Election présidentielle anticipée Plus de sept millions de Tunisiens inscrits sur les listes électorales sont appelés, ce dimanche, à se rendre aux urnes pour choisir le successeur de Béji Caid Essebsi, décédé le 25 juillet dernier, une deuxième fois dans un scrutin présidentiel libre, au résultat aussi bien ouvert qu'incertain. Considéré comme une nouvelle étape de la transition démocratique, cette élection anticipée a valeur de test pour le processus enclenché depuis 2011, ainsi que pour la solidité des institutions républicaines d'un pays qui a réussi sa mue au plan politique mais qui peine, depuis huit ans, à trouver des solutions efficaces pour faire face à l'hydre terroriste, remettre son économie sur la bonne trajectoire et apaiser des tensions sociales persistantes. De l'avis de nombreux observateurs, jamais l'issue d'une élection à la magistrature suprême n'aura été aussi imprévisible. C'est la première fois que les Tunisiens n'ont aucune idée de qui va être président, affirme, par exemple, le groupe de réflexion tunisien « Joussour ». Contrairement aux élections de 2014, ce scrutin n'oppose pas le camp dit « moderniste » à celui » islamiste », mais plutôt des candidats qui représentent une diversité de familles politiques, de profils indépendants, de personnalités issues de la société civile et de figures populistes. Cette nouvelle donne s'explique par un paysage politique, qui s'est éparpillé en plusieurs pôles représentant islamistes, laïques, populistes et partisans de l'ancien régime. Cet éparpillement trouve son pendant dans des familles politiques éclatées, des programmes parfois peu différenciés et des candidats dont très peu sont parvenus à séduire un électorat récalcitrant. En théorie, vingt-six candidats, dont un en prison, s'affronteront dimanche au premier tour de l'élection présidentielle, si l'on ne compte pas le désistement vendredi en fin de journée de deux candidats, Mohsen Marzouk du parti « Machrouu Tounes » et Slim Riahi d' »Al Watan Al Jadid », actuellement en exil en France, au profit du candidat indépendant Abdelkrim Zbidi, donnant, malgré tout, un signal clair sur la persévérance du pays sur la voie démocratique. Manifestement, ce scrutin constituant un test important pour la démocratie, devrait consacrer le principe de l'alternance pacifique au pouvoir tout en ouvrant la possibilité d'une éventuelle victoire d'un candidat clivant, à l'instar de Nabil Karoui, maintenu en détention. En effet, en dépit de l'effet négatif provoqué par les querelles politiciennes, la crise économique et les tensions sociales, les observateurs sont unanimes à souligner qu'il n'y aura plus de retour en arrière, que la liberté de parole est un acquis devenu presque irréversible et qu'il existe désormais une jeune génération qui n'imagine pas la vie autrement qu'en démocratie.