Peu apprécié des dermatologues, boudé par les jeunes générations qui lui préfèrent le gel douche, le savon mérite d'être réhabilité. Rien ne nettoie mieux que lui. A condition de l'utiliser à bon escient et pas sur toutes les peaux. Aucun autre produit de beauté ne nous approche de si près. Il glisse sur la peau, épouse les pleins et les creux de notre corps, laissant sur son passage un sillage velouté et parfumé que seuls les plus intimes peuvent respirer. Du savon de Marseille, qui sent bon le propre et le grand air, aux savons « cosméto », en passant par les gammes aromathérapie, il se décline en une variété infinie de formes, de senteurs et de couleurs. S'il a longtemps pâti d'une mauvaise réputation (le savon abîme et décape la peau…), on sait aujourd'hui qu'associé à un soin corporel bien hydratant, il est le plus sensuel et le plus naturel des soins quotidiens. Y a-t-il de vraies différences entre les savons ? Ce mot peut désigner quatre produits différents. Le savon traditionnel, ou savon de toilette, est obtenu après une réaction de saponification d'un corps gras animal (suif, saindoux) ou végétal (huile d'olive pour le savon de Marseille) sur une base minérale (soude ou potasse). Le savon surgras est un savon traditionnel enrichi en agents nourrissants (huile d'amande douce, beurre de karité…), mais en quantité limitée (pas plus de 10 %), sinon il perd son pouvoir moussant. Le savon liquide (à ne pas confondre avec la crème lavante ou le gel douche) est toujours du savon. Seule différence : il est plus dilué, contient plus d'eau et un peu plus d'additifs (agents de texture, agents anticalcaires comme l'acide éthylène diamine tétra-acétique ou EDTA…). Le pain dermatologique, également appelé savon sans savon ou syndet, est élaboré à partir d'agents lavants de synthèse (tensioactifs). On peut y incorporer jusqu'à 25 % d'autres composés, surgraissants ou actifs. Son pouvoir moussant est plus faible. Toutes les peaux peuvent-elles utiliser un savon ? Un savon traditionnel tiraille toujours un peu la peau. S'il est trop détergent, il peut éliminer le film hydrolipidique. Mais il n'est pas le seul responsable : la température élevée de l'eau et sa teneur en calcaire sont aussi coupables. Aussi, mieux vaut appliquer, après la toilette, un lait hydratant ou une huile végétale. Si la peau de votre corps est sensible, si vous avez des problèmes dermatologiques, utilisez un pain dermatologique. Si vous avez la peau sèche ou si vous avez plus de 70 ans (la peau s'assèche au fil du temps), privilégiez le savon surgras. Si vous n'avez pas de problèmes, le savon traditionnel est parfait pour le corps, mais préférez un pain dermatologique ou un produit spécifique pour le visage. Oubliez un peu le « culte du pH ». « Un pH acide ou alcalin ne signifie absolument pas qu'une préparation sera irritante pour la peau, explique Pierre Grascha, directeur recherche et développement DEB Group Ltd. Le pH à lui seul n'est pas une indication suffisante pour choisir un savon, trop d'éléments le modifient dans une formule (parfums, tensioactifs, conservateurs…). Surtout, la mention “pH neutre” est un terme chimique qui n'a rien à voir avec l'innocuité. Par ailleurs, la peau est dotée d'un excellent pouvoir tampon : elle va corriger elle-même son pH. » Privilégiez les savons contenant des agents lavants d'origine végétale (huiles d'olive, de palme, de coton, d'amande douce…), et non synthétique (tensioactifs) ou animale (surveillez les mentions sur les étuis « sans graisses animales »). Préférez les formules sans parfums ni colorants (ils n'apportent rien sur le plan de l'efficacité), ni conservateurs (absents dans les savons traditionnels ou surgras).