Même avec ses quarante mille habitants, Tahla ressemble trop à un hameau tranquille la nuit. L'hyper activité du jour cède la place à une nuit assez passive, ou presque. Les activités culturelles ne font plus les belles soirées de ce mois. A une époque où la société civile s'activait en permanence, la maison des jeunes ne désemplissait pas. Ce n'est plus le cas, malheureusement. «Franchement, les associations ne sont plus ce qu'elles étaient avant, la force d'encadrement s'est réduite à un niveau désolant et les jeunes sont laissés pour compte », déclare Youssef, un acteur associatif de la ville. Mis à part, le seul club sportif de la ville, à savoir celui des pétanques, et qui attire tous les boulistes de la zone, les jeunes et adultes trouvent généralement refuge dans les différents cafés. Ceux ayant l'habitude d'accueillir les gens voulant simplement se rencontrer, échanger et discuter en amis, finissent souvent par fermer vers le coup de minuit. D'autres continuent jusqu'au shour, par contre. Ce sont les cafés à jeux. L'une des manifestations de cette contradiction qui traverse ce mois de piété. Les jeux de cartes et le jeu de loterie s'installent juste après les prières des Tarawihs. Tout le monde est conscient qu'il s'agit d'un acte tout à fait contraire aux principes de l'Islam, et du coup il fallait l'éviter, notamment en ce mois sacré. Mais, un grand nombre continue d'organiser ce genre de jeux. Pas en cachette. Le jeu de loterie, en particulier, se joue en pleine terrasse et même dans la rue parfois, c'est-à-dire, au vu et au su des autorités. Et personne ne comprend comment l'on tolère une telle activité ! Pire encore, ces lieux connaissent surtout un grand afflux des mineurs, veillant jusqu'à l'aube, avec toutes les conséquences éducatives et sociales. Un tissu associatif affaibli, une infrastructure sportive, associative et sportive dégradée, des autorités locales en retraite anticipée et un conseil municipal aux abonnés absents, depuis sa naissance... autant de facteurs qui en disent long sur l'état de l'animation culturelle et artistique dans cette ville, toujours en quête d'un outil de sécurité, les quelques gendarmes en service ne peuvent assurer cette fonction. D'ailleurs, la mission de contrôle de la route nationale et d'autoroute prend tout leur temps ... Les habitants n'en peuvent plus. « Les agressions et les vols qualifiés se multiplient, les dealers de haschisch n'ont pas de peur à circuler et à sévir en plein jour pendant ce mois sacré », tient à préciser une victime du vol de sa voiture. L'impunité totale ... ou presque.