Ville stratégique dans la guerre au Yémen Les rebelles Houthis au Yémen, qui ont lancé en février une nouvelle offensive pour s'emparer de la ville stratégique de Marib (nord), s'en approchent peu à peu. Des centaines de combattant ont péri dans cette région en septembre à mesure que les combats s'intensifiaient. Voici des éléments clefs sur cette ville et sa région éponyme: Marib est le dernier bastion du gouvernement dans le nord du Yémen, majoritairement aux mains des rebelles. Si Marib tombe, les Houthis, soutenus par Téhéran, seraient désormais maîtres du Nord, ce qui pourrait faciliter leur avancée ailleurs. Marib a « une grande importance militaire » pour le gouvernement dans le Nord et reste un « symbole », souligne Ahmed Nagi, chercheur au Malcolm H. Kerr Carnegie Middle East Center. Désastreuse pour le gouvernement et son allié saoudien, la prise de Marib donnerait plus de poids aux Houthis en cas d'éventuelles négociations que l'ONU et les Etats-Unis tentent d'encourager. « L'issue de la bataille déterminera l'avenir du Yémen », a affirmé cette semaine le Premier ministre yéménite Maïn Abdelmalek Saïd, cité par l'agence de presse officielle Saba. Marib possède un énorme atout économique dans un pays très pauvre: la région est riche en pétrole et gaz liquéfié. Elle abrite l'une des deux raffineries du Yémen, créée en 1986 avec une capacité de production de 10.000 barils par jour à l'époque, selon le site internet du ministère yéménite du Pétrole. Dans un rapport publié fin 2019, le ministère a déclaré que sa production atteignait 20.000 barils par jour. Selon le gouverneur de Marib, Sultan Al-Arada, la production n'a pas été affectée par la guerre. La région fournit du gaz à tous les gouvernorats du pays, dont ceux sous le contrôle des Houthis, selon lui. Pour le chercheur Ahmed Nagi, l'ambition des Houthis à Marib est aussi de « contrôler les ressources ». Marib est située à environ 120 km à l'est de la capitale Sanaa, tenue depuis 2014 par les rebelles, et est reliée à cette dernière par une autoroute. La ville, considérée comme un carrefour nord-sud entre différentes provinces du Yémen, est également reliée via une autoroute au sud de l'Arabie saoudite. Ancienne capitale du royaume de Saba et entourée de montagnes et de vallées, Marib compte plusieurs sites historiques. Le contrôle de cette région renforcerait la position de négociation des Houthis dans d'éventuels pourparlers. Les dernières discussions de paix, tenues en Suède, remontent à 2018. Les deux parties avaient convenu d'un échange de prisonniers et avaient trouvé un compromis pour la gestion du port de Hodeida, principal point d'entrée de l'aide humanitaire au Yémen. Malgré l'accord pour un cessez-le-feu à Hodeida, des combats opposent régulièrement les deux camps. Depuis le début du conflit, des centaines de milliers de personnes se sont réfugiées dans la région de Marib, fuyant combats et cherchant à subvenir à leurs besoins, selon M. Nagi. Selon les autorités, 139 camps de déplacés abritent plus de deux millions de personnes ayant fui les affrontements à travers le pays, plongé dans la pire crise humanitaire au monde selon l'ONU. A Marib, l'escalade militaire menace gravement les civils, a averti l'organisation. De nombreuses personnes ont à nouveau fui à l'approche des combats. Les Houthis livrent une guerre acharnée aux forces loyalistes, qui incluent des tribus locales et sont soutenues par une coalition internationale menée par l'Arabie saoudite. Le gouverneur de Marib assure que le soutien aérien et logistique apporté par la coalition a joué un rôle clef. « Sans ce soutien aérien, la situation aurait pu être différente », avait-t-il déclaré en mars. Pour les Houthis, Marib est « une arène pour des forces étrangères d'occupation » et accueille des organisations comme Al-Qaïda, le groupe Etat islamique et les Frères musulmans. Selon M. Nagi, de nombreux combattants associés au parti Al-Islah, qui tire son inspiration des Frères musulmans, y combattent du côté des forces loyalistes.