Les Chambres Africaines Extraordinaires (CAE) qui avaient jugé l'ex-président du Tchad Hissène Habré, 74 ans, pour «crimes de guerre», «crimes contre l'humanité» et «crimes de torture» ont confirmé, en appel, ce jeudi 27 Avril 2017, la condamnation à la réclusion à perpétuité prononcé à son encontre en Mai 2016 et ce, après qu'une commission d'enquête tchadienne ait estimé à 40.000 les victimes de la répression sauvage qu'il avait fait subir au Tchad durant ses huit années au pouvoir (1982 à 1990). Il convient de préciser, par ailleurs, que, d'une part, la mise en place des Chambres Africaines Extraordinaires (CAE) résulte d'un accord conclu entre l'Union Africaine et le Sénégal où l'ancien président tchadien s'était réfugié après son éviction en Décembre 1990 par l'actuel président tchadien Idriss Déby Itno et que, d'autre part, c'est la première fois qu'un ancien chef d'Etat est traduit pour «violations présumées des droits humains» devant une juridiction relevant d'un pays tiers. Il s'agit, également, du premier procès tenu en Afrique en application du principe de compétence universelle pour montrer que le continent noir est à même de juger ses enfants et pour mettre un terme aux griefs reprochant à la Cour Pénale Internationale dont le siège est à La Haye de «ne poursuivre que des dirigeants africains». Et si l'ancien chef de l'Etat Tchadien a été acquitté d'une accusation de viol, la Cour aurait, cependant, ordonné, selon l'avocate des parties civiles, que 82 milliards de Francs CFA (plus de 125 millions d'Euros) soient alloués au dédommagement de près de 7.400 victimes. Mais s'il est convenu que cette indemnisation se fasse par l'entremise d'un fonds spécialement créé, à cet effet, par l'Union Africaine, l'alimentation de ce fonds pose problème selon une des avocates des parties civiles. Défendu par trois avocats commis d'office par le tribunal, Hissène Habré, n'accordant aucune légitimité à la juridiction devant laquelle il a été appelé à comparaître, a refusé, tout au long de ce procès, de s'exprimer ou même d'être représenté et ce, alors même que ses avocats ont réclamé une annulation de sa condamnation et dénoncé haut et fort des erreurs qui ont affecté la validité du jugement prononcé à l'encontre de leur client avançant même qu'«aucune démonstration de sa culpabilité n'a été faite» et que la Cour s'est contenté de donner «des réponses évasives». Enfin, l'issue de ce procès a été saluée par Amnesty International qui considère qu'elle «marque une étape importante dans la longue et déterminante quête de justice des victimes» et par le juriste américain Reed Brody qui considère qu'elle «représente une immense victoire pour les victimes tchadiennes» dès lors qu'elle signe la fin de l'impunité et de cette ère durant laquelle des «tyrans pouvaient brutaliser leur peuple, piller les richesses de leur pays et s'enfuir à l'étranger pour profiter d'une vie de luxe».