Abdelouahed Souhail : ministre de l'emploi et membre du BP du PPS : «La thèse de feu Aziz Blal est toujours de mise» : La Constitution 2011 est l'illustration d'un véritable sursaut démocratique. Ce document constitutionnel tout en érigeant de nouveaux pouvoirs, a instauré en parallèle de nouveaux droits, tout en renforçant le rôle de la société civile et le principe de la bonne gouvernance. A cela s'ajoute aussi la reconnaissance du caractère pluriel de l'identité marocaine, en donnant à l'amazighité sa place qu'elle mérite. Toutefois, il faut souligner qu'on est encore dans une phase de transition démocratique. Dans la foulée de ces avancées, on assiste à l'émergence d'une forte demande sur la démocratie, au sens large du terme : politique, économique et sociale La question qui se pose, c'est comment traiter ces demandes sociales, dans un contexte international de crise sans précédent. C'est la première fois depuis 1929 que la planète compte plus de 200 millions de jeunes sans emploi dont l'âge est de moins de 35 ans. Dans le cas du Maroc, comment répondre à ces attentes ? Sachant bien que ces attentes diffèrent d'une classe sociale à l'autre. La réponse ne peut être apportée qu'à travers des choix politiques (libéralisation ou nationalisation). La mise en pace de ces choix devrait être effectuée via des politiques de programmations opératoires. Certes, ces politiques ne vont pas toujours de pair avec ces attentes sociales. Cela dépend de plusieurs facteurs (financement, catégorie sociale ciblée, législation, organisation territoriale, environnement international, etc.). Il y a lieu de préciser que ces politiques doivent être conduites par des responsables qui sont tenus cette fois-ci de rendre compte de leurs actes. Il s'agit d'un système où chaque acteur à une part de responsabilité dans l'élaboration de ces politiques: presse, société, Etat... C'est un processus complexe. Il faut reconnaitre, par ailleurs, que notre économie nationale demeure encore fragile. Sa dépendance de l'Europe s'explique par le fait que le Maroc a fait le choix de l'ouverture économique. Sauf qu'on n'a pas déployé beaucoup d'efforts pour renforcer notre compétitivité et élargir l'offre marocaine à l'export. Je crois que la thèse de l'économiste feu Aziz Blal sur l'investissement et le développement économique est toujours de mise pour en tirer la leçon : le développement de l'infrastructure devrait être,...normalement, accompagné par le développement de la structure productive, sinon on finira par créer un hiatus énorme entre le marché intérieur et le marché à l'export. Autrement dit, le développement économique est tributaire du développement de l'offre d'exportation du royaume. Et c'est dans ce sens que le gouvernement doit agir. Abdel Ahad El Fassi : membre du BP du PPS : «Une ingénierie de la réforme s'impose» Au moment où le peuple marocain émet des attentes économiques, politiques, sociales, notre économie nationale accuse un déficit à plusieurs niveaux (budget de l'Etat, charges de la caisse de compensation, déficit commercial, baisse des investissements...). Il s'agit donc des défaillances macro-économiques qui sont multiples. Comment va-t-on résoudre une telle problématique ? L'actuel gouvernement a un caractère politique, mais cela ne signifie pas qu'il ne court pas le risque d'une gestion technocratique dépourvue d'une vision globale. Récemment pour alléger les charges de la caisse de la compensation, il a été procédé à une augmentation des prix des carburants. Une telle décision était certainement nécessaire. Mais, il ne faut pas s'arrêter à mi-chemin. La réforme de la caisse de la compensation ne peut être efficace sans une réforme fiscale. Il s'agit de deux chantiers importants visant à instaurer une certaine équité sociale et encourager, par conséquent, l'investissement. On ne peut pas envisager un développement sans se préoccuper de la classe moyenne. Le gouvernement doit avoir une vision claire par en faveur de cette catégorie, à travers par exemple la promotion de la petite et moyenne entreprise. Répondre aux attentes sociales requiert des visions globales dotées d'une capacité anticipatrice et non des visions fragmentée. Une ingénierie de la réforme s'impose. Le moment est venu pour se départir de l'illusion technocratique. Ahmed Azirar, universitaire, membre du PPS : «Lutter contre l'économie de rente» On se trouve face à des défaillances structurelles qui ne datent pas d'aujourd'hui, mais, qui remontent à des dizaines d'années. Il faut reconnaitre que le gouvernement a hérité d'un lourd fardeau économique. Le comble, c'est qu'on a assisté, récemment, à une marche de protestation, tout à fait étrange. Une marche où des voix ont appelé soit au maintien des exonérations fiscales ou à de nouvelles exonérations fiscales. Il faut être clair là-dessus : qu'est ce qu'elles ont apporté ces exonérations fiscales à l'Etat ? Aujourd'hui, tout le monde est d'accord que notre véritable problème est celui de l'investissement. Ainsi, toute personne qui n'investit pas et qui a cumulé une fortune doit être assujettie à ce que l'on appelle l'impôt sur la fortune.