Avec des importations nettes de céréales s'élevant à environ 66 millions de tonnes en 2010, les pays arabes continuent de figurer au premier rang mondial des importateurs de céréales. Un certain nombre de facteurs structurels expliquent cette tendance, notamment la croissance de la population et des revenus, ainsi que la rareté des ressources en eau et en terres, qui limitent inévitablement la production. La hausse des prix des céréales, et en particulier du blé, et leur volatilité accrue posent aux pays de la région des problèmes budgétaires et de sécurité alimentaires majeurs. Selon la Banque mondiale, la gestion de la volatilité des prix et l'amélioration de l'efficacité de la chaîne d'importation constituent des enjeux particulièrement importants dans les pays arables. Des données provisoires pour dix pays arabes montrent que l'ensemble des coûts logistiques – à savoir 1) la manutention portuaire, 2) le transport intérieur, 3) l'entreposage, 4) la gestion, 5) les pertes de marchandises et 6) les dépenses d'équipement – se chiffrent à 36 dollars par tonne de blé. À titre de comparaison, ils s'élèvent à 18 dollars par tonne aux Pays-Bas. La manutention portuaire représente en moyenne dans les dix pays 40 % des coûts de logistique. Faible capacité de manutention En raison de la faiblesse de la capacité de manutention et de la vétuste des équipements, les bateaux chargés de blé doivent très souvent attendre jusqu'à 10 jours avant de pouvoir décharger leur cargaison. Il existe toutefois d'importants écarts de performance entre les chaînes d'approvisionnement des différents pays de la région. Par exemple, la chaîne d'approvisionnement est relativement efficiente au Bahreïn, où le port est équipé de silos et de minoteries et où les coûts logistiques représentent moins de 0,01 % du produit intérieur brut (PIB) du pays. En Jordanie, en revanche, les contraintes géographiques empêchant le regroupement portuaire de la chaîne d'approvisionnement, le transport intérieur constitue une part importante des coûts de la chaîne d'importation du blé, et les coûts logistiques représentent 0,15 % du PIB. En supposant que ces coûts puissent être réduits de 50 % (ce qui correspond à l'écart entre la moyenne pour les dix pays arabes et les Pays-Bas), grâce à des investissements dans la modernisation des infrastructures et de la gestion, la Jordanie pourrait réaliser des économies équivalant à 59 % de la variation de sa facture d'importations de blé intervenue entre 2009 et 2010. De tels investissements réduiraient également les risques de pertes de marchandises et assureraient une livraison rapide des stocks en cas d'urgence. Instruments de couverture contre la hausse En plus d'améliorer leur efficacité logistique, les pays arabes pourraient aussi utiliser des outils de gestion des risques pour réduire leur exposition à la volatilité et aux chocs des prix. Une analyse des adjudications de blé concernant la Tunisie sur une longue période semble indiquer que l'écart entre ce qui est payé pour le blé et le prix du blé sur les marchés internationaux peut augmenter en période de chocs des prix. Par exemple, lors de la flambée des prix des denrées alimentaires en 2008, la Tunisie a payé pour le blé dur (fret inclus) une prime de 91 % par rapport au prix au comptant du blé sur les marchés internationaux, alors que cette prime était de 47 % avant et après l'envolée des cours. Les instruments de couverture physique, qui incorporent une protection contre les variations de prix dans les contrats d'approvisionnement physique, peuvent aider les pays à atténuer la volatilité de ces écarts. Cette approche non seulement apporterait aux pays la protection souhaitée contre les variations de prix, mais répondrait également aux besoins physiques d'importations de blé des pays arabes. Il serait possible aussi d'utiliser des instruments financiers, tels que les options permettant de plafonner les prix, pour aider les Etats à se protéger contre de fortes hausses du prix de référence sous-jacent. Les deux formules de couverture pourraient aider les pouvoirs publics à mieux prévoir leurs obligations budgétaires futures. Source : Région Moyen-Orient et Afrique du Nord de la Banque mondiale, département Développement durable. Niveau élevé de l'inflation des prix alimentaires Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, l'inflation des prix alimentaires atteint des niveaux divers en fonction des pays. En Egypte, où l'inflation des prix alimentaires est de 19 % (février 2010-février 2011), le prix des céréales est demeuré stable pendant la première moitié de 2010, puis a augmenté de près de 16 % entre juin et décembre 2010. En Syrie, l'inflation des prix alimentaires a presque doublé entre janvier 2010 (7 %) et janvier 2011 (13 %). Les prix des produits laitiers, des matières grasses et huiles et des fruits, qui avaient diminué respectivement de 9 %, 3 % et 1 % en janvier 2010, ont augmenté de 27 %, 28 % et 14 % en janvier 2011. De même, l'Iran a enregistré une inflation des prix alimentaires de 26 %, due principalement à la hausse du prix du pain et des céréales (46 %) et des matières grasses et huiles (64 %). Au même moment, l'inflation des prix alimentaires demeurait relativement modérée dans d'autres pays ayant récemment subi des troubles sociaux, tels que le Bahreïn, la Tunisie et la Jordanie, où elle se situait respectivement à 0,5 %, 4 % et 5 %.