Autant elle est parfaite pour les promoteurs immobiliers, autant elle demeure inadaptée, voire confuse, pour les acquéreurs. La loi sur la VEFA (vente en l'état futur d'achèvement) souffre de plusieurs imperfections et ne trouve que rarement terrain d'entente. Aujourd'hui, avec l'éclatement d'une série de scandales immobiliers, il est urgent de procéder à un « toilettage » de cette loi, pour la rendre obligatoire, équilibrée et transparente. Telle est la conclusion du débat organisé par le Club Entreprendre, le 12 octobre à Casablanca. Calquée sur la loi française de la construction et de l'habitat, la réglementation de la VEFA au Maroc, en vigueur depuis 2002, est venue « légaliser » et réglementer la « vente sur plan ». Une pratique illégale, en totale contradiction avec les dispositions du DOC (droit des obligations et contrats), mais qui répondait « parfaitement » aux tendances du marché de l'immobilier et au « boom » du logement social. Il faut savoir que lorsque le promoteur vend un logement avant sa construction, il s'agit bien d'une « vente en l'état futur d'achèvement », laquelle est soumise à des règles spécifiques, fixées par la loi. Au départ, le législateur voulait protéger le consommateur (l'acquéreur), tout en permettant au promoteur de disposer du cash «gratuit» au moyen de dépôt de garantie (en cas de réservation par l'acquéreur). Un moyen aussi pour le promoteur de réduire son endettement bancaire. Sauf que chez nous, à proprement parler, la loi n'a jamais été appliquée à la lettre. Du coup, c'est le consommateur qui s'en trouve pénalisé, soumis à la volonté et à l'arbitraire du promoteur. La série de scandales qui ont éclaté ces dernières années ont assombri l'image du secteur. «L'arnaque immobilière à Marrakech», documentaire diffusé sur TF1 récemment, a forcé le trait noir du «tripatouillage» qui domine dans le secteur immobilier marocain. En dépit des cahiers des charges prévus par la loi, et qui visent à protéger les acquéreurs, la loi sur la VEFA au Maroc a cependant omis de mettre en place des sanctions sévères en cas de non respect des engagements pris, en termes de délai de livraison du bien, de la surface habitable exacte, de la nature des matériaux utilisés et des équipements, etc. Le débat, fort intéressant par ailleurs, a abouti à ce constat : le secteur de la promotion immobilière, parce qu'il est miné par la spéculation sauvage et les passe-droits, est devenu un «espace chaotique». Aux yeux des hommes de droit (notaire et avocat invités au débat), rien ne justifie le refus d'appliquer la loi. Les promoteurs, dans leur majorité, évitent de payer la caution (obligatoire via le notaire) et ne semblent pas prêts à jouer le jeu, de peur de payer une pénalité de 1% par mois de retard (de livraison du bien) ou d'assurer des garanties contre les fissures et les malfaçons à la livraison. Il faut dire que nous sommes aujourd'hui à un moment critique de l'application de la loi et c'est toute la profession (avec à sa tête la fédération des promoteurs immobiliers) qui est interpellée. Les enjeux sont si grands que l'on peut laisser tout un pan de l'économie nationale s'engouffrer dans la dérive.