Le week-end passé a connu un nouveau développement crucial dans l'affaire du détenu espagnol, Daniel Galvan Fina, qui a pu récemment bénéficier d'une grâce royale. Alors que le sujet secouait en fin de semaine le microcosme, suscitait le débat sur la toile et les réseaux sociaux, samedi dans la soirée, un événement de taille se produit : le Cabinet royal sort de son silence en diffusant un communiqué qui ne laisse plus de place ni aux doutes, ni, surtout, aux interprétations et aux tentatives de certaines parties, au Maroc ou ailleurs, d'instrumentaliser l'affaire. Le communiqué du cabinet royal (voir son intégralité), diffusé samedi dans la soirée, est d'une lucidité, d'une clarté et d'une sincérité qui tranchent, en effet, avec le flou qui régnait jusque-là. Et on ne peut pas dire que le ministère de la Justice a fait un effort pour clarifier, et encore moins pour apaiser. En atteste d'ailleurs le communiqué publié par le département de Mustapha Ramid vendredi en milieu d'après-midi. Sauf qu'au lieu d'apaiser, d'expliquer, de clarifier, le communiqué du département de M. Ramid a produit l'effet contraire. Et pour cause, le ministre de la justice y affirmait d'entrée de jeu et en substance que la grâce royale est une prérogative constitutionnelle et que « la grâce dont ont bénéficié des détenus espagnols s'inscrit dans le cadre des relations amicales et stratégiques entre les deux pays amis ». Ce qui est étonnant, soit dit en passant, c'est que le dit communiqué a été d'abord mis sur le site du PJD avant d'être diffusé de manière plus large aux médias. Que ce soit sur le fond ou la forme, le moins qu'on puisse dire c'est que la démarche du ministre Ramid, avec de troublants mélanges de genres, est plus de nature à embrouiller les esprits que de clarifier. Ce qui a rendu le flou encore plus artistique c'est que le communiqué de la Justice a mélangé aussi, volontairement ou non, un aspect parfaitement procédural, relevant bel et bien, qu'on le veuille ou non, du département de Mustapha Ramid, à d'autres aspects comme les relations stratégiques. Il faut savoir, à ce titre, que le Dahir définissant le droit de grâce royale confie à une commission spéciale le soin de choisir les détenus qui doivent bénéficier de cette grâce. Or, ladite commission comprend des responsables du ministère de la Justice, des magistrats et des représentants de l'administration pénitentiaire, lesquels étudient les dossiers qui leur sont soumis et les demandes qu'ils reçoivent, expriment leur opinion puis adressent le tout au cabinet royal pour décision finale. Inutile de dire que la commission des grâces est donc grandement responsable des remises de peines ou libérations qui sont décidées.
Chaque année, SM le Roi Mohammed VI accorde sa grâce à des milliers de détenus très souvent pour des raisons humaines et de santé et sur la base de listes dressées par le ministère de la Justice. C'est ce dernier qui applique la procédure au sens administratif du terme. Il n'est pas besoin de dire que quand le souverain appose son sceau pour accorder la grâce, le ministère de la Justice est supposé s'être assuré de tous les détails auparavant. Dans le cas précis des 49 détenus espagnols graciés récemment, il est évident que le souverain ne pouvait en aucun connaître de détails concernant chacun d'entre eux. Tout comme il est évident qu'au cas où il en aurait été informé, SM le Roi n'aurait jamais accordé sa grâce. Si erreur il y a eu, elle s'est donc forcément produite en amont à savoir au moment de la préparation des listes. Et c'est bien pour cette raison que le souverain a rapidement demandé l'ouverture d'une enquête pour déterminer les responsabilités et circonstances qui ont permis au détenu espagnol, Daniel Galvan Fina, de passer travers les mailles du filet. Le souverain est allé plus loin en demandant, au ministre de la justice de revoir la procédure et de proposer les mesures pour verrouiller les conditions d'octroi de la grâce. Savoir qu'un criminel tel que Daniel Galvan est aujourd'hui en liberté est dur à faire accepter pas seulement aux familles des enfants qui en ont été victimes mais à toutes les familles marocaines... Les esprits se sont heureusement apaisés quand SM le Roi Mohammed VI, comme à son accoutumée, a interagi avec ce cri de cœur de la société en promettant de sanctionner lourdement les responsables. Les conclusions de l'enquête seront certainement très attendues.