Nabil EL BOUSAADI Les ministres des Affaires étrangères des Etats-Unis, de l'Inde, de l'Australie et du Japon se sont réunis le 29 Juillet dernier à Tokyo dans le cadre du QUAD (Quadrilateral Security Dialogue – Dialogue quadrilatéral pour la Sécurité), une alliance qui, au moment de sa création, s'était fixé comme objectif de contrecarrer la puissance grandissante de la Chine dans l'Indo-Pacifique. Pour l'histoire rappelons qu'après le séisme et le tsunami qui, en frappant l'Indonésie en 2004, avaient fait quelques 230.000 morts dans l'océan Indien, les Etats-Unis, l'Inde, l'Australie et le Japon qui avaient volé au secours des habitants de la région, avaient, dès le 26 Janvier 2004, envisagé de constituer une alliance mais ce n'est que trois années plus tard, qu'ils ont formé le « Dialogue Quadrilatéral pour la Sécurité », par abréviation QUAD, dont le premier acte important avait été un exercice naval commun qu'ils avaient effectué dans l'océan Indien. Né de la nécessité d'une coopération dans l'océan Indien après le tsunami de 2004 mais ayant rapidement sombré dans un profonde léthargie qui avait duré près d'une décennie, le QUAD n'avait été « réactivé », qu'en 2017, lors du sommet de l'ASEAN (Association des Nations de l'Asie du Sud-est), au titre de la mise en place d'un « diamant de la sécurité internationale » – autrement dit, une sécurité non seulement en or mais en diamant – qui, en reliant Washington, New Delhi, Tokyo et Camberra avait, immédiatement, donné lieu à l'émergence, dans les relations internationales, du concept géopolitique d'espace indo-pacifique. Pour rappel, si l'ASEAN est une organisation politique, économique et culturelle qui avait été fondée en 1967 à Bangkok, en Thaïlande, en pleine guerre froide, afin de favoriser la croissance et le développement mais, surtout, pour contrer l'émergence des mouvements communistes dans la région, la coopération entre les membres du QUAD avait commencé, de son côté, à se manifester par l'accomplissement de manœuvres militaires annuelles communes dites « Malabar » si bien qu'en sortant de sa prudence habituelle, l'Inde avait même signé, avec les Etats-Unis, des accords de sécurité portant sur le partage d'images satellitaires. Ainsi, à l'issue de leur rencontre du 29 Juillet dernier et dans une référence implicite à Pékin, dans une déclaration commune évoquant les multiples affrontements qui avaient eu lieu entre des navires chinois et philippins dans la zone contestée de la mer de Chine méridionale, les participants à ce dernier sommet du QUAD à Tokyo, ont exprimé leur profonde inquiétude quant à la situation qui prévaut en mer de Chine méridionale et appelé à une région Asie-Pacifique libre et ouverte. En profitant de cette occasion pour réitérer leur ferme opposition à toute action unilatérale qui viserait à modifier le statu quo, par la force ou par tout autre moyen de coercition, les membres du QUAD ont condamné les tirs de missiles déstabilisants de la Corée du Nord et exprimé leur vive inquiétude quant à la militarisation des territoires contestés et aux manœuvres de pression et d'intimidation qui ont vu le jour en mer de Chine méridionale. Mais, comme il fallait s'y attendre, ces déclarations ont soulevé l'ire de Pékin qui, par l'entremise du porte-parole de son ministère des Affaires étrangères, a, dès lundi, demandé à Tokyo et à Washington, notamment, de cesser immédiatement de s'ingérer dans ses affaires intérieures et de ne plus s'inventer des « ennemis imaginaires ». Sachant, enfin, que de nombreux observateurs craignent qu'avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, le QUAD ne se transforme en un simple forum de discussion et cesse d'être une force d'action décisive et une entité solide et influente apte à relever les défis régionaux, attendons pour voir... Nabil EL BOUSAADI