La visite de travail effectuée lundi à Rabat, par Alfredo Perez Rubalcaba, Ministre de l'intérieur espagnol, a permis aux relations bilatérales entre leMaroc et l'Espagne de retrouver leur «normalité» et de dépasser la phase de tension, survenue suite aux derniers incidents sécuritaires de Mellilia. Démarrant la matinée, par un long tête à tête entre Taïb Cherkaoui, ministre de l'intérieur, et son homologue espagnol, qui a duré plus d'une heure et demi, la réunion de travail a été, ensuite, élargie aux hauts responsables sécuritaires des deux pays. Celle-ci a aussi duré presque une heure et demie. L'ordre du jour des discussions a porté sur les questions de terrorisme, la sécurité, la migration illégale et le trafic de drogue. Rabat s'attendait surtout, à ce que des explications sur les nombreux actes de violence commis par les forces de police et la garde civile espagnole à l'encontre de citoyens marocains et de migrants subsahariens, soient présentées par la partie espagnole. Si les deux ministres ont évité de tenir, comme à l'accoutumée, une conférence de presse conjointe au terme de leur réunion, un communiqué conjoint, rendu public plus tard et relayé par l'agence MAP, a permis d'évoquer les résultats de la réunion. Taïb Cherkaoui s'est contenté d'une déclaration diffusée le soir même à travers la chaîne Al Ouala, alors que son homologue espagnol donna une conférence de presse, en fin d'après-midi, au siège de l'Ambassade de son pays au cours de laquelle il a notamment fourni certains résultats concrets de la réunion. « Cette rencontre a été empreinte de franchise et de sérieux lors de l'examen des questions relatives à la protection des deux pays contre les menaces terroristes et les réseaux du trafic de drogue et de l'immigration illégale » s'est félicité Taïb Cherkaoui, qualifiant les relations bilatérales de « fructueuses et positives » et mettant en exergue les « résultats concrets et très positifs » de la coopération entre les deux pays. De son côté, Alfredo Perez Rubalcaba, a qualifié le Maroc de pays «voisin, partenaire et allié» et mis l'accent sur la solidité des relations profondes bilatérales. Il s'est surtout montré « satisfait » des résultats qui ont couronné sa visite au Maroc, saisissant l'occasion pour rendre hommage au rôle joué par les services de renseignements marocains dans la libération récente de deux otages espagnols par Al Qaida. Concernant les récents événements de Melilia, qui n'ont pas été mentionnés dans le communiqué conjoint, le ministre espagnol, en réponse à des questions sur ce sujet, a considéré que ces événements «appartiennent désormais au passé», sans donner des détails précis sur les causes des dits événements et les mesures prises à l'encontre des responsables. Ces détails ont été sans doute présentés à la partie marocaine. S'agissant de la gestion de la question de migration, les deux ministres ont «réitéré leur engagement pour une approche globale et intégrée, conformément à l'esprit de la conférence euro-africaine sur la migration et le développement, tenue à Rabat, en juillet 2006, et qui a fait du respect des droits et de la dignité des émigrés, une des priorité de l'action commune dans ce domaine » souligne le communiqué conjoint. En matière de lutte contre le trafic de drogue, les deux parties se sont «félicité» des résultats «positifs» enregistrés en la matière par le Maroc et ont convenu de « réactiver le groupe mixte anti- drogue, afin d'établir, dans les meilleurs délais, une stratégie d'action commune de lutte contre les nouvelles formes de trafic, particulièrement celles qui concernent les drogues dures et le blanchiment d'argent. Concernant la lutte contre le terrorisme, les deux pays ont réaffirmé leur engagement à coordonner et renforcer leur action commune afin de faire face aux défis que représente le terrorisme dans la région sahélo-saharienne, et ses répercussions sur l'ensemble des pays du Maghreb et du pourtour méditerranéen. Sur le registre de la coopération sécuritaire, les deux parties ont convenu de « rehausser le niveau de coopération entre les services et leurs départements respectifs, en décidant notamment d'intensifier l'action des commissions mixtes chargées des questions sécuritaires et de mettre en place de nouveaux mécanismes de coopération à travers la réactivation des Commissariats conjoints de Police installés à Algésiras et Tanger et aussi le renforcement de l'action des Officiers de liaison. A ce propos, des réunions semestrielles entre les responsables sécuritaires des deux pays ont été décidées. A leur tour, les deux ministres de l'intérieur devront tenir des réunions périodiques chaque année. D'ailleurs, Taïb Cherkaoui a annoncé sa visite prochaine en Espagne pour « poursuivre les concertations sur les questions d'intérêt commun » avec son homologue espagnol. Audience royale SM le Roi Mohammed VI a reçu, lundi au palais royal à Casablanca, le ministre espagnol de l'Intérieur, M. Alfredo Perez Rubalcaba, en présence du ministre de l'Intérieur, M. Taieb Cherqaoui, et de l'ambassadeur d'Espagne à Rabat, M. Luis Planas Puchades. «J'ai exprimé à Sa Majesté le Roi la volonté et la disposition du gouvernement espagnol de renforcer la coopération avec le Royaume du Maroc, afin de garantir la liberté et la sécurité de nos deux peuples», a déclaré M. Perez Rubalcaba à la presse, à l'issue de l'audience royale. D'après MAP Rublacaba en mission à Rabat : Tranquilliser les Marocains Le Detroit de Gibraltar vit, en ces chauds jours d'août, un ballet diplomatique, dont le but est d'étouffer les rumeurs au sujet d'une hypothétique crise entre les gouvernements de Rabat et Madrid. A cause du comportement de la garde civile espagnole au poste frontalier de la ville occupée de Melilla, responsable de brutalité à l'égard de citoyens marocains, les relations entre les deux pays ont été sur le point de chavirer vers une nouvelle période de tension. C'était l'objet de la visite de «travail», lundi, du ministre espagnol de l'Intérieur, M. Alfredo Pérez Rublacaba, bien que les incidents au poste frontalier de Melilla ne fussent pas mentionnés de manière explicite à l'issue de sa rencontre avec son homologue marocain, M. Taieb Cherkaoui. Il existe cependant un ferme engagement de veiller au respect des droits humains et de la dignité des immigrés conformément aux recommandations du Sommet euro-africain de 2006. Ceci invite à faire une lecture plus optimiste quant à l'avenir des relations entre les deux départements. En principe, les incidents au poste frontalier de Melilla devaient être étouffés dans l'œuf dès le premier jour si les autorités espagnoles avaient présenté bonnement les « excuses » à leurs homologues marocains et décidé d'ouvrir une enquête interne sur le comportement de la police des frontières. Rien de cela et encore pire. L'ancien président du gouvernement, le conservateur José Maria Aznar, s'est ressuscité des cendres pour attiser le feu en effectuant, mercredi dernier, une visite-éclair à Melilla avec le soutien du Parti Populaire. Aussi bien le gouvernement que le parti socialiste se sont mobilisés pour diminuer la tension avec le Maroc. C'est une attitude «irresponsable », déclarait le chef de la diplomatie espagnole, Miguel Angel Moratinos, qui se déplacera, en septembre prochain, à Rabat pour s'entretenir avec son homologue, M. Taeb Fassi Fihri. Au moment où les ministres de l'intérieur des deux pays tentent à Rabat de mettre fin aux malentendus qui ont assombri le ton normal des relations bilatérales, le Parti Populaire continue de parler, à Madrid, de « crise», de « conflit » et de « blocus » à Melilla. Sa proposition de débat sur les « incidents de Melilla » a été rejetée et critiquée par le reste des groupes parlementaires. Ni le ministre de l'intérieur ni celui des affaires étrangères ne vont comparaître au Congrès des députés pour rendre compte des incidents survenus récemment au poste frontalier de Melilla comme le souhaitait le Parti Populaire. La Gauche Unie considère qu'il est raisonnable que ces incidents ne soient débattus comme s'il s'agissait une «crise ou comme une catastrophe». Au contraire, il est nécessaire de les analyser de «manière plus prudente». Le porte-parole de Ezquerra Republicana Per Catalunya (ERC), Joan Ridao, reconnaît qu'il s'agissait d'un «conflit qui n'est pas facile à résoudre». Il a plaidé pour l'idée de «demander à la population de Melilla, via un référendum, de se prononcer sur ce qu'ils veulent être à l'avenir». Le porte-parole de Convergencia I Unio (CIU), Pere Macias, a souligné la «priorité d'accorder aux bonnes relations avec le Maroc en politique extérieure» et de tenter d'éviter «les réchauffements d'été». Le porte-parole du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (PSOE - au pouvoir), José Antonio Alonso, a signalé que le gouvernement espagnol avait, depuis le début des incidents, «mené en silence, avec sagesse et responsabilité» les démarches nécessaires pour rétablir la situation. Il a cependant critiqué le Parti Populaire (opposition majoritaire) pour avoir agi par «déloyauté (à l'égard du gouvernement de la Nation) en voulant convertir de simples disputes ponctuelles» en une «authentique crise» entre les deux pays. Il a également qualifié la visite de Aznar à Melilla d'«acte théâtral pour rentabiliser une politique d'usure du gouvernement» appliquée par le Parti Populaire.