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R. Filali Meknassi : Les pouvoirs publics pas engagés à la hauteur de la gravité du fléau
Publié dans Albayane le 12 - 07 - 2010

Le premier rapport annuel que vient de publier l'Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC) exprime les hésitations de la politique gouvernementale en matière de lutte contre la corruption, mais constitue un minimum acceptable, au vu de Rachid Filali Meknassi, Secrétaire général de l'Association marocaine de lutte contre la corruption –(Transparency Maroc) Pour contribuer à la lutte contre celle-ci, l'Instance devrait être une vraie agence dotée de vrais pouvoirs, rappelle le chef de file des militants pour la transparence et l'anti corruption. Le fonctionnement de l'ICPC donne à penser qu'elle est l'instrument qui va renforcer la politique de lutte contre la corruption, soutient Filali Meknassi. Et pour cause, le gouvernement n'a pas les moyens ou n'a pas la volonté de mener une politique de lutte contre la corruption. Dans cette première partie de cette interview, Meknassi exprime des impressions et réactions personnelles par rapport au dit rapport. Le parlement de l'association se réunira mardi prochain pour élaborer une réaction officielle.
Al Bayane: L'Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC) vient de dévoiler son premier rapport annuel 2009. Comment a-t-il été accueilli par Transparency Maroc ?
Rachid Filali Meknassi : Transparency Maroc a programmé une réunion des membres de son Conseil national, le mardi prochain, pour discuter de ce rapport. Nous avons veillé à ce que cette discussion ait lieu après la présentation de ce texte à l'opinion publique, pour éviter aux membres de TM qui sont membres de l'ICPC, toute gêne d'appartenance aux deux institutions. En réponse à votre question, je ne peux donc qu'exprimer des impressions et remarques strictement personnelles suggérées par une première lecture de ce rapport. Au niveau de la forme, on peut relever d'emblée que le rapport a été publié en ce mois de juillet pour l'année 2009, ce qui veut dire qu'il y a eu un certain retard dans son élaboration. En deuxième lieu, lorsqu'on parcourt le rapport, on ne se retrouve pas forcément par rapport aux attentes qu'on peut avoir à la lecture du décret instituant l'Instance. Selon les termes de ce texte, le rapport peut rendre compte des activités de l'instance seulement, ou bien couvrir l'ensemble de ses missions et faire ainsi l'état des lieux avant de décliner la stratégie et les perspectives. On relève notamment que parmi les missions fondamentales de l'ICPC, celle de proposer au gouvernement des politiques et une stratégie opérationnelle. Or, à la lecture du rapport, les prémisses d'une telle orientation n'apparaissent pas clairement. De même, d'après le décret l'instituant, l'ICPC a pour mission de suivre l'exécution des programmes et des actions du gouvernement dans la lutte contre la corruption. Mais on ne trouve pas non plus, dans ce rapport, un quelconque bilan de suivi de l'action gouvernementale en la matière. On peut donc s'interroger légitimement sur les fondements de ce premier rapport. Quelle perception en a l'ICPC ? Est-ce qu'elle considère que le rapport doit relater ses activités et une analyse du cadre institutionnel en vue de son amélioration ? Ou bien, admet-elle que le rapport doit rendre compte de l'état de la corruption au Maroc ? Dans cas, jusqu'à quel niveau le diagnostic peut-il aller ? Quelle articulation doit-il faire entre ce diagnostic, l'évaluation de la lutte contre la corruption et la formulation de propositions au gouvernement en la matière ? La première lecture de ce rapport ne permet pas d'apporter des réponses claires à ces questions de fond.
Mais le rapport a, quand même, le mérite de recommander des orientations stratégiques et 113 mesures pratiques couvrant tous les domaines concernés par la lutte contre la corruption, comme la justice, les marchés publics, la bonne gouvernance, l'accès à l'information, le blanchiment d'argent…
Oui, vous avez tout à fait raison. D'ailleurs, dans la plupart de ces mesures, observations et orientations, on retrouve parfaitement le travail de Transparency Maroc, celui du Collectif associatif de lutte contre la corruption et des autres composantes de la société civile. C'est pour cela que, sur le plan méthodologique, je considère que c'est une excellente synthèse des idées fondamentales qui existent dans la société pour une réforme des politiques publiques et pour l'instauration d'une politique de lutte contre la corruption.
A ce propos, on peut féliciter l'Instance pour la pertinence de beaucoup de mesures et propositions dont certaines constituent manifestement des contributions innovantes et des idées de progrès.
Ce n'est pas à propos des mesures préconisées que l'embarras du lecteur apparaît, mais plutôt sur leur articulation sur la pratique et la politique gouvernementales. Si nous plaçons le rapport dans le contexte actuel, sans remonter d'ailleurs jusqu'à l'année qu'il couvre, on constate que dans les semaines qui ont précédé sa publication, le Premier ministre a annoncé l'adoption d'un nouveau plan d'action gouvernemental en matière de lutte contre la corruption, à la suite des travaux d'une commission interministérielle présidée par le Ministère en charge de modernisation des secteurs publics.
On ne peut donc que ressentir l'impression qu'il y ait, d'un côté, l'instance qui présente un rapport qui formule des propositions sans passer au préalable par l'évaluation de la politique gouvernementale et, de l'autre côté, un gouvernement qui confie à une commission interministérielle l'élaboration de sa propre stratégie en la matière Paradoxalement, c'est auprès du Premier ministre qui annonce la mise en œuvre de ce plan d'action que l'ICPC a été instituée et c'est à lui qu'elle présente son rapport. Donc, on peut se demander si l'ICPC est une ONG qui travaille avec les idées de ses différentes composantes pour les présenter à l'opinion publique sous forme de rapport remis au Premier ministre, ou bien comme le dit son texte, elle constitue une instance publique qui travaille pour le gouvernement élabore pour son compte une stratégie en vue de son adoption en collaborant avec elle pour en faire le suivi et préparer à la lumière de ses conclusions les perspectives futures de la lutte contre la corruption. C'est en cela que je trouve que ce rapport sanctionne un travail similaire à celui de la société civile et on n'y retrouve pas les apports que suggèrent les attributions de l'ICPC, faisant d'elle une instance centrale chargée de préparer et d'évaluer l'action de lutte contre la corruption et de renforcer les rapports du gouvernement avec les différentes forces sociales concernées.
Vous portez un regard critique sur le travail de l'ICPC. Quelle évaluation faites-vous de son travail durant son année et demi d'existence ?
Au vrai, la critique s'adresse moins à l'ICPC qu'à la politique publique en matière de lutte contre la corruption.
Lorsqu' on lit son rapport, on devine qu'elle n'a bénéficié de la collaboration nécessaire pour aspirer à mieux. Elle n'a pas d'autonomie, son budget est ridicule et les entraves qu'elle subisse font qu'elle n'a pu dépenser que sa moitié. Elle gère des contraintes administratives lourdes en matière des ressources humaines alors qu'elle se doit de profiter de sa composition plurielle pour instaurer l'esprit de travail en commun et la collégialité sans laquelle sa démarche demeurera déconnectée de celle des pouvoirs publics, voire des aspirations de la société civile. Tout cela demande du temps, mais aussi un éclaircissement rapide des responsabilités de chacun. En se posant ces questions, on ne vise pas à critiquer le travail de l'ICPC, mais à vérifier le bien-fondé des appréhensions suscitées depuis son institution et exprimées par T.M à l'occasion de sa consultation au moment de l'élaboration du décret portant création de l'Instance.
A ce moment là, nous avons souligné que l'attribution de pouvoirs et de l'indépendance sont essentiels pour donner le crédit qu'il faut à une instance qui relève des pouvoirs publics et travaille pour la mobilisation de tous contre ce fléau. Son président déclare à mi-mots qu'elle a eu très peu de moyens et le premier ministre promet une autonomie plus grande pour l'ICPC. Les hésitations que l'on ressent à la lecture du rapport entre le constat et les propositions reflètent finalement celles de la politique gouvernementale : On ne peut pas dire, en présence du premier ministre, voilà les propositions de l'ICPC relatives à la politique gouvernementale de lutte contre la corruption lorsque celui-ci déclare une semaine auparavant qu'il a bouclé son programme de lutte contre la corruption pour la période 2010-2012.
C'est le premier constat que je fais à l'occasion de la publication du premier rapport de l'ICPC, en m'intéressant moins à la critique de son travail qu'à la compréhension du processus mis en place et à ses dysfonctionnements.
Mais l'ICPC a conscience des limites de ses prérogatives et recommande de les élargir. Pour avoir un vrai pouvoir, l'ICPC doit-elle avoir des prérogatives répressives et un pouvoir d'investigation ?
Tout dépend du volontarisme des pouvoirs publics. Dans l'absolu, si le gouvernement veut mener une politique sérieuse de lutte contre la corruption, il peut même la conduire à partir d'une commission intergouvernementale, mais en se chargeant lui-même d'exécuter ses orientations et d'en faire l'évaluation périodique, publique et formelle. Mais la lutte contre la corruption se conduit sur le long terme et doit gagner la confiance de la population ainsi que des opérateurs économiques qui sont en concurrence ouverte. C'est pourquoi les expériences les plus efficaces confient sa mise en œuvre à une agence dotée de tous les moyens y compris des moyens d'investigation, de poursuites et de transaction. . Mais la forme institutionnelle n'est pas une finalité en soi. On peut aussi, et les exemples en ce sens sont nombreux au Maroc, se doter de pouvoirs forts dans les textes mais qui sont quasi inexistants au niveau pratique. On peut avoir des pouvoirs de police administrative très étendus qui ne s'exercent pas en fait. La protection du consommateur, le contrôle pharmaceutique, la police de l'urbanisme…témoignent de ces situations. La solution n'est pas dans les textes ou dans les pouvoirs virtuels qu'on va reconnaître. Elle est dans l'engagement du gouvernement à appliquer une politique, à l'évaluer à en rendre compte et à l'améliorer en permanence. Nous avons l'exemple du plan gouvernemental de 2005 qui, depuis, n'a fait l'objet que de discours. Et puis, nous avons supprimé la Cour spéciale de justice (CSJ) pour confier la poursuite à des Cours d'appel en la matière, mais même les scandales qui sont révélés dans les rapports des cours de compte et des inspections continuent de faire l'objet de parties de ping-pong entre le ministre de la justice qui dit ne pas recevoir de rapports complets et les auteurs de ces rapports. Donner davantage d'autonomie à l'ICPC ne résoudra pas ces problèmes si le gouvernement n'a pas la volonté politique et les moyens de mener le minimum pour lutter contre la corruption. Le fonctionnement de l'ICPC donne à penser, comme nous le craignions, qu'elle ne constitue pas l'instrument efficace qui va renforcer cette politique. Non pas parce qu'elle est incapable de le faire, mais parce que les pouvoirs publics ne sont pas engagés selon le degré de la gravité du fléau. Et le constat que nous venons de faire, va dans ce sens là.


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