Partagés entre la joie de la qualification en finale du Mondial face à l'Uruguay (3-2) et l'attente d'une finale à jouer, les joueurs et les représentants des Pays-Bas sont désormais conscients qu'ils peuvent réussir un parcours historique. L'équipe possède enfin une somme d'individualités. Il y a donc les Néerlandais qui savourent la victoire sur l'Uruguay et ceux qui pensent déjà au futur adversaire, et rêve en douce de l'Allemagne, pour une revanche de la finale de 1974. Wesley Sneijder, plus que jamais leader de l'équipe se régale : «C'est une formidable performance, nous sommes à un match de la finale. J'ai joué et gagné la finale de la ligue des champions avec l'Inter Milan cette saison. Je dis à mes équipiers de savourer l'instant.» Arjen Robben, qui était en face de l'Inter Milan en Ligue des champions, s'y voit déjà : «J'ai perdu récemment une grande finale. Cela ne va pas m'arriver encore une fois. L'Espagne et l'Allemagne sont deux pays de football formidables. Si c'est l'Allemagne, j'aimerais gagner dix fois plus que si c'est contre l'Espagne. Car sinon je n'oserais pas revenir au Bayern la saison prochaine». L'Espagne c'est bien, l'Allemagne ce serait génial Au-delà de l'excitation, que l'on a même pu sentir dans les propos du directeur de la Fédération néerlandaise KNVB, Henk Kessler : «Quel match éprouvant pour les nerfs. (...] Maintenant, il faut effacer l'échec de 1974», ou de l'entraîneur Bert Van Marwijk : «L'Espagne se serait bien car nous jouons un peu comme elle. Mais l'Allemagne ce serait génial après la finale de 1974, c'est vrai», on peut sentir un groupe enfin soudé. Robben insiste sur les bonnes ondes du moment : «On sentait tout simplement que ça allait marcher. C'est un groupe tellement génial», et c'est confirmé par Dirk Kuyt : «Ce qu'il y a de bien avec ce groupe, c'est que nous acceptons les qualités mais aussi les défauts de chacun». Quand on pense qu'il y a peu Van Persie déclarait qu'il fallait remplacer Sneijder et pas lui, au premier tour... Les victoires effacent les mauvais souvenirs. Ecoutez encore une fois Van Marwijk : «Je suis très heureux, très fier, qu'un si petit pays, pas un petit pays de foot, mais un petit pays, arrive en finale, dit le sélectionneur. Nous avons commencé à travailler il y a deux ans. Ça été un processus long. Si vous croyez fort dans quelque chose... C'est quelque chose que nous avons ressenti, c'est difficile à expliquer. Mais je l'ai lu dans les déclarations des joueurs. Je leur ai dit de ne pas lâcher cette bonne atmosphère si près de la finale. Contre le Brésil, c'était déjà un peu comme ça. Nous avons pris des initiatives. A 2-1, nous avons pris vraiment confiance.» En 1974 et 1978, deux défaites traumatisantes Deux défaites et deux traumatismes pour un peuple néerlandais qui garde en travers de la gorge des revers jugés «injustes», respectivement face à l'Allemagne (1-2) en 1974 et face à l'Argentine (1-3) en 1978, à chaque fois contre le pays organisateur. L'équipe Oranje de 1974, emmenée par Johan Cruyff et coachée par Rinus Michels, invente le «football total» --tout le monde attaque, tout le monde défend-- et balaye tout sur son passage jusqu'en finale, donnant la leçon à l'Argentine (4-0) et au Brésil (2-0) au deuxième tour, avant de butter sur la RFA à Munich. Malgré un but de Johan Neeskens dès la première minute, les Néerlandais s'inclinent (2-1) devant le réalisme de Paul Breitner et Gerd Müller. En 1978 en Argentine, les Oranje entraînés par Ernst Happel portent l'étiquette de favoris, même si leur vedette Johan Cruyff, traumatisé par une tentative d'enlèvement, n'a pas fait le déplacement. Mais ils s'inclinent à nouveau en finale, après prolongation (3-1) face à l'Albicelste portée par le public du Stade Monumental de Buenos Aires. Dimanche prochain à Johannesburg, les hommes de Bert van Marwijk auront l'occasion de faire mieux que leurs prestigieux devanciers. Et d'ajouter un titre Mondial au sacre européen de 1988 décroché par la génération Van Basten-Gullit-Rijkaard. La presse néerlandaise jubile La presse néerlandaise a salué mercredi la qualification de son équipe nationale en finale de la Coupe du Monde après 32 ans d'attente. «LA FINALE», titre le quotidien populaire Telegraaf, en publiant l'image d'un lion rugissant, symbole national des Pays-Bas, et une photo du troisième but marqué par l'attaquant Arjen Robben. «Les Oranje sentent bon», ajoute le journal, avant de rappeler que «les Pays-Bas ont dû attendre 32 ans pour cela». «Enfin, des icônes pour notre génération de paresseux. Encore une victoire et les Oranje sont champions», se félicite pour sa part le quotidien NRC Next, en reprenant en Une une grande photo de l'attaquant du Bayern Munich, auteur d'un grand match. Le quotidien de gauche Volkskrant a choisi, quant à lui, une photo du capitaine Giovanni van Bronckhorst, auteur du premier but néerlandais d'une frappe des 35 mètres, sous le titre: «Les Oranje à nouveau en finale après 32 ans». De son côté, le journal Trouw espère que cette qualification au dernier stade de la compétition aide le pays à oublier le «traumatisme» des deux finales perdues en 1974 et 1978. Les Néerlandais tenteront maintenant de remporter leur premier titre mondial, dimanche au Soccer City de Johannesburg, contre le vainqueur de l'autre demi-finale, Espagne-Allemagne, disputée mercredi.