Euro 2020 L'adieu sans gloire d'un Seigneur! Toni Kroos, l'élégant milieu de terrain allemand du Real Madrid, a annoncé qu'il prenait sa retraite internationale, trois jours après l'élimination de la Mannschaft en huitième de finale de l'Euro. « J'ai joué 106 fois pour l'Allemagne. Il n'y aura pas de nouvelle fois », écrit sur son compte officiel Instagram le joueur de 31 ans, champion du monde 2014. « J'avais déjà pris la décision d'arrêter après cette compétition. Il était clair pour moi depuis longtemps que je ne serais pas disponible pour la Coupe du monde 2022 au Qatar », ajoute le joueur aux 25 trophées chez les professionnels, dont quatre Ligues des champions (2013 avec le Bayern, 2016-17-18 avec le Real). Auteur de 17 buts en équipe nationale, il a été l'un des piliers de la génération dorée allemande des années 2010. Remplaçant en 2010 lors du Mondial en Afrique du Sud, il est rapidement devenu un homme de base du système de Joachim Löw: lors du triomphe au Brésil en 2014, il a joué les sept matches sans sortir une seule minute. Il a ensuite disputé tous les matches de l'Allemagne dans les grands tournois, demi-finaliste en France (2016), puis embarqué dans la catastrophe du Mondial-2018 en Russie, avec l'élimination au premier tour, et le semi-échec de l'Euro en cours. Ce joueur racé, doté d'une rare vision du jeu, capable depuis sa position repliée de passes décisives de 40 mètres, fut l'un des deux seuls avec le capitaine Manuel Neuer à survivre au naufrage russe. Alors que Khedira et Boateng ont été priés après la Russie de laisser la place aux plus jeunes et que Müller et Hummels ont connu une éclipse de trois ans avant d'être rappelés in extremis pour l'Euro, Joachim Löw a toujours maintenu sa confiance à Kroos. « Ce fut un grand honneur pour moi de porter ce maillot pendant une si longue période. Je l'ai fait avec fierté et passion », dit-il dans son message de départ, affirmant vouloir se concentrer désormais sur son parcours avec le Real Madrid et dégager du temps pour sa femme et leurs trois enfants. Dans une chronique intitulée « Kroos, le crack invisible », l'ancien joueur et directeur sportif du Real Madrid Jorge Valdano l'avait décrit au printemps de cette année d'une façon très juste: « (Il) donne le pouls à l'équipe, comme un marionnettiste », écrivait l'Argentin. « S'il est agressé, il joue court, s'il a une seconde il sert une passe de 40 mètres. Le tout à un rythme posé, comme un maestro qui enseigne comment jouer. Voir Kroos jouer est un spectacle à part ». Les spectateurs du Mondial au Qatar seront donc privés de ce spectacle, et ce n'est guère une surprise. En mars, Kroos est devenu l'un des rares footballeurs de haut niveau à oser ouvertement critiquer le pays du Golfe. « Je trouve que l'attribution du Mondial au Qatar n'était pas une bonne chose, pour plusieurs raisons », a-t-il lâché dans une épisode de son podcast, suivi par des dizaines de milliers de fans. « La première raison, ce sont les conditions des travailleurs », a-t-il dit « puis le fait que l'homosexualité soit pénalisée et punie au Qatar (…), et aussi que ce ne soit pas un pays de football ». Né deux mois après la chute du Mur de Berlin, dans le nord de ce qui était pour quelques mois encore la RDA communiste, le jeune Toni a été repéré à 12 ans par Hansa Rostock, le grand club de la région, avant d'intégrer à 16 ans le centre de formation du Bayern Munich. Le début d'un conte de fées dont un chapitre s'est refermé mardi, par une défaite à l'Euro 2-0 contre l'Angleterre.