Suite à l'augmentation, au début de la semaine dernière, des prix des transports, la Centrale unitaire des travailleurs chiliens (CUT), la plus grande confédération syndicale du Chili, et 18 autres organisations avaient appelé à des grèves et des manifestations mercredi et jeudi à Santiago. Massés devant le palais présidentiel des milliers de manifestants scandaient «Le Chili s'est réveillé» en tapant sur des casseroles. Répondant à l'appel de la CUT, les syndicats de la santé publique ont également mené des actions de protestation devant le ministère de la Santé. La capitale du Chili, qui compte 7,5 millions d'habitants, étant donc devenue le théâtre de violents affrontements entre la population et les forces de l'ordre, le Général Javier Iturriaga, chargé d'assurer la sécurité publique, s'était trouvé contraint d'annoncer, à la télévision, l'instauration d'un cessez-le-feu de 20h (23 h GMT) à 6h (9 h GMT). Mais, après avoir annoncé, dimanche, que le Chili était «en guerre contre un ennemi puissant» alors que l'Institut National des droits humains (INDH), un organisme public indépendant, avait signalé qu'au terme de cinq jours de contestation 2.643 personnes avaient été arrêtées, 239 blessées et 15 décédées, le chef de l'Etat, a fini par reconnaître avoir fait preuve d'un «manque de vision» et par demander «pardon» à ses compatriotes. Adoptant alors un ton qui tranche radicalement avec celui qui fut le sien au début du mouvement de contestation, le président Pinera a décidé d'augmenter de 20% le minimum-retraite, de geler les tarifs de l'électricité et saisi l'occasion de cette annonce pour convier toutes les forces politiques du pays à entamer des discussions à l'effet de trouver une sortie à la crise. Mais l'appel présidentiel n'a pas rencontré un écho favorable auprès de toute la classe politique chilienne. Ainsi, le Parti Socialiste (PS), la plus importante formation politique d'opposition et celle qui avait pris les rênes du pays à trois reprises depuis la fin de la dictature en 1990, a opposé une fin de non-recevoir aux discussions qu'entend organiser le chef de l'Etat au palais de La Moneda. Rappelant que, d'une part, «le Chili, ce ne sont pas seulement les partis d'opposition mais aussi le monde social qui ne saurait être exclu de tout éventuel pacte social » et, d'autre part, que «si le dialogue est indispensable et urgent, il doit être ouvert», Manuel Monsalve, le chef du groupe socialiste au Parlement considère que «l'appel du président ne remplit pas ces conditions». Raison pour laquelle d'autres partis du Frente Amplio (Front large, Gauche) et de la gauche radicale, ont emboité le pas au PS en refusant de s'asseoir à la table des négociations. Mais s'il est, certes, vrai que c'est la première fois depuis la fin de la dictature du Général Augusto Pinochet (1973-1990) que près de 20.000 policiers et soldats sont déployés sur le territoire chilien et que l'état d'urgence est en vigueur aussi bien dans la capitale que dans neuf des seize régions que compte le pays, jusqu'à quand cette situation va-t-elle durer et de quoi demain sera-t-il fait? Attendons, pour voir…