Jean-Victor Lovat a ouvert une nouvelle page dans l'Histoire du Maroc. Un gouverneur et un président de la communauté urbaine sont traduits devant la justice et risquent de lourdes peines. C'est peut-être une première, mais certainement pas la dernière. Le procès de l'ex-gouverneur des préfectures de Aïn Chock et de Aïn Sebaâ-Hay Mohammadi, Abdelaziz Laâfoura, et l'ex-président de la Communauté urbaine de Casablanca et de la commune urbaine des Roches-Noires, Abdelmoughit Slimani, a débuté le 16 février devant la Cour d'appel de Casablanca. Après la notification des charges qui pèsent sur eux, la Cour a décidé de reporter l'affaire au 18 mars prochain. Aux côtés de Slimani et Laâfoura figurent deux architectes, El Amine Demnati et Abdellatif Chraïbi, Lahcen Haïrouf et Taâloucht Al Hafiane respectivement ex-président et ex-secrétaire général de la commune d'Aïn Sebaâ, Mohamed Boudhir, ancien secrétaire général de la commune des Roches-Noires, l'entrepreneur Boujemaâ El Youssfi et le banquier Azeddine Bakraoui Le procès Slimani-Laâfora & Co ne fait que commencer et risque de défrayer encore plus la chronique. Tout a commencé par une plainte déposée par un homme d'affaires suisse, Jean-Victor Lovat. Celui-ci possèdait deux sociétés au Maroc. Au début des années 90, il construit deux grands hôtels à Agadir, l'Oasis et le Tivoli. C'est l'ancien président de la Communauté urbaine de Casablanca, Abdelmoghit Slimani, qui est le propriétaire du Tivoli. Mais certains se demandent même si ce dernier n'appartiendrait pas, en fait, à l'ancien ministre de l'Intérieur, Driss Basri, puisque Slimani n'est autre que le beau-frère de Basri. En tout cas, Lovat est devenu, au fil des mois, un intime du clan Basri. La coopération entre les deux parties va atteindre la grande ville de Casablanca. Il s'agit notamment du projet Hassan II de recasement de bidonvillois de Hay Mohammadi. C'est la société du Suisse Lovat qui devait se charger de sa construction. Le problème est que 90% des terrains alloués à ce projet furent détournés de leur destination d'origine. C'est l'un des principaux griefs retenus contre Slimani et Laâfora. Même constat pour le don royal, un terrain destiné en principe à abriter un jardin public dans le quartier Sidi Moumen. Mais aujourd'hui, ce sont des immeubles qui s'y trouvent. En tout, plusieurs milliards de centimes ont été purement et simplement détournés ou dilapidés. Dans toutes ces affaires, Lovat a été étroitement impliqué. Il se dit victime. Dans la foulée, le torchon a brûlé entre Lovat et ses associés. Il se considère comme un bouc-émissaire. Pour éviter que les gabegies de Slimani et Laâfora ne soient dévoilées, Lovat écope de plusieurs mois de prison pour émission de chèques sans provision. Une fois en liberté, il jure de faire payer à ses ex-associés et amis le prix de leur forfait. Et il tient parole. En août 2003, après sa plainte, déposée contre une quinzaine de personnes, (dont Slimani, Laâfora, Demnati…), Lovat a ouvert une nouvelle page dans l'Histoire du Maroc. Un gouverneur et un président de la Communauté urbaine sont traduits devant la justice et risquent de lourdes peines. C'est peut-être une première, mais certainement pas la dernière. Par ailleurs, la Cour des comptes a également effectué des enquêtes dans d'autres communes de la métropole casablancaise, comme celle de Hay Hassani. Cette commune, rappelons-le, était gérée par Mohamed Kemmou, un proche de Slimani. Abderrazak Afilal a lui-aussi été auditionné en novembre dernier par le juge Serhane. Le leader de l'UGTM a bien évidemment été interrogé dans le cadre de l'instruction de l'affaire Slimani-Laâfora. Afilal, qui a assuré à maintes reprises qu'il n'a absolument pas trempé dans les magouilles de Slimani et Laâfora a en tout cas beaucoup de choses à révéler puisqu'il était pendant plusieurs mandatures, président de la Commune d'Aïn Sebaâ-Hay Mohammadi, circonscription qui a connu plusieurs cas d'abus et de malversations financières reprochés à son successeur Lahcen Haïrouf.