Le président de la commission spéciale de réforme du modèle de développement, récemment nommé par SM le Roi, a choisi un parterre de journalistes restreint appartenant à la presse écrite et digitale, pour faire sa première sortie médiatique. Dimanche après-midi, à son domicile, Chakib Benmoussa a communiqué sur sa stratégie de travail à la tête de cette commission, dont la composition sera connue, prochainement, par des nominations royales, sachant qu'il s'est fixé comme deadline le mois de juin 2020 pour remettre le rendu au Souverain. Durant près de trois heures, il a dévoilé ses intentions et sa conception du travail à accomplir pour réussir sa mission. Globalement, il a insisté sur le diagnostic existant, plus particulièrement les chantiers en cours qui réussissent mais aussi sur les faiblesses reconnues, sans pour autant s'y étendre, pour préconiser une action à long terme (avec une projection sur 10 à 15 ans), dans le cadre d'un référentiel national de progrès. Il a ainsi annoncé la philosophie et la méthodologie à suivre par ladite commission pour réussir le pari et affronter, avec succès, les énormes défis. Il a surtout insisté sur l'économique et le social, sans pour autant préconiser de solution. Le discours est fortement littéraire et technique, mais reste, cependant, assez alléchant par son approche participative, inclusive et hautement patriotique. Et ceux qui auront cette lourde tâche d'élaborer «le référentiel économique et social», le feront à titre de bénévoles et seront choisis parmi les meilleurs experts marocains, y compris ceux de la diaspora, a tenu à préciser l'ambassadeur du Maroc à Paris. L'on ignore, pour l'instant, si la commission Benmoussa sera assisté par des cabinets internationaux. En revanche, l'ancien ministre de l'Intérieur exclut la duplication de tout modèle existant. Et pourtant, l'on ne réinvente pas la roue. Les expériences des nouveaux dragons sont là et constituent une démarche dont il faudra tirer profit en matière d'enseignement pour les principales tares du modèle marocain épuisé que ces mêmes pays avaient connues auparavant. On pense à quelques pays d'Asie et d'Amérique latine qui avaient, il y a quelques décennies, un niveau de développement similaire à celui du Maroc dans des divers domaines sensibles. Dans son discours de cadrage, Benmoussa préconise des «ruptures» qu'il ne nomme pas et dont il a exclu le domaine de l'éducation auquel il faudra tout simplement «apporter des corrections au niveau de la loi-cadre» et «une nouvelle dynamique» à insuffler aux différentes actions. Or, de l'avis des experts, le nouveau modèle de développement marocain doit se baser sur une rupture avec l'existant notamment et en premier lieu dans le domaine de l'enseignement, avant toute autre action. L'ancien ministre de l'Intérieur se place «loin des doctrines économiques» et des «débats» en place pour limiter la réflexion les «réalisations» mais aussi les «faiblesses pointées du doigt par le Souverain». Il se veut aussi loin des schémas «éculés» et des «tabous», avec comme objectif d'apporter «des réponses rapides aux questions urgentes». Cependant, un brin de satisfaction pour les partis politiques. Les propositions de réformes déjà déposées, notamment par des partis, auprès du Cabinet royal, seront exploitées. Sur le plan pratique, Benmoussa a annoncé la mise en place d'une plateforme digitale pour «recueillir le maximum d'opinions et d'idées» afin que la démarche préconisée soit inclusive. Et une fois n'est pas coutume, il prône une certaine audace pour aborder des points de blocage. Il n'aborde pas, cependant, les principales résistances au changement préconisé, ni la pratique politique utilisée pour des raisons électorales de sorte à retarder le changement. Car il n'est nul besoin d'insister que la finalité de l'initiative royale est de relever trois grands défis urgents comme la réalisation d'une forte croissance et de l'emploi, une redistribution juste et efficace des richesses et enfin une réduction forte des inégalités sociales et spatiale. Nous espérons, souligne le président de la commission spéciale de réforme du modèle de développement, que cette structure puisse répondre, concrètement, aux exigences fixées par SM le Roi, émises lors de l'annonce de sa constitution. SM le Roi avait notamment déclaré : «Nous attendons qu'elle remplisse son mandat avec impartialité et objectivité en portant à Notre connaissance un constat exact de l'état des lieux, aussi douloureux et pénible puisse-t-il être. Elle devra être dotée de l'audace et du génie nécessaires pour proposer des solutions adaptées», avait notamment insisté le Souverain.