Dans le cadre du Festival culturel de la ville de Casablanca, la Fondation du patrimoine culturel judéo-marocain a organisé mercredi 21 février, en partenariat avec le Conseil de la ville et l'Association des anciens élèves du Grand Casablanca, une journée d'étude sous le thème «la contribution de la composante juive à la mosaïque culturelle marocaine : empreinte amazighophone». Cette journée, qui s'est déroulée au Musée du judaïsme marocain à Casablanca, était l'occasion de braquer les lumières sur l'apport des communautés Juives amazighophones à l'enrichissement de la mémoire collective et plurielle marocaine. «J'aimerais bien insister sur le terme ‘Amazighophone' pour corriger ce qui se dit. La journée est née dans le cadre de la deuxième édition du Festival culturel de Casablanca-Settat. Cette année, le musée participe à ce festival pour témoigner de son ouverture sur l'environnement socioculturel», nous indique Zhor Rehihil, conservatrice au Musée du Judaïsme Marocain. Le thème, «la contribution de la composante juive à la mosaïque culturelle Marocaine : empreinte amazighophone», est une occasion pour approfondir le débat sur la question de la marocanité. «Ce qui est essentiel, c'est le fait que nous appartenions au Maroc, et ce, en préservant son identité plurielle, parce que différentes composantes ont contribué à l'enrichissement de sa culture et de sa civilisation», a-t-elle déclaré. Et d'ajouter : «on appartient à une grande culture riche et une civilisation qui a été alimentée et enrichie par la religion et la civilisation musulmanes, par la civilisation et la langue arabes ainsi que l'apport andalou, méditerranéen, juif, africain». Pour Hassan Aourid, la préservation ne devrait pas être finalement le propre ou la responsabilité d'une seule composante. « Parfois, nous limitons le développement aux biens matériels. Mais il s'agit aussi des biens immatériels ou encore ce qu'on appelle le capital immatériel», a-t-il expliqué. Dans ce cas, il est nécessaire de préserver la mémoire, qu'elle soit matérielle ou immatérielle et dont fait partie la dimension juive. «Il ne faut pas finalement circonscrire ou sectionner cette mémoire. La mémoire marocaine est Une. Qu'il y ait à un moment, des juifs qui s'intéressent au patrimoine juif, cela se conçoit, mais ce n'est pas uniquement l'affaire des juifs ou de Marocains de confession juive», a-t-il fait savoir. De son avis, nous avons parcouru un chemin, mais le plus gros reste à faire. «Tout cela devrait à mon sens répondre à une question primordiale : qu'est ce que la marocanité ? Les sociétés évoluent et nos définitions devraient évoluer, en conséquence », a t'il conclu. Quant au chercheur, Yossi Chetrit, il estime que cette mémoire n'a pas été exploitée parce qu'elle est une mémoire avant tout orale. «C'est une mémoire que je nommerai existentielle parce que dès que l'existence n'est plus là, cette mémoire disparait», a-t-il affirmé. C'est comme des bibliothèques qui disparaissent avec la mort des rwayess et des porteurs de grands répertoires musicaux, a-t-il ajouté. «Notre rôle en tant que chercheurs, c'est de recueillir ces témoignages pour écrire des livres et immortaliser cette mémoire afin d'expliquer ce métissage des cultures et des civilisations», poursuit-il. Pour lui, il ne s'agit pas d'une coexistence, mais plutôt d'une «covivance». Dans ce sens, il a évoqué «Dakhdoukhin», des musulmans qui aimaient beaucoup la dafina de Chabbat et qui ne pouvaient pas s'en passer ou encore le gateau de la Mimouna avec les galettes juives que le musulman ne pouvait pas préparer et la grande omelette (Mhmamer). «Les premiers juifs qui sont revenus au Maroc étaient des juifs amazighophones. Ils sont allés voir leurs amis. Ils ont apporté avec eux des tonnes de casettes d'ahwach et de tachlhit», a-t-il indiqué. Lors de cette rencontre, l'ouvrage «les Maisons de la vie» a été présenté par Serge Berdugo au public, ainsi que le documentaire «Y ahasra douk liyam».