Dialogue social, compensation, Registre social unique (RSU), autant de dossiers sur la table d'un gouvernement sous pression et attendu au tournant pour une rentrée sociale qui s'annonce pour le moins cruciale au lendemain du discours du Trône qui a tracé une feuille de route pour accélérer les grands chantiers sociaux. Il suffit de parcourir la note de cadrage relative au projet de loi de finances (PLF) 2019 élaborée par le Département du chef du gouvernement pour constater l'importance accordée par le gouvernement à la mise en œuvre des programmes sociaux. Publiée mi-août, cette note de cadrage énumère les quatre priorités PLF-2019, à savoir « la priorisation des politiques sociales et des programmes de protection sociale, l'accélération du processus du dialogue social et l'appui du pouvoir d'achat des citoyens, la poursuite des grands chantiers et des stratégies sectorielles en vue de garantir les conditions de décollage économique et le soutien à l'investissement et à l'entrepreneuriat, outre la poursuite des grandes réformes ». Pour les centrales syndicales, septembre s'annonce sous de bons auspices. Tout porte à croire à une reprise imminente du dialogue social après une période de disette. Le dialogue social avait été institué à compter d'août 1996, à la lumière d'une déclaration commune entre le gouvernement, les centrales syndicales et le patronat ayant déterminé des règles bien définies pour les négociations, à raison de deux sessions par an (avril et septembre), et ayant permis la conclusion de 4 accords (1996, 2000, 2003 et 2011). Requinqués par la teneur du discours du Trône, dans lequel le Souverain avait invité le gouvernement à instaurer et maintenir le dialogue social «dans la durée et sans aucune interruption», les syndicats, le gouvernement et la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) sont appelés plus que jamais à faire preuve d'un esprit de responsabilité pour avancer vers des résultats concrets. Principale revendication des syndicats, la hausse des salaires. Fin avril, le gouvernement dirigé par Saâd Eddine El Othmani avait avancé une offre chiffrée à 6 milliards de dirhams (MMDH). Cette offre comprenait une batterie de mesures importantes, dont une partie concerne l'augmentation des salaires des fonctionnaires dans les échelons de 1 à 5 de l'échelle 10, de quoi améliorer le revenu de plus de 700.000 fonctionnaires, dont 120.000 au niveau des collectivités territoriales. L'autre mesure proposée par le gouvernement portait sur l'augmentation des allocations familiales au profit de quelque 380.000 fonctionnaires, hormis les salariés des collectivités territoriales et des établissements publics, pour une enveloppe de près de 1 MMDH. Ces mesures ont été rejetées de manière catégorique par les syndicats qui revendiquent une hausse généralisée des salaires. S'agissant de la question épineuse de la Caisse de compensation, le Chef du gouvernement avait récemment écarté tout retour éventuel vers la subvention des hydrocarbures, soulignant à ce propos que la libéralisation est irréversible. Pour le gouvernement, l'enjeu est de garder la libéralisation tout en sauvegardant le pouvoir d'achat, notant que le mixage entre ces deux objectifs constitue le sujet de fond des discussions actuelles au sein de l'Exécutif. Il est aussi en train de réfléchir à un processus de décompensation surtout du gaz butane, sans pour autant affecter le pouvoir d'achat des citoyens, de la classe moyenne et des couches vulnérables. Le Registre social unique (RSU), initiative phare du discours du Trône, est une autre question capitale sur laquelle le gouvernement est attendu de pied ferme. En effet, le Souverain avait souligné que cette initiative constitue « un début prometteur, susceptible d'induire un accroissement progressif du rendement des programmes sociaux, à court et à moyen termes », notant que la portée de cette initiative sociale dépasse de loin le cadre d'un programme gouvernemental pour un seul mandat et va au-delà d'une vision attribuée à un département ministériel, à un acteur partisan ou à un acteur politique. «Ce Registre est un système national d'enregistrement des familles qui pourront bénéficier des programmes d'appui social. Les ménages habilités à jouir des prestations de ce régime seront déterminés selon de rigoureux critères objectifs et grâce aux nouvelles technologies», a expliqué le Souverain. La réaction du gouvernement ne s'est pas faite attendre. Le 27 août, le ministère de l'Intérieur et l'Institut international de technologie de l'information de Bangalore (Inde) signaient, à Rabat, un mémorandum d'entente pour la conception et le développement d'une plateforme logicielle open source modulaire dénommée « MOSIP », qui constituera le noyau du système de gestion du Registre national de la population (RNP) en cours de mise en œuvre par le gouvernement. Le Registre national de la population assurera au profit du RSU la fiabilité des données d'identification et les services d'authentification des bénéficiaires des programmes sociaux. Face donc à une situation marquée par l'enchérissement du coût de la vie, la stagnation des salaires et le chômage – situé à hauteur de 9,1% selon la dernière note du Haut-commissariat au plan en la matière- il est évident que le gouvernement devra faire preuve d'une cohésion et d'une détermination sans faille pour exécuter les hautes orientations royales et répondre aux aspirations légitimes d'une population qui attend impatiente des mesures concrètes et urgentes pour consolider les acquis sociaux.