L'organisation séparatiste basque ETA a annoncé, dimanche, à travers un communiqué remis à la BBC, une nouvelle trêve de paix pour manifester sa volonté d'adhérer au processus démocratique et contribuer à la solution définitive du problème basque en Espagne. De par cette initiative, les activistes de l'organisation terroriste affirment être engagés à mettre un terme à leurs « actions armées offensives ». Luttant depuis un demi siècle pour la totale indépendance du peuple basque, ETA s'est distingué pour son flair sanguinaire, l'astuce et le mépris de l'Etat de droit. C'est la raison pour laquelle personne aujourd'hui ne croit un seul mot de son communiqué ni accorde le moindre intérêt à ses auteurs. ETA se définit dans les annales du terrorisme comme une nébuleuse de cellules para-militaires exerçant dans la totale clandestinité. Mettant à profit les bienfaits de la démocratie, celles-ci s'appuient sur un appareil idéologique, une aile politique, des associations légales et une armée de racketteurs chargés de la collecte de l'impôt révolutionnaire imposé aux entrepreneurs du pays basque espagnol. Curieusement, des centaines d'ouvrages édités sur ETA, décrivent en détails la structure de cette organisation séparatiste, comment fonctionnent ses canaux de communication, la pensée de ses idéologues, ce qui démontre qu'elle s'appuie sur une structure bien organisée. Les télé - journaux espagnols surprennent tous les jours les téléspectateurs avec des séquences de violence provoquées au Pays Basque par des associations juvéniles qui incendient autocars, véhicules, succursales bancaires. D'autres collectifs civils participent sous le couvert d'activités légales, au financement des opérations terroristes, à la diffusion de l'idéologie des séparatistes basques, gèrent les fonds destinés aux familles des prisonniers de la bande. Des organisations politiques, représentées au parlement régional et municipalités basques agissent comme animateurs de la branche politique de ETA ainsi que des journaux comme Egin et Cara. L'attentat perpétré au Terminal 4 de l'aéroport Barajas de Madrid, le 30 décembre 2006, avait fait perdre la patience au gouvernement socialiste, aux forces politiques et à la société espagnole. Une véritable chasse à l'homme s'est déclenchée par les forces de l'ordre en coordination avec leurs homologues françaises, et, la plupart des activistes de la bande se trouvent désormais derrière les barreaux. Les responsables de sa branche politique (Herri Batasuna) ont été inculpés de complicité avec le terrorisme; les comptes bancaires des organisations formant l'entourage de la bande ont été saisis et les conseils municipaux à majorité indépendantiste ont été dissous. D'autant plus, l'étau ne cesse de se resserrer autour des activistes etarras installés en France depuis l'assassinat en mars 2010 d'un policier de Dammarie-lès-Lys (Seine-et-Marne). Coupée de ses caches d'armes en France, dépourvue de sa branche politique au Pays Basque et boudée par la société civile, ETA paraît désormais comme un loup édenté. Près de huit cents de ses activistes croupissent dans les prisons françaises et espagnoles alors que d'autres vieillissent sans pouvoir voir se réaliser leur projet d'Etat indépendant. C'est dans ces conditions qu'intervient la dernière trêve unilatérale d'ETA. C'est une décision qui invite à une multitude de lectures mais pour la classe politique en Espagne, il s'agit d'une nouvelle intrigue des terroristes pour pouvoir se réarmer, renforcer leurs rangs avec de nouvelles recrues et semer la confusion au sein de la classe politique. Dans les premières réactions, il est clair que le scepticisme est la note dominante. Le ministre de l'Intérieur, M. Rubalcaba, a mis en garde les etarras contre le fait que « le gouvernement ne va changer même pas une virgule de sa politique antiterroriste » alors que les leaders du Parti Populaire, M. Mariano Rajoy, et du parti National Basque, Iñigo Urkullu, exigent des séparatistes de déposer définitivement les armes. Dans ses éditoriaux de mardi, la presse d'audience nationale a invité la bande ETA à prendre la voie de la sagesse en assumant l'échec de sa stratégie sécessionniste. ABC estime que la trêve ne peut être réelle que lorsque les terroristes basques «décident d'abandonner leurs arsenaux, démonter leurs réseaux de caches d'armes, remettre les fonds extorqués à leurs propriétaires, et, surtout, demander pardon aux victimes et se déclarer prêts à se rendre à la justice». El Pais qualifie d'“ambigu” le communiqué d'ETA parce que, explique le journal dans un éditorial, la bande terroriste cherche, à travers cette démarche, “tester la capacité de résistance du gouvernement, des partis et de l'opinion publique». Pour cela, estime l'éditorialiste, si les etarras perçoivent «une certaine disponibilité à céder ou au moins à négocier et des symptômes de division à ce propos, ils considéreront que la partie a été gagnée». Pour Publico, la démarche de ETA a pour objectif de gagner du temps. «La bande terroriste, traquée de toute part, souffre de sérieux problèmes de communication interne» et qu'il y a de plus en plus «dans ce monstre» des éléments qui sont conscients que «le temps des armes est sur le point de finir», écrit le journal. En tout cas, si cette bande cherche «réellement une solution démocratique» pour le Pays Basque, elle doit «abandonner pour toujours le moins démocratique qui existe, à savoir les pistolets», conclut Publico. La Razon invite à se méfier de la nouvelle tactique de ETA. “L'unique cadre acceptable (pour la trêve: NDLR) est que les terroristes abandonnent les armes, assument leurs responsabilités devant la justice et dissolvent la bande ». En même temps, il invite le gouvernement à «persévérer dans la stratégie actuelle de pression sur ETA, basée sur l'action de la police et de la justice».