Nommé verbalement par Abdelmoughit Slimani, Mohamed Boudhir a occupé pendant plus de sept ans le poste de secrétaire général de la commune urbaine des Roches Noires sans aucune légitimité. Devant les enquêteurs de la BNPJ, il dira que Slimani lui avait promis un poste de gouverneur. «Je ne faisais qu'aider un ami". C'est avec cette phrase que Mohamed Boudhir justifia devant les enquêteurs de la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ) plus de sept ans de gestion frauduleuse de la communes urbaine de Roches Noires dont il était de facto le secrétaire général. Nommé verbalement par Abdelmoughit Slimani, alors président du conseil communal de Roches-noires, cet employé de la Caisse nationale de la sécurité sociale (CNSS) est devenu sans aucune légitimité le secrétaire général d'une commune alors qu'il n'appartenait même pas au corps des fonctionnaires du ministère de l'Intérieur. Ce département a d'ailleurs officiellement affirmé qu'il n'a jamais entériné sa nomination et démenti en avoir été informé. Pourtant, durant plusieurs années, des documents officiels, des correspondances, des transactions financières, entre autres, seront signés par Boudhir en tant que secrétaire général. Il est donc difficile d'imaginer qu'à la Direction des collectivités locales personne ne se soit demandé sur la légalité de la signature de ce vrai-faux secrétaire général. Mais, l'explication est évidente. Car, qui aurait pu oser le faire alors que le ministère était géré par le beau-frère du patron des Roches Noires, Driss Basri. C'est en sa qualité de secrétaire général de la commune que Boudhir présida le 26 février 1993 une réunion de la commission chargée de l'ouverture des plis de l'appel d'offres concernant les grands travaux de la première tranche du projet du complexe résidentiel Ouled Ziane. Ce marché fut attribué à l'entrepreneur Boujemaâ Youssoufi. Le procès-verbal de cette réunion indique la présence de plusieurs fonctionnaires de la commune dont la chef du service des marchés publics, Belghiti Afifa. Or, il a été prouvé que cette responsable n'était pas présente ce jour-là et n'avait donc pas assisté à ladite réunion. Pourtant, quelqu'un signera à sa place le procès-verbal que Boudhir validera par sa propre signature alors qu'aucune loi ne l'autorise à diriger une telle réunion ni à prendre de telles décisions. Outre cette usurpation de fonction, l'enquête de la BNPJ révélera que la société EMBA dirigée par Youssoufi, bénéficiaire du marché, avait présenté un dossier incomplet puisque plusieurs documents requis par la loi n'y figuraient pas. Pire encore : l'unique rivale de la société EMBA était SONATIBA, une autre entreprise appartenant au même patron que la gagnante à savoir Boujemaâ Youssoufi. Ce dernier recevra trois chèques dont le visa était signé par Boudhir et dont le montant global atteint les 30 millions de DH. La même procédure sera utilisée afin de débloquer plus de trois millions de DH au profit de l'entreprise SOGETERS qui se verra adjuger la réalisation de l'une des tranches du même projet. Cette société recevra en trois mois seulement plus de 80 % du budget réservé à cette tranche alors que les travaux ne seront jamais réalisés. Par ailleurs, le faux-secrétaire général créa en 1985 la société "Le Tivoli" qu'il cédera par la suite à son patron Abdelmoughit Slimani qui en devint le principal actionnaire. Cette transaction s'était faite, selon Boudhir, à titre gratuit et dans le but de faire plaisir à Slimani qui lui avait promis un poste de gouverneur. Mohamed Ouahib, commerçant de son état déclarera devant les enquêteurs que les matériaux de construction qu'il vendait pour le compte du projet Ouled Ziane étaient déviés vers le chantier de construction de l'hôtel "Le Tivoli". En somme, de 1984 à 1991, un président qui prenait ses décisions individuellement et sans en référer au conseil communal et un faux secrétaire général détourneront plusieurs dizaines de millions de DH des fonds publics vers un projet personnel en toute impunité et sans même se soucier de couvrir ces détournements. C'est dire qu'ils croyaient que la situation n'allait jamais changer. Affaire à suivre.