Al Bayane :Quelle est votre réaction et votre lecture sur la conférence de presse donnée à Smara par Mustapha Ould Salma Sidi Mouloud, inspecteur général de la police du Polisario. Ne pensez-vous pas que ce genre d'initiative créera une dynamique entre le Maroc et les séquestrés de Tindouf ? R. Taoujni : Il faut savoir que les séquestrés de Tindouf n'ont aucune liberté d'opinion ni de circulation. L'initiative de Sidi Mouloud est salutaire. Néanmoins, il faut la prendre au conditionnel, dans le sens que nous ne savons pas ce que sera la réaction du régime algérien et son allié le Polisario. Les développements de la situation démontreront clairement les vraies visées du Polisario et son allié. A mon avis, l'inspecteur général de la police du Polisario court le risque d'être arrêté s'il retourne à Tindouf. Quel bilan faites-vous pour ce qui est des visites familiales entre séquestrés de Tindouf et leurs familles dans leur patrie, instaurées sous l'égide des Nations unies ? Le bilan en lui-même est positif. Ceci permet aux prisonniers de Tindouf de voir leurs familles et leur pays. Par contre, leurs enfants sont souvent utilisés comme moyen de chantage, dans le sens où ces derniers restent dans les camps pour garantir que les personnes qui bénéficient de ces visites retournent aux camps. Quelle analyse faite-vous de la situation désastreuse des droits de l'homme dans les camps de Tindouf ? Quelle est selon-vous la stratégie à adopter pour remédier à cette situation ? Les camps de Tindouf sont une grande prison à ciel ouvert contrôlée par des dictateurs. S'il y'a un problème c'est bien à notre niveau. En d'autres termes, le Maroc n'a jamais réussi à faire véhiculer ni à faire connaître à l'opinion publique, l'ampleur de la catastrophe humanitaire vécue dans les camps de Tindouf. Aussi, il n'y a jamais eu de commission européenne ou américaine qui s'est déplacée dans ces camps, mis à part, celles pros-Polisario. Nombreuses voix s'élèvent notamment parmi les ONG et organismes internationaux, afin de dénoncer le détournement des aides humanitaires, destinées à la base, aux séquestrées de ces camps. Quelle est l'envergure de ces détournements et comment peut-on agir pour mettre fin à ces pratiques inhumaines? Ce n'est plus un secret aujourd'hui, beaucoup de produits alimentaires destinés à la population séquestrée à Tindouf, sont écoulés dans les marchés noirs algériens. Malheureusement nous n'avons pas fait grand-chose pour mettre un terme à cette situation. Notre pays défend les droits de l'homme et dénonce ces pratiques frauduleuses et criminelles. Néanmoins, nous n'arrivons pas à dépasser ce cadre purement revendicatif. Notre pays n'a pas encore de stratégie bien définie à l'instar du Polisario et du régime algérien qui manœuvrent de manière précise et bien structurée pour s'attaquer à notre pays. L'Etat a légué les choses aux associations de la société civile, dont quelques unes d'entre elles disparaissent peu de temps après leur création après avoir réalisé les objectifs « financiers » qui ont été tracés par ses dirigeants. Nous devons sortir de cette vision purement lucrative pour nous pencher sur les vrais problèmes qui se posent ou qui pourraient se poser à l'avenir.