La révolution populaire en Libye constitue un fait politique de grande signification historique pour les Libyens qui aspirent à se libérer d'un régime diabolique et d'un clan familial insatiable au pouvoir. Pour l'occident, il s'agit d'une nouvelle donne géostratégique qui risque de précipiter leurs économies dans la récession et la paralysie des machines qui font tourner leurs usines. Au fond, le futur des puits de pétrole motive tout type de supputations, de scénarios et d'alliances secrètes. D'un côté, le clan Kadhafi menace, en cas de défaite militaire, d'embraser le pays en lançant des raids aériens contre les gisements pétrolifères. De l'autre, les puissances occidentales, à leur tête les Etats - Unis et la Grande Bretagne, projettent d'imposer un blocage de l'espace aérien de la Libye en perspective d'une intervention directe. Les plans préparés pour une éventuelle intervention ne sont pas encore révélés mais tous les scénarios conduisent à l'application de la même recette déjà testée en Irak pour s'emparer de la totalité de la production du pétrole libyen. La poursuite des combats entre révolutionnaires et milices du clan Kadhafi est accompagnée, aux marchés internationaux, d'une escalade du prix du pétrole, qui a été entamée depuis la mi-décembre comme conséquence de la spirale des révoltes dans le monde arabe. L'Occident se rend désormais compte que la stabilité politique dans la région arabe est aussi importante que celle de son économie. Le spectre d'une guerre du pétrole aura des conséquences immédiates qui se traduiraient par une chute des taux de croissance, une réduction de l'emploi et la dégringolade des mouvements à la bourse. Selon l'Agence Internationale de l'Energie, la production libyenne s'est réduite d'un million de barils/jour environ, soit l'équivalent de deux tiers de la production totale avant la révolution populaire, qui était de 1,58 million de barils/jour. Deux indices significatifs traduisent la situation d'alarme que vivent les marchés financiers depuis le déclenchement de la révolution du peuple libyen. D'abord, l'augmentation du prix du pétrole Brent (mer du Nord) qui a atteint, mardi, 115,10 dollars le baril contre 114,70 à la clôture lundi du marché de Londres, soit une hausse de 0,34%. En même temps, le prix du pétrole WTI (West de Texas) a été cotisé, mardi, à 105,21 dollars/baril, soit une hausse de 0,20% face aux 105 dollars/baril, lundi à la clôture de la bourse de New York. Ensuite, les métaux précieux sont plus cotisés que jamais. L'or a récupéré sa condition d'actif refuge. L'once valait, mardi, 1.432,9 dollars, soit une augmentation de 0,1% par rapport à lundi. Depuis janvier dernier, la valeur de l'or ne cesse d'augmenter mais elle a été freinée, durant la journée de mardi, à la suite des informations diffusées par certaines chaînes satellitaires qui faisaient état d'un possible pacte entre le Conseil Supérieur de la Révolution libyenne et le clan Kadhafi pour permettre à ce dernier d'abandonner le pays. Les mêmes rumeurs ont également freiné la tendance ascendante du prix du fuel. L'once d'argent marque de son côté des indices positifs en augmentant de 1% pour atteindre, mardi, un niveau de 35,96 dollars, soit un nouveau record. Des experts financiers redoutent le fait que cette instabilité du marché du pétrole pourrait affecter sérieusement aussi bien les expectatives à court terme sur une potentielle volatilité dans les flux actuels du pétrole que les implications négatives à long terme sur les investissements. Dans le pire des scénarios, les occidentaux craignent que la prolongation dans le temps des révoltes dans le monde arabe pourrait retarder la récupération de l'économie mondiale et provoquer, par conséquent, la diminution de leurs exportations et l'augmentation du taux de l'inflation dans leurs propres marchés. Prenant comme référence l'exercice de 2010, il ressort que le pétrole WTI a augmenté de 17,59% depuis début janvier de 2011 et a eu une rentabilité de 28,19% à un an et de 69,06 à cinq ans. Le pétrole Brent a marqué de son côté des taux de rentabilité plus hauts du fait que son prix a augmenté de 25,31% du 1 er janvier au 8 mars. Il a une rentabilité de plus de 45,25% à un an et de 86,84% à cinq ans. Durant 2010, le prix du pétrole dépendait de la volatilité des marchés boursiers et des expectatives de croissement aux Etats - Unis et dans d'autres puissances industrielles. De ce fait, les prix ont augmenté de 9,71% pour atteindre les 90 dollars/baril. En 2009, le prix du pétrole avait atteint 80 dollars/baril, accumulant une hausse de 75%, soit le taux le pus haut de la décennie. Le pétrole conditionne donc le contexte des échanges internationaux et une flambée des prix pourrait hypothéquer les stratégies de croissance des économies occidentales. Déjà, l'Espagne a pris des mesures d'austérité en matière énergétique en vue de réduire de 5% ses importations de pétrole. Ces mesures imposent aux conducteurs de véhicules de circuler à moins de 110 km/heure, aux autorités municipales de réduire la consommation de l'électricité consacrée à l'éclairage public, et aux autorités centrales d'accorder des subventions aux promoteurs des énergies renouvelables. Le conseil des ministres a adopté, dans ce sens vendredi dernier, le Plan d'Economie et d'Efficience Energétique qui reprend vingt mesures dont l'application supposerait une épargne estimée à 3,2 millions de tonnes de pétrole annuellement (28,6 millions de barils) et une épargne économique de 2,3 milliards d'euros. L'Espagne importe 75% de ses besoins énergétiques, soit 600 millions de barils de pétrole par an. La hausse du prix du fuel a une grande incidence sur la balance commerciale de manière que chaque augmentation de dix euros du prix du baril, coûterait à l'Espagne près de six milliards d'euros additionnels annuellement. Au cas où le prix du pétrole se maintient aux actuels niveaux, le déficit énergétique en 2011 sera de 46 milliards d'euros.