L'islam politique est un courant politique moderne qui peut être défini au sens le plus large comme celui qui promeut l'application des principes et valeurs islamiques à la société moderne. Au sein de ce mouvement islamiste, il existe de nombreuses divisions concernant non seulement la nature du projet sociétal islamique idéal, mais également la tactique et la stratégie appropriées pour le réaliser. Au niveau idéologique, les islamistes sunnites, toutes tendances confondues, partagent trois idées unificatrices fondamentales que nous allons démontrer qu'elles sont en flagrante contradiction avec le Coran et la Sunna: – Hakimiyyat Allah (le Royaume de Dieu, le règne de Dieu) est la première idée unificatrice fondamentale chez les islamistes qui signifie que l'islam n'est pas seulement une religion, mais aussi c'est un système juridico-politico-économique basé sur les lois divines révélées. Ces lois donnent aux législateurs musulmans un droit d'origine divine pour élaborer le projet de ce système islamique. – La deuxième idée unificatrice fondamentale est Al-walaa (اولاء) (ou allégeance, alliance, amour..) qui signifie, grosso modo, le devoir de tisser des liens avec les « musulmans » uniquement, et n'avoir aucun rapport avec les Kouffars. Les extrémistes islamiques exigent qu'on doive « couper tous les liens, tous les pactes, tous les accords, toutes les ententes et qu'on ne doive pas accepter les représentants et les ambassadeurs des Kouffars dans les pays musulmans pour s'entendre avec eux. Ils croient que les ententes commerciales, économiques, politiques et diplomatiques sont des formes de Walaa pour les Kouffars qui font sortir de l'Islam ou qui sont Haraam». – La troisième idée unificatrice fondamentale est al-baraa (البراء) ( ou désaveu, inimitié, haine..) qui exhorte les musulman(ne)s à détester les kouffars , à ne pas les imiter dans leurs pensées, coutumes , habillement….Donc, il n'est pas surprenant d'écouter des imams dire que "Féliciter les chrétiens pour Noël est pire qu'un meurtre" ou de se heurter à « l'affiche collée sur la vitrine d'une pâtisserie à Azrou, qui boycotte les fêtes de noël et du nouvel an, refusant ainsi de vendre des gâteaux pour ces deux occasions, signalant sur la pancarte que "ce sont des fêtes chrétiennes"», bien que Jésus de Nazareth soit un prophète si exalté par l'islam. Ayman Zawahiri a clairement décrit ces trois slogans dans son livre intitulé « Cavaliers sous la bannière du prophète » qu'il avait écrit comme son dernier testament peu de temps avant l'offensive terroriste du 11 septembre. Il écrivait à la page 327 ce qui suit : « Le but de la terreur islamique est donc d'établir un Etat qui appliquera la charia et se séparera complètement des infidèles – de leurs religions, leurs coutumes, leurs vêtements, leurs institutions, leurs sciences et leurs valeurs…. Malheureusement, ces trois slogans ne sont pas compréhensibles pour les masses de la Oumma, qui ne se sentent pas prêtes à se sacrifier pour des slogans qu'ils ne comprennent pas, même si les slogans sont cent pour cent correct ». Cependant, il écrit : » Il est clair que nos ennemis ne nous donneront pas tout le temps dont nous avons besoin pour éduquer la Oumma. » Sa réponse : « À nos slogans [énumérés ci-dessus], nous devons ajouter d'autres slogans, compréhensibles pour les masses de la nation islamique, et au lieu de les considérer comme ayant une importance secondaire, nous devons les faire avancer pour qu'ils prennent leur place au premier plan – au même niveau que les trois slogans originaux ». Les autres slogans supplémentaires de l'idéologie terroriste : «Le slogan selon lequel la nation islamique a bien compris depuis 50 ans, écrit-il, est le slogan de l'appel au jihad contre Israël». « Un autre slogan que Zawahiri prône est la libération des lieux saints islamiques en Arabie saoudite de la présence militaire américaine dans la péninsule arabique et à Jérusalem de la présence de l'armée israélienne. La libération de la Palestine n'est pas l'objectif central de l'idéologie islamiste, mais sa lutte aide les terroristes à recruter des musulmans pour le djihad contre les juifs et contre les «Croisés». Contrairement à la gauche, ils ne détestent ni l'impérialisme américain ni le sionisme, ils détestent les chrétiens et les juifs, non pas à cause de ce que les juifs et les chrétiens font aux musulmans, mais uniquement parce qu'ils sont chrétiens et juifs qui n'ont pas accepté la vraie foi, l'Islam. Ces slogans, théoriquement invalides et empiriquement fausses, ne peuvent être défendus et implémentés que par des anarchistes, des nihilistes et des partisans de la radicalisation et la violence. –Les terroristes sont des nihilistes : La genèse du nihilisme pourrait être reliée à l'effondrement des Lumières et du Romantisme. Les penseurs des Lumières ont suggéré qu'il existe un sens objectif de la vie qui peut être connu par la raison, alors que les romantiques ont suggéré qu'il existe un sens subjectif de la vie qui peut être senti par la passion. Le nihilisme commence par le désespoir et la négation devant ces deux projets et se heurte à la possibilité que la vie n'ait absolument aucun sens. Le sens est capturé par la sombre question de Fiodor Dostoïevski dans son roman «L'idiot» : Qu'arriverait-il si le Christ crucifié se révélait être un cadavre en décomposition ? Le principal philosophe du nihilisme est Friedrich Nietzsche. Il a distingué deux modes de nihilisme : le passif et l'actif. Le nihilisme passif se caractérise par un sentiment de vide et un manque de confiance en toutes les valeurs. C'est une sorte de névrose où rien ne vaut la peine d'être fait. Le nihilisme actif, quant à lui, consiste à tenter de détruire de manière affirmative des valeurs existantes considérées comme arbitraires ou fausses, afin que de nouvelles valeurs, peut-être plus vraies, puissent émerger. Dans son article, PSYCHANALYSE, VIOLENCE ET SOCIETE, Robert C. Colin distingue cinq formes de nihilisme et nous nous en contentons de citer deux : -La première réaction à la pénible épreuve de désillusion est que l'homme plonge dans le vide et la déréliction. L'homme s'assimile passivement au néant, devient ce moins que rien qui ne ressent rien d'autre que le vide de sa propre existence dans le monde. -La deuxième réaction le transforme en un homme qui n'accepte pas d'éprouver la souffrance passivement, mais de se rebeller activement, de devenir un nihiliste actif de la terreur, un nihiliste ressuscité par les forces de la rage de la criminalité meurtrière. Ainsi, les groupuscules terroristes intensifient-ils leurs activités au sein des quartiers pauvres, les prisons et les milieux précaires pour recruter les jeunes déracinés, passifs ou actifs dans la criminalité et souffrants, et ils les endoctrinent tout en leur offrant une construction narrative islamiste de leur nihilisme. C'est pourquoi la majorité des terroristes ressentent un malaise social, une identité culturelle conflictuelle et un vide idéologique, et la moitié d'entre eux présente un passé criminel. Vers une relecture de notre héritage islamique.