Alliant fantastique et burlesque, scrutant les bas fonds de l'histoire et de l'identité marocaines, reconstruisant l'imaginaire collectif avec ses moments fuyants et reproduisant l'âme du peuple, la filmographie de Mohamed Abderrahman Tazi est une sorte de “méditation nostalgique” mais aussi vivifiante de toute une identité. L'expérience de Abderrahman Tazi est “édifiante et constructive”, sachant qu'elle a contribué à l'émergence d'une identité du cinéma marocain, au sens d'appartenance, selon les différents professionnels et critiques. “Les mouvements de caméra de Tazi sont une sorte de voyage dans le temps qui permettent, comme une musique de nuit, de s'attarder sur le furtif, de scruter le détail, de meubler les espaces vagues et vides, d'interroger le présent et de s'interroger sur l'avenir”, a souligné dans ce cadre le critique Mohamed Chouika, estimant que le metteur en scène focalise son regard de photographe scrutateur, parfois rêveur et manipulateur, pour présenter une œuvre associant histoire, identité, drame, burlesque et fantastique. Pour le critique Ahmed Sijilmassi, ce qui distingue le cinéma de Abderrahmane Tazi, c'est cette cohésion entre thème traité, décor, accessoires et costumes, choisis avec beaucoup de finesse mais aussi avec beaucoup de fidélité à l'époque retracée. La force et l'originalité des films de Abderrahman Tazi résident dans cette adaptation du réel social et du vécu quotidien en narration filmique, commente pour sa part le critique Hamid Atbatou. “La quête permanente, le temps qui s'étire pour ne jamais finir, le cadrage de certains plans et la luminosité (naturelle) sont quelques-uns des ingrédients qui meublent l'espace et donnent vie aux œuvres de Mohamed Abderrahman Tazi, qui tentent de créer ou de proposer une identité”, estime pour sa part le critique Boubker Hihi. Pour sa part, l'universitaire et chercheur Athman Bisani a qualifié de “films mémoires” les œuvres du cinéaste Abderrahman Tazi, mettant en avant la “compétence” du cinéaste à recréer le passé et à le représenter au spectateur comme s'il était toujours vivant dans son imaginaire. Dans son film “les Voisines d'Abou Moussa”, Aberrahman Tazi a pu nous présenter une image très profonde de l'histoire marocaine, à partir d'une adaptation du roman de l'écrivain Ahmed Taoufiq. Ce film a réussi remarquablement la rencontre de l'art cinématographique marocain avec l'art romanesque, d'une part et d'autre part avec l'histoire marocaine elle-même, a estimé quant à lui l'universitaire et chercheur Said Karimi. Labrim Abdelouahed (http://www.errachidia.org/actua/article.php?id=977) Mohammed Abderrahmane Tazi est né à Fez au Maroc en 1942. Il a étudié le cinéma à l'IDHEC (Paris) et à Mass Media Communications (Syracuse University, USA). Il a été directeur de la photographie de plusieurs longs métrages, réalisateur de courts et moyens métrages documentaires, de spots publicitaires, conseiller technique ou directeur de production de films étrangers tournés au Maroc (Robert Wise, John Huston, Francis F. Coppola). Ses films : Le Grand voyage (1981) ; Badis (1989) ; A la recherche du mari de ma femme (1993) ; A la recherche du mari de ma femme 2 (1997) ; Les Voisines d'Abou Moussa (2004).