Des prières rogatoires ont été organisées ce week-end dans notre pays, symbole très fort puisque Musulmans et Juifs ont prié dans les mosquées et les synagogues avec les mêmes objectifs. A ce moment le Maroc envoyait un signal très particulier, dans le même temps la France se retrouvait aux prises avec une de ces crises qui, régulièrement, vient la secouer. Le Web aidant l'affaire Dieudonné a très vite franchi les frontières pour s'inviter aussi sur la Toile marocaine…Tous les amalgames, toutes les haines, heureusement minoritaires, s'en sont donné à cœur joie, faisant du vivre ensemble un champ de ruines ! Il ne faisait pas bon de chercher à poser les bonnes questions durant ces heures de délire, chacun était sommé de se positionner, de trancher, et selon les groupes d'être de tel ou tel avis, sans nuance. Pourquoi n'est-il pas possible de dire qu'être contre l'islamophobie n'implique pas de soutenir Dieudonné ! Que le racisme est UN, qu'on l'appelle islamophobie, antisémitisme, xénophobie… et que si l'on combat le racisme, on en combat toutes les formes ! L'antiracisme n'est pas à géométrie variable selon l'identité ou la religion de la victime ! Il faut aussi dire que la façon dont Dieudonné a été combattu en France n'aide pas à raisonner sereinement – outre le débat de savoir si l'interdiction est une solution – force est de reconnaître que le sentiment du «2 poids, 2 mesures» a été cruellement ressenti : comment peut-on en effet dès lors soutenir que lorsque Charlie Hebdo caricature le Prophète Sidna Mohammed cela fait partie de la liberté d'expression ou bien ne pas condamner lorsque une église est profanée par les Femens ? Cela a en fait pour conséquence de dresser les différentes communautés entre elles, la condamnation doit être la même dans tous les cas ! Pour autant est-il possible de croire que soutenir Dieudonné serait combattre le sionisme, alors qu'il affirme que «les chambres à gaz n'ont pas fini leur travail», qu'il se demande qui des nazis ou des Juifs «a commencé», ou encore «c'est quoi le projet nazi en 2013 ? Fabriquer des savonnettes avec le gratin du show bizz français»…Ne nous y trompons pas d'ailleurs : l'expression créée il y a quelques années à partir d'un slogan pour les jeux de hasard qui dit : «Pour un raciste, un Juif au tirage, c'est un Musulman au grattage» est ô combien révélatrice ! Le comble est que ceux d'entre nous qui expliquaient que nous ne pouvions pas soutenir Dieudonné, se sont vus qualifiés de «suppôts du sionisme» et de «aux ordres de leurs maîtres», chacun comprend la signification vicieuse de ces mots… Hélas de tels propos signifient que Dieudonné –dont le parrain de son enfant n'est autre que Le Pen – a déjà gagné une partie de son pari en faisant croire qu'insulter les Juifs voudrait dire être aux côtés des Musulmans ! Dénoncer Dieudonné n'est pas trahir une cause ou être l'outil d'un lobby ! Brahim Bouarram, les moines de Tibhirine, Ilan Halimi victimes de la haine de l'Autre n'ont-ils pas la même valeur dans nos mémoires? Luttons pour que les larmes des mères – musulmanes, juives, chrétiennes - de toutes les victimes du racisme ne soient plus qu'une légende...