Combien sont les joueurs à pouvoir faire se lever tout un stade adverse? Pas plus d'une poignée et Cristiano Ronaldo en fait désormais partie, salué par le public du Juventus Stadium époustouflé par un retourné de rêve et sa performance monstrueuse, mardi lors de la très nette victoire 3-0 du Real Madrid en quart de finale aller de la Ligue des champions. L'histoire de ce quart de finale est déjà écr.wite, il n'y aura pas de revanche de la dernière finale de Cardiff (4-1) et le match retour au Bernabeu, le 11 avril, relèvera de l'anecdote, même avec Sergio Ramos suspendu. Mais à Turin, on se racontera pendant très longtemps la bicyclette de Ronaldo. L'affaire s'est jouée à la 64e minute et le Real menait déjà 1-0 grâce à un but de… Ronaldo d'entrée de jeu (3e) face à une défense turinoise terriblement passive. Le N.7 merengue s'est élevé au beau milieu de la surface de réparation et a réussi le geste parfait, celui dont rêvent les enfants, une bicyclette limpide qui a fini dans le petit filet de Buffon. Barzagli a levé les épaules, l'air de dire « que voulez-vous qu'on fasse », Zinedine Zidane, qui en a vu d'autres, s'est frotté le crane incrédule et les 40.000 tifosi de la Juve se sont levés et ont applaudi. Le match était bouclé et il n'y avait que ça à faire face à l'évidence du talent du Portugais, qui a salué, un peu ému. S'il n'y a qu'un seul regret à avoir, c'est que ce but fantastique soit arrivé après un invraisemblable cadeau de la défense de la Juve avec une horrible mésentente entre Chiellini et Buffon. Pour faire bonne mesure, Ronaldo a ensuite agrémenté son doublé d'une passe décisive à Marcelo pour le but du 3-0 (72e), inscrit à un moment où la Juventus était réduite à 10, Dybala ayant été expulsé pour deux avertissements (simulation et pied haut) au bout d'une performance à nouveau trop faible pour un joueur de son talent. Si l'on ajoute à ces trois buts les deux barres transversales trouvées par Kroos puis Kovacic, on aura une idée plus nette encore de l'ampleur de la correction, pire encore que celle de Cardiff, ce que Buffon avait pourtant estimé impossible. Mais les Turinois, privés de Pjanic et Benatia suspendus, ce qui s'est senti, n'ont vraiment pas fait assez pour croire en leurs chances au-delà de l'heure de jeu. Dès l'ouverture du score, la liste des coupables bianconeri est presque trop longue pour être énoncée, avec tout le côté droit Douglas Costa-De Sciglio piégé par Marcelo et Isco, puis Bentancur, et enfin la charnière Chiellini-Barzagli, devancée dans un duel de trentenaires par Ronaldo, infiniment plus explosif. Ce début de match a été celui d'Isco, préféré par Zidane à Bale et qui a joué 30 minutes de magicien, allant un peu partout, là où il le voulait, mais curieusement toujours au bon endroit. La Juve, elle, perdait trop vite le ballon. Et tout ce qu'elle faisait presque parfaitement, le Real le faisait mieux. A la Juve, il y a parfois un contrôle un peu long, une passe un peu forte. Au Real, non. Quelques joueurs y ont mis de la personnalité, pourtant, comme Higuain ou les habituels remplaçants Asamoah ou Bentancur, mais avec leurs limites. Ronaldo lui n'en a aucune. Les chiffres de sa saison donnent le vertige, avec 14 buts en Ligue des champions et une série de dix matches d'affilée avec au moins au but dans la plus grande compétition de clubs du monde, les neufs matches de cette saison plus la finale de Cardiff. Et face à Buffon et à la Juventus, il en est à neuf buts en carrière. Turin a apprécié le spectacle, Turin s'est levé pour le champion, mais maintenant, Turin a peut-être assez vu Ronaldo. Pour les autres, le spectacle continue.