Lors d'une conférence à l'initiative de la CPD et du FPE en coordination entre le ministère de la Justice M'Barek Tafsi En coordination entre le ministère de la justice, la Coalition du printemps de la dignité (CPD) et le Forum de la parité et de l'égalité qui relève du Parti du Progrès et du Socialisme, une conférence ayant pour thème: «pour une législation pénale garante de l'égalité, des droits et de la justice pour les femmes» a réuni, lundi au centre de formation du ministère de la justice à Technopolis à Rabat, des acteurs de la société civile et des représentantes du parquet général et de la délégation ministérielle chargée des droits de l'homme. Dans une brève allocution introductive, la présidente du FPE, Charafat Afailal, également membre du Bureau politique du PPS a indiqué que cette rencontre se veut être une occasion de dialoguer, d'échanger et de débattre entre l'ensemble des parties concernées, de toutes les questions dans le but de parvenir à un consensus au sujet de la réforme à entreprendre non seulement de l'ensemble du système et de la législation pénale, mais également de tous les problèmes à caractère social. Il s'agit, pour elle, de renforcer les instruments juridiques requis pour assurer la protection de la femme contre la violence sous toutes ses formes (numérique, politique ou autres), la discrimination ou le harcèlement sexuel. Et ce pour permettre aussi aux femmes d'être protégées au sein des instances élues et de l'espace public. Pour sa part, Fouzia Yassine coordinatrice de la communication au sein de la CPD a donné un bref aperçu de l'action de cette coalition qui regroupe une trentaine d'associations qui militent pour une meilleure législation de protection des droits de la femme marocaine, dans le cadre de son plaidoyer pour le respect des droits de l'homme. S'agissant de la législation pénale, la Coalition a émis ses propositions, a-t-elle dit, dans deux memoranda publiés après des études approfondies. Selon les conclusions de ces études, l'actuel code pénal se fonde sur une philosophie patriarcale comme il manque de vision visant à la protection des droits des femmes. Partant de ce constat, la CPD plaide pour une réforme globale et radicale du code pénal qui doit viser entre autres à respecter les engagements internationaux du pays, à éviter l'impunité des auteurs de crimes sexuels à travers l'application des peines alternatives, à améliorer la terminologie des textes et à abolir les procédures discriminatoires à l'encontre des femmes. Elle s'est ensuite félicitée du vote par le Maroc le 17 décembre 2024 de la résolution de l'Assemblée générale de l'ONU relative au moratoire sur la peine de mort. Elle a également fait savoir que l'avant-projet du code pénal proposé récemment par le ministère de la justice comporte aussi des dispositions discriminatoires qu'il importe d'abroger pour que les femmes puissent jouir de procès équitables. Pour le modérateur de la rencontre, Dr. Anas Saâdoun, membre du club des magistrats du Maroc, la thématique de la rencontre suscite effectivement beaucoup de débats avant de rappeler que depuis l'adoption de la Constitution de 2011 au contenu très avancé, qui consacre les libertés et les droits, le Maroc a réalisé une série de réformes de certaines lois, à l'exception toutefois du code pénal, du code de procédure pénale et des lois relatives au système pénal dans son ensemble. Depuis lors, le Maroc s'est attelé à adapter sa législation avec les dispositions de la nouvelle Constitution et des conventions internationale qu'il a ratifiées, et à la situation nationale vécue, a-t-il dit, rappelant que le code pénal occupe de par son importance théorique la deuxième position derrière la Constitution, la loi suprême du pays. Le code pénal organise et impose des restrictions aux libertés des citoyens au même titre que la Constitution. Et d'affirmer qu'il y a actuellement un grand fossé entre le texte constitutionnel et les engagements internationaux du Maroc et le code pénal en vigueur. Prenant la parole, la secrétaire générale de la délégation ministérielle chargée des droits de l'homme, Fatima Berkane a souligné l'importance de cette rencontre, qui intervient au lendemain de la célébration la Journée internationale des droits de l'Homme, rappelant que le Maroc a adhéré à la convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW) et à son protocole facultatif ainsi qu'à d'autres instruments relatifs à la protection des droits de l'homme de la femme. Elle a également rappelé que le Maroc a accueilli depuis une série de visites de groupes de travail chargés de la protection des droits de l'homme de la femme dont celle de la rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie, du rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants et d'autres. Elle a également fait état des propositions précises des différents groupes de travail en 2012 et en 2022 pour la protection des droits des femmes contre la violence, la harcèlement sexuel et plus tard contre la violence à l'égard des travailleurs domestiques et la discrimination contre la femme. Il a été notamment recommandé au Maroc d'amender toutes les dispositions discriminatoires et de permettre notamment aux organisations de la société civile de jouer pleinement leur rôle. Réagissant aux recommandations de ses partenaires et de certains pays, le Maroc a rejeté notamment la proposition portant sur le non incrimination des relations sexuelles entre adultes consentants hors mariage et de celles qui s'opposent à la morale et aux constantes du royaume, a-t-elle dit. Le Maroc a par contre accepté d'autres propositions visant à enrichir sa législation par de bonnes pratiques visant notamment la protection des mineurs. Et de conclure que la condition de la femme concerne l'ensemble de la société et que sa promotion requiert la participation de tous y compris les organisations de la société civile. De son côté Me. Fatima Zahra Bensaid, représentante du conseil supérieur du pouvoir judiciaire a rendu hommage aux organisateurs de cette rencontre pour débattre de ce sujet épineux. Elle a rappelé que le juge doit faire preuve de retenue dans l'expression de ses points de vue et de son opinion dans les cas où cela pourrait compromettre son indépendance, son impartialité ou la dignité de sa fonction ou mettre en péril l'autorité du pouvoir judiciaire dans le cadre du respect du principe de la séparation des pouvoirs. Il doit s'en tenir aux textes en vigueur, qui ne consacrent malheureusement aucune discrimination positive en faveur de la femme, qui doit théoriquement parlant bénéficier en fin de compte de la protection pénale contre la torture et autres actes cruels, inhumains ou dégradants, la violence, le suicide, la traite d'êtres humains, la diffamation, la négligence, le viol et l'exploitation sexuelle. Après avoir rappelé une série d'articles du code pénal à ce sujet, elle a fait état de leur application par le juge pour assurer la protection de la femme, illustrant ses propos par des arrêts de la cour de cassation dans des affaires concernant des femmes et des enfants (infidélité conjugale, droits matrimoniaux, cas des mineures, etc...). Et de conclure que la violence à l'égard des femmes est un phénomène dont le traitement efficace requiert la participation des femmes victimes mais également de la société tout entière. Lui succédant, Me Khadija Rougani, membre fondatrice de la coalition du printemps de la dignité a indiqué que la protection de la femme contre la violence requiert notamment une refonte globale de la législation pénale au lieu de se contenter de réformes partielles, éparpillées dans le temps et entre les textes. Il s'agit notamment pour le législateur d'adapter les textes en vigueur avec la Constitution de 2011 et les engagements internationaux du Maroc, aux termes des conventions auxquelles il a adhéré. Pour ce faire, les pouvoirs publics se doivent de faire preuve de courage et de volonté pour disposer d'une politique et d'une vision claires relatives à la justice criminelle pour les femmes. La refonte du code pénale et du code de procédure pénale doit donc viser à la protection des femmes. Elle doit porter essentiellement sur l'abrogation des dispositions et de la terminologie discriminatoires à l'égard des femmes, comme l'appelle dans ses memoranda la Coalition du printemps de la dignité. Elle a ensuite salué le retrait par le ministère de la justice de la loi 10/16 modifiant et complétant le code pénal et fait savoir que les peines alternatives posent problème dans leur application. Appliquées telles quelles, elles risquent de devenir un instrument entre les mains des violeurs et autres auteurs de violences à l'égard des femmes, qui ne seront condamnés qu'à des amendes, au lieu de purger des peines privatives de liberté. S'agissant de l'actuelle version de l'avant-projet du code pénal, elle est marquée aussi par l'esprit patriarcal qui caractérise la législation pénale dans son ensemble et qui n'accorde aucun intérêt à la femme, qui représente la moitié de la société. Pour Me. Khadija Rougani, il s'agit après tout de faire en sorte que la femme bénéficie au même titre que l'homme d'un traitement respectueux de sa nature au cours de toute la procédure judiciaire et in fine d'un procès équitable, qui permet notamment aux organisations de la société civile de prendre la défense des droits de l'homme de la femme sans ou avec le consentement de celle-ci, notant que la dernière version de l'avant-projet pose comme condition le consentement de la femme. Elle a souligné par la suite les imperfections de cette dernière version qui refuse aux femmes leur droit à la justice et à un procès équitable et qui comportent des dispositions qui desservent les femmes avant qu'elle ne plaide pour une meilleure justice pénale pour les femmes et leur droit à des procès équitables dans un Maroc de démocratie, d'égalité et de justice. Pour ce qui le concerne, Me Larbi Fanidi, membre du secteur des avocats du PPS a estimé que toute refonte du code pénal doit viser avant tout à mettre fin à l'ambiguïté du texte dans son ensemble. Il a ensuite donné sa propre lecture d'un certain nombre d'articles dont l'article 447 qui punit la publication de vidéos et de photos de personnes sans leur consentement, l'article relatif à l'avortement appelé aussi interruption volontaire de grossesse (IVG), qu'il importe de cesser d'interdire dans l'intérêt de la femme et de l'enfant dans de nombreux cas. Evoquant le cas des articles relatifs à l'infidélité conjugale, il a estimé que ceux qui appellent à leur abrogation ignorent peut être que dans quelque 90% des cas traités, c'est la femme et ses enfants qui sont victimes d'un tel comportement dont le champion est le mari. Il a fait état ensuite d'autres articles, qui doivent être améliorés dans l'intérêt de la femme et de la société en général, avant de souligner qu'il incombe en dernier ressort à la société de jouer pleinement son rôle en matière de sensibilisation et de de mobilisation pour une justice pénale gratuite pour les femmes et des procès équitables pour tous. Un riche débat a sanctionné les travaux de cette rencontre avec la participation d'un grand nombre de spécialistes et de défenseures des droits de l'homme de la femme. *** Plus de 24.000 cas de divorce par consentement mutuel en 2023 Un total de 24.162 cas de divorce par consentement mutuel ont été recensés au Maroc en 2023, a indiqué lundi le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, ajoutant que le nombre de cas de divorce révocable pour la même période a atteint 341 sur un total de 249.089 actes de mariage enregistrés. En réponse à une question orale à la Chambre des Représentants, lue en son nom par le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas, M. Ouahbi a souligné que son département a pris une série de mesures pour limiter la hausse des cas de divorce, notamment en sensibilisant à l'importance de la préparation préalable à la vie conjugale et en examinant les meilleurs moyens pour établir un système de médiation familiale au sein des services relevant de la justice de la famille, outre le renforcement du rôle des cellules d'assistance sociale dans la médiation familiale et la réconciliation entre époux. Le ministre a ajouté que le Code de la famille prévoit l'obligation d'entreprendre une tentative de réconciliation entre les époux, citant les institutions, entités et personnes auprès desquelles le juge peut demander assistance pour l'aider à entreprendre la réconciliation entre les époux. Il s'agit d'une procédure essentielle dans la justice de la famille que le législateur a confiée au juge dans le cadre des attributions qu'il lui incombe, a souligné M. Ouahbi.