L'année 2011 a été marquée, au niveau du monde arabe, par des soulèvements populaires qui ont balayé, dans quelques pays, des pouvoirs qui sont restés, pendant assez longtemps, muets et aveugles, face aux nombreuses attentes sociales et politiques. Aujourd'hui, les révolutions arabes, avec l'histoire qui s'accélère, font face à de cruciaux défis et la pratique démocratique peine à trouver son chemin, qui s'expliquent, entre autres, par les énormes déficits démocratiques et le manque d'encadrement politique responsable. Dans ce sillage, l'année que nous quittons ce samedi a connu, au Maroc, des changements majeurs et substantiels, dont le cadrage a été fait par le discours royal du 9 mars 2011 qui a constitué une véritable feuille de route pour les réformes à introduire pour satisfaire les attentes des citoyens et leur redonner confiance dans les institutions malmenées par certaines pratiques décriées par les premières manifestations ayant suivi les bouleversements dans le monde arabe. Ce discours fait désormais date dans l'histoire du Maroc contemporain et représente une réponse claire et mesurée aux revendications sociales et politiques. Les concertations autour du projet de référendum constitutionnel ont été marquées par une démarche consensuelle sans précédent. Les mécanismes politiques, s'y rapportant, ont suivi le même esprit, avec une large participation et implication de tous les courants politiques. Il faudra relever, avec regret, que quelques segments très minoritaires ont préféré la politique de « la chaise vide » et tenté de semer le doute pour faire croire que «les jeux sont faits d'avance». Cela n'a pas empêché que, lors du référendum du 1er juillet, une nouvelle Constitution aux contenus politiques, démocratiques, socio-économiques et culturels avancés, a été adoptée à une majorité écrasante des citoyennes et des citoyens. Et pour cause, la nouvelle Constitution a revu profondément les rapports entre les différents pouvoirs, avec un chef de gouvernement qui veille sur l'Exécutif et partage les pouvoirs du Roi, à l'exception du champ religieux et des domaines impliquant la souveraineté de l'Etat. La Constitution a également consacré l'alternance démocratique qui donne la «Primature» au premier parti politique arrivé en tête des élections. Parallèlement, le nouveau texte a conforté la parité homme/femme, la jeunesse, le tissu social, les droits citoyens, régionaux et culturels. L'amazigh est hissé au rang de langue officielle et tous les versants historiques du Maroc sont reconnus à leur juste valeur, sans aucune omission. A cela, il faudra ajouter la constitutionnalisation de nombreux droits démocratiques et le renforcement des droits de l'opposition et son rôle dans la législation. Le deuxième grand événement de l'année 2011 est, sans conteste, le scrutin législatif du 25 novembre 2011, qui a donné vainqueur le Parti de la justice et du développement. Ce scrutin, de l'avis général des observateurs des élections marocains et étrangers, a constitué une nette avancée par rapport au passé. S'inscrivant dans le cadre des réformes évoluées introduites par la Constitution et les lois organiques qui en ont découlé, les dernières élections ont réduit drastiquement certaines pratiques, objet de contestation tant par la classe politique, notamment son pôle moderniste et démocratique. L'interdiction de la transhumance politique, le vote uniquement par la carte d'identité nationale, la liste nationale des femmes et des jeunes de moins de 40 ans (90 membres à la Chambre des représentants, etc. sont autant d'éléments nouveaux qui ont stoppé, dans une certaine mesure, la dépravation des élections. La campagne électorale, elle, a été placée sous le signe de la lutte contre la dépravation politique, électorale, sociale et économique. Elle était, globalement, plus propre que les précédentes. La vox populi a choisi le Parti de la Justice comme nouvelle alternative, face à la baisse du rythme du changement et à l'absence d'une nouvelle génération de réformes. Et si les partis de la Koutla démocratique ont résisté au « raz-de-marée » du PJD, l'électorat s'est prononcé clairement pour donner une chance à la formation d'Abdelilah Benkirane. Et pour répondre aux revendications exprimées par le peuple, le PJD a fait appel à la Koutla démocratique afin d'assurer la concrétisation des réformes démocratiques et la satisfaction des pressentes doléances citoyennes. Malheureusement, cette alliance démocratique a divergé sur la participation au gouvernement Benkirane. Aujourd'hui, les grands défis sont connus et la coalition gouvernementale est attendue dans de nombreux domaines où elle doit apporter des solutions concrètes. Des signaux forts devront être donnés afin de convaincre les citoyens que la lutte contre la dépravation politique, économique et sociale soit une priorité et un chantier qui tiennent à cœur au nouveau gouvernement. Un tel changement tire sa valeur du degré de la traduction des contenus de la Constitution dans la vie quotidienne des larges couches des citoyennes et des citoyens. Cela passe, avant tout, par un réel combat contre l'économie de rente, et une répartition équitable des richesses pour répondre, positivement et à brèves échéances, aux attentes générales du peuple.