ministère de l'intérieur interviennent suite à la recrudescence des actes de vandalisme dans les terrains de sport et leurs alentours et suite à la publication sur des réseaux sociaux d'informations et d'images d'individus exhibant des armes blanches et exposant des sommes d'argent tout en se vantant de les avoir obtenues en se livrant à des actes illicites. Ces publications qui ont fait le buzz sur les réseaux sociaux ont contribué au renforcement d'un sentiment d'insécurité chez les citoyens. Stratégie globale
Le ministère de l'intérieur à travers les dernières réunions semble déjà entamer la mise en place d'une stratégie nationale globale pour lutter contre la criminalité sous toutes ses formes et préserver le sentiment de sécurité et de quiétude. Une stratégie élaborée par le ministère de tutelle avec la participation des plus importants services de sécurité du pays. Ces mêmes services prennent part également aux réunions tenues par l'intérieur. Un communiqué du ministère a annoncé que la réunion de Casablanca a connu la participation de responsables sécuritaires de premier plan. Il s'agit notamment de Abdelkader Laaoula, Général de division commandant en second de la Gendarmerie royale, Haddou Hajjar, Général de brigade inspecteur général des Forces auxiliaires et de la zone nord et Bouchaib Rmail, directeur général de la Sûreté nationale. Les réunions se déroulent également en présence du wali de la Région, des gouverneurs des préfectures, des préfectures d'arrondissements et des provinces, ainsi que des responsables locaux des services de sécurité. Après les deux premières réunions dans la région du Grand Casablanca et la région de Chaouia-Ouardigha, d'autres réunions suivront dans d'autres régions du pays. Les GUS La dernière grande stratégie sécuritaire remonte à pratiquement plus de dix ans. Au lendemain des attentats terroristes de Casablanca en 2003, l'ancien directeur général de la Sûreté nationale, le général Hamidou Laânigri, aujourd'hui à la retraite, avait établi une nouvelle stratégie sécuritaire. A l'époque, les responsables avaient misé sur la proximité avec la mise en place d'une police de proximité. Baptisées GUS (Groupes urbains de sécurité) mais plus connues sous la dénomination de «croatia», des patrouilles de quatre à six éléments de police effectuaient des rondes dans les différents quartiers des villes marocaines. Plusieurs postes de police dont la majorité sont abandonnés aujourd'hui, avaient été construits. Fait révolutionnaire à l'époque, la police avait financé une campagne de communication avec des spots télévisés. Mais ces fameux GUS n'ont jamais su convaincre et certains dérapages ont fini par pousser Charki Draiss, succédant alors à Laânigri à la tête de la DGSN, de mettre fin à l'expérience. Les GUS ont été remplacés par la brigade des motards ou «Sokour» (faucons). La goutte qui a fait déborder le vase La phénomène du «Tcharmil» semble être la goutte qui a fait déborder le vase. Ces dernières semaines, des pages sur les réseaux sociaux, principalement Facebook, sont apparues. Des photos y étaient publiées faisant carrément l'éloge d'actes criminels. Les images montraient en effet des individus exhibant des armes blanches et les butins de leurs actes. Après leur interpellation, quelques-uns de ces individus avaient déclaré devant la presse que leurs photos étaient destinées à impressionner pour des raisons pour le moins débiles. Ils ont ajouté que leurs photos ont été retravaillées par des inconnus à l'aide de logiciels informatiques pour les rendre plus inquiétantes. Mais en dépit de l'interpellation d'une trentaine de personnes, le sentiment de l'insécurité persistait chez de nombreux citoyens. Il faut dire que des actes criminels plus violents et plus organisés se sont multipliés ces derniers mois avec l'utilisation d'armes à feu dans certains cas. Tous ces éléments ont poussé les services de sécurité sous la tutelle du ministère de l'intérieur à élaborer une nouvelle stratégie sécuritaire.