Le Maroc vient d'enregistrer les premières pluies automnales de la saison. Un ouf de soulagement pour les agriculteurs après plusieurs semaines d'attente marquées par de fortes inquiétudes. Mais, en dépit de ce retard, «ces précipitations pluviométriques ne peuvent être que bénéfiques, même si cela n'est pas suffisant car il faut attendre les mois de novembre et décembre pour avoir une vision claire sur la saison agricole», estime Abbas Tanji, chercheur agronome. De son côté, Mohamed Belouchi, de la direction de la Météorologie nationale précise que «ces perturbations atmosphériques sont de bonne augure pour la saison agricole. Cela rassure d'une part ceux qui ont déjà commencé à labourer leurs champs et encourage d'autre part, ceux qui n'ont pas déjà entamé ce travail». En fait, explique Tanji, les semis de céréales ne débutent que durant ces deux mois, ainsi, il faut compter sur une grande quantité de pluies pour espérer un bon démarrage de la campagne agricole. Pour accompagner cette dernière, le ministère de l'agriculture a déjà mis sur le marché 1,3 million de quintaux de semonces certifiées destinées à améliorer la récolte, avec des prix subventionnés variant entre 200 et 300 DH le quintal. Reste à savoir que plusieurs agriculteurs, notamment les petits, se plaignent de la cherté de ces produits. Une cherté due d'abord aux dictats des spéculateurs, et ce en dépit d'une certaine transparence adoptée par la société SONACOS en matière de vente. A cela s'ajoute aussi l'augmentation des prix des engrais qui connaissent une hausse d'année en année, en s'établissant à 250DH le quintal, privant ainsi plusieurs agriculteurs d'une utilisation assez suffisante de ces produits nécessaires. Et cela ne peut qu'avoir des effets néfastes sur la production. Notons qu'au Maroc, la moyenne nationale de récolte par hectare concernant les céréales ne dépasse pas les 16 quintaux. Alors qu'en cas où il y aurait une utilisation optimale d'engrais, la récolte par hectare pourrait s'élever à 60 quintaux et ce en terre «bour». D'où la question sur l'autosuffisance alimentaire qui se pose avec acuité. Autre problème soulevé par Tanji, celui du coût de la production à l'hectare qui demeure très élevé et qui oscille aux alentours des 4000 DH. Parfois, des petits agriculteurs se trouvent dans l'obligation de vendre leurs récoltes au moindre coût. Le cheptel constitue aussi un fardeau pour les éleveurs, note Tanji. Certainement, s'il y aurait des précipitations suffisantes, cela va soulager leur budget et les rendre moins dépendants des produits alimentaires pour bétail. Abbas Tanji met aussi l'accent sur le maillon faible de la stratégie de l'Etat en matière de l'accompagnement des agriculteurs et leur initiation aux méthodes nec ultra de l'agriculture. «Au Maroc, il y a un vrai hiatus entre la recherche scientifique et le développement de l'agriculture. Les recherches effectuées au sein de l'INRA sont souvent mis au placard », martèle-t-il. «Le ministère manque d'un véritable plan de formation destiné à vulgariser le savoir scientifique auprès des agriculteurs», précise Tanji. Et d'ajouter que les Centres de travaux ne remplissent plus leurs missions comme c'était le cas auparavant. Evidement, la pénurie des ressources humaines, de logistiques, entre autres, constituent un facteur de blocage pour promouvoir le développement du monde agricole.